JeanPierre SimĂ©on et Juliette Binoche - ActuaLittĂ©, CC BY SA 2.0 Il n’y a jamais eu d’ñge d’or de la poĂ©sie : pas plus en 1930 qu’à la fin du XIXe siĂšcle. L’unique moment
Ainsi, il paraĂźt pertinent d’interroger les passerelles qui conduisent d’une Ɠuvre Ă  une autre. Le poĂšme de Jean-Pierre SimĂ©on La DiffĂ©rence in Jean-Pierre SimĂ©on, La Nuit respire, Le Chambon-sur-Lignon, Éditions Cheyne, 1997 est Ă  placer en Ă©cho Ă  ce court mĂ©trage et doit permettre aux Ă©lĂšves de s’emparer des mots du poĂšte, car derriĂšre ce poĂšme, il y a toute la question de l’ĂȘtre » qui suis-je ? OĂč suis-je ? OĂč vais-je ? Et qu’est-ce que le monde en moi, hors de moi ? Qu’est-ce que l’autre, que suis-je par rapport Ă  l’autre ? Il y a lĂ  les questions fondatrices, universelles de la DiffĂ©renceLa DiffĂ©rencePour chacun une bouche deux yeuxDeux mains deux jambesRien ne ressemble plus Ă  un hommequ’un autre hommeAlorsentre la bouche qui blesseet la bouche qui consoleentre les yeux qui condamnentet les yeux qui Ă©clairententre les mains qui donnentet les mains qui dĂ©pouillententre le pas sans traceet les pas qui nous guidentOĂč est la diffĂ©rencela mystĂ©rieuse diffĂ©rence ?La diction de l’enseignant doit ĂȘtre la plus neutre possible pour autoriser des lectures multiples et conserver la libertĂ© d’interprĂ©tation de l’élĂšve. La poĂ©sie est livrĂ©e plusieurs fois, puis, pour mĂ©moriser, les Ă©lĂšves peuvent dire des mots, des expressions, des vers prĂ©sents dans la poĂ©sie, la dire en Ă©cho, rĂ©pĂ©ter chacun des vers, une strophe entiĂšre, mentalement ou Ă  haute voix. Ils peuvent Ă©galement varier le ton, le dĂ©bit, la hauteur de voix, l’apprendre en questions-rĂ©ponses, en relais
 L’enseignant pourra alors interroger les Ă©lĂšves sur ce qui est commun entre le court mĂ©trage et le poĂšme. Le poĂšme de Jean-Pierre SimĂ©on mĂšnera indiscutablement les Ă©lĂšves vers cet autre qui est finalement le mĂȘme, vers les autres.
Voicila nouvelle poĂ©sie. Depuis la mi-janvier, nous apprenons “la diffĂ©rence” de Jean-Pierre SimĂ©on. La voici : TĂ©lĂ©charger (PDF, 406KB) Nous la connaissons assez bien Nous l’avons appris avec des gestes pour mieux
Chaque matin simplement reparlons-nous du bonheur comme chaque matin on remet ses chaussures C’est par ces mots que Jean-Pierre SimĂ©on, fondateur du Printemps des PoĂštes, Ă©diteur de poĂ©sie et poĂšte lui-mĂȘme a dĂ©cidĂ© d’ouvrir son recueil Politique de la BeautĂ©, paru en 2016. Nous avons voulu rencontrer l’homme qui est Ă©galement l’auteur, dans un proche registre, de La PoĂ©sie sauvera le Monde ou de Lettre Ă  la Femme aimĂ©e au sujet de la Mort pour savoir si la beautĂ© peut vĂ©ritablement ĂȘtre une politique, et ce que ça voudrait dire. Nous pensions deviser esthĂ©tique, lui parlait libertĂ©. Nous croyons que cet entretien, rĂ©alisĂ© avant la pandĂ©mie de ghrume, redonnera Ă  d’autres le courage voire, si nĂ©cessaire, l’envie de vivre, comme il le fit pour nous. La poĂ©sie pourrait-elle nous rappeler ce que vivre signifie ? Écoutons. Jean-Pierre SimĂ©on © Le Printemps des PoĂštes La beautĂ© que l’on croit PostAp Mag. Les temps sont un peu compliquĂ©s
 Est-ce vraiment le moment de lire de la poĂ©sie ou mĂȘme, d’ailleurs, de s’y consacrer ?Jean-Pierre SimĂ©on. Je suis prĂ©cisĂ©ment convaincu que la poĂ©sie est nĂ©cessaire, utile, voire urgente, dans le contexte d’un monde chahutĂ©, tourmenté  OĂč tout va mal, quoi. Parce que la poĂ©sie incarne, manifeste mais permet aussi de partager, de prendre conscience de ce que l’on appelle gĂ©nĂ©ralement la beautĂ© ». C’est un terme attrape-tout, je le sais bien. C’est pour cela que j’essaie de dire, dans ce livre, ce que j’entends, moi, par beautĂ© ». La beautĂ© ce n’est pas, Ă  mon sens, la belle forme, l’harmonie, toutes ces reprĂ©sentations hĂ©ritĂ©es de la tradition, que j’estime enfermantes. Pour moi, la beautĂ©, donc ce que la poĂ©sie exprime, c’est quelque chose qui est de l’ordre de l’énergie. De l’ordre de se tenir debout, de se dresser, dans une sorte d’appĂ©tit du monde et de la rĂ©alitĂ©. Ce mot recouvrirait donc un certain nombre de qualitĂ©s humaines, notamment d’ordre Ă©thique c’est l’énergie, c’est le courage. C’est la luciditĂ©, qui est un courage aussi. C’est le mouvement vers. C’est tout le contraire de l’arrĂȘt, du dĂ©couragement, du ressassement, de la dĂ©ception, de l’enfermement dans l’abandon de tout. J’appelle beautĂ© » tout ce qui est mouvement vers, en fait. Et c’est ce mouvement qui fonde, pour moi, l’humain. PAM. La beautĂ© est en nous ? Car on a souvent l’idĂ©e d’une beautĂ© immanente, lointaine que les artistes, insuffisamment, piteusement, tenteraient de reconstruire
 S. Oui, elle est en nous ! C’est une question immense, bien entendu, et je voudrais d’entrĂ©e prĂ©ciser que je ne la pose pas en tant que philosophe, mais bien en tant que poĂšte je raisonne au plus prĂšs de ma propre sensation des choses, et rien d’autre. C’est la limite de ma parole, sa subjectivitĂ©, que j’assume, car c’est le fait du poĂšte. Pour moi, la beautĂ© se conquiert, se construit. Le mot beautĂ© » n’a de sens que dans une dialectique de combat, d’une lutte quotidienne, individuelle et collective le combat contre la laideur. Et je nomme laideur tout ce qui est forces antagonistes de l’humain », autrement dit tout ce qui est l’alliĂ© de la mort. Toutes les violences faites Ă  l’humain par l’humain et toutes les violences faites Ă  l’homme en l’homme, Ă  la femme en la femme, malgrĂ© lui, malgrĂ© elle. Tous les dĂ©mentis de la vie. Toutes les agressions faites Ă  la vie, dans la vie mĂȘme. Parce que, au fond, notre vie est un combat perpĂ©tuel contre le gouffre et l’abĂźme. PAM. Euh
 S. Je pense que tout commence par la catastrophe. Je l’ai dit souvent, je l’ai Ă©crit. La catastrophe de notre mort, pour commencer. DĂšs que l’on a un peu de conscience
 BĂ©bĂ©s, trĂšs tĂŽt nous vient la conscience de la solitude. LĂ  encore, je ne parle pas en psychanalyste. Je dis ce qu’il me semble. DĂšs qu’il quitte les bras de ses parents, un bĂ©bĂ© apprend la solitude. La solitude de l’enfant qui se trouve, soudain, posĂ© loin des bras, loin de la parole et des yeux, lui est terrible. Et cette solitude-lĂ , cette expĂ©rience de la sĂ©paration, de la perte, de la dĂ©possession, cette connaissance-lĂ , est physique, premiĂšre, initiale. C’est un aperçu de la mort et donc, on commence par la mort, d’une certaine façon. AussitĂŽt qu’on nait. AussitĂŽt qu’on nait, on prend le sentiment de la perte. De la dĂ©possession. De l’abandon. De la solitude. Il me semble que toute notre vie, Ă  la suite, est faite de la conscience de ça, et de l’effort pour dĂ©passer ça. Effort que la vie sans cesse dĂ©ment, puisqu’elle propose sans cesse des gouffres, des gouffres, des nouveaux gouffres et encore des gouffres, qui n’arrĂȘtent pas de confirmer que oui, si si, on est bel et bien nĂ© dans l’abĂźme. Vitraux de la synagogue de l’hĂŽpital d’Hadassah par Marc Chagall DĂ©tail. La vie Ă  plusieurs PAM. Oui, enfin, quand on Ă©coute un peu ce dont se plaint tout le monde, c’est plutĂŽt de payer trop d’impĂŽts. Ou pas les impĂŽts qu’il faudrait, Ă  la S. Bien sĂ»r. Je vais rĂ©pondre plus directement mais d’abord, je prĂ©cise que je parlais Ă©videmment d’un point de vue purement psychologique, du destin de la vie de chacun. De nos proches, qui meurent les uns aprĂšs les autres, jusqu’à ce que ce soit notre tour. On est mutilĂ© sans cesse comme ça. Et la beautĂ© dont je parle, ce construire-humain » donc, c’est ce qui s’inscrit contre ces mutilations. C’est sans cesse rĂ©parer la mutilation, d’abord, et la dĂ©passer, ensuite. Car autant on est mutilĂ©, autant on est augmentĂ© en face. Chaque mort, chaque dĂ©possession, chaque perte, chaque oubli qui nous dĂ©possĂšde
 À chaque fois on peut se reconstruire dans l’énergie inverse. Seulement, il faut le vouloir. Il faut pour cela un acte de dĂ©cision. C’est pourquoi, Ă  sa maniĂšre, ce titre, Politique de la BeautĂ©, insiste en rĂ©alitĂ© sur le mot politique » c’est une action concertĂ©e et rĂ©flĂ©chie. Mais Ă  la faveur de votre question marrante, il y a quelque chose dont je tiens compte, c’est que ce qui nous empĂȘche d’ĂȘtre humains et de nous accomplir dans l’humanitĂ©, c’est tout le reste. Tout ce qui est du domaine du concret et du matĂ©riel, c’est Ă  dire de la relation sociale par exemple, la relation Ă  l’autre, du moins telle qu’elle est dĂ©finie par les fonctions, les rĂŽles, les revenus des uns et des autres, et ainsi de suite. LĂ  oĂč sans cesse, on le voit bien, il y a des humiliations, des amputations, qui tiennent tout simplement Ă  l’ordinaire des mĂ©canismes sociaux. Et puis il y a aussi les grandes oppressions, symboliques, des sociĂ©tĂ©s religieuses, idĂ©ologiques et sociales. Oppressions et des mutilations, lĂ  encore. Pour le dire autrement, ou le redire il y a plein de strates d’empĂȘchements et nous sommes sans arrĂȘt au combat. Si l’on veut ĂȘtre une conscience libre, qui se dresse, qui possiblement trouve un sens Ă  sa vie, qui est en accord avec la vie, en accord exact avec la vie c’est cela qu’on appelle le bonheur, c’est pour cela qu’il ne saurait ĂȘtre qu’éphĂ©mĂšre et transitoire
 Eh bien, tout ça, ça ne se donne pas. Ça n’est pas donnĂ©, jamais. Ça ne peut se trouver que dans la conquĂȘte et dans le combat. PAM. Le combat ? S. Le combat contre ce que j’appelle la laideur. Toutes les laideurs de l’existence. Qu’elles soient mĂ©taphysiques, ontologiques, aussi bien que
 Disons, que toutes les merdes de l’existence, quoi. Tout ce qui est violence et agressions contre nos dĂ©sirs, contre notre volontĂ© d’ĂȘtre bien, libre et de vivre simplement.
Tduvvz7.
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