En976, le domaine de Gouy, enlevé à Arnould II de Cambrai (+1012), usurpateur du comté de Mons, par Othon comte de Vermandois (979/1045), devient une possession du Pays de Vermondois dont il n'est plus séparé. Ce seigneur y fait construire un chùteau-fort destiné à défendre les frontiÚres de ses vastes domaines.
C'est reparti pour des semaines de souffrance. La presse, aprĂšs nous avoir inondĂ©s de propos ineptes sur le tournoi de Roland-Garros, se gargarise du Mondial de balle-au-pied, cette annĂ©e au BrĂ©sil. Roland-Garros, c'est l'endroit oĂč se montrer, avec les lunettes Ă  la mode cette saison et un couvre-chef qui se distingue de celui du voisin. C'est bling-bling et nouveau riche, mais une fois sortis du stade, ces gens-lĂ  ne font de bruit qu'avec le Klaxon de leur Jaguar, dans le bouchon de la porte d'Auteuil. Avec le dieu football, on entre dans une autre dimension. Sociale, financiĂšre et religieuse. Dimension sociale, parce qu'elle s'Ă©tend sur une grande partie de la sociĂ©tĂ©. Hormis les irrĂ©ductibles rĂ©fractaires - dont je suis –, personne n'ignore qui est Benzema ou avec qui couche RibĂ©ry. Une travailleuse du boulevard, dont l'extrĂȘme jeunesse n'a pas freinĂ© les ardeurs, a fait fortune par la grĂące des hormones exigeantes d'un individu qu'on pourrait confondre avec un pensionnaire des Baumettes, si l'on n'y prenait garde. Mais ces gens lĂ , Monsieur, on les voit plutĂŽt au volant d'une Porsche dernier cri. Et ce sont pourtant des idoles adorĂ©es par la population. Et chacun sait, en Ă©coutant la radio, que les informations de premiĂšre importance concernant les "Bleus" sont prioritaires sur les catastrophes, les gĂ©nocides, les augmentations d'impĂŽts et les Ă©lections. Le veau d'or... Dimension financiĂšre, parce que ces individus dont la bobine n'inspire pas une confiance immodĂ©rĂ©e sont les seuls, en France, Ă  oser dĂ©voiler les salaires hallucinants qu'ils perçoivent pour courir derriĂšre un ballon et coller des coups de boule Ă  l'occasion. Dans un pays oĂč l'Ă©galitarisme est si maladif qu'on prĂ©fĂšre marcher Ă  pied Ă  cĂŽtĂ© de Rothschild que de rouler en Clio derriĂšre la Rolls du prĂ©cĂ©dent, seuls ces gars-lĂ  peuvent se permettre une telle impudeur. À l'instar des racailles qui brĂ»lent les voitures et cassent la gueule des petites vieilles, l'employĂ© smicard qui prend chaque jour le RER idolĂątre ces gens. Il a, lĂ , une indĂ©cence qui ne s'explique pas. Dimension religieuse, enfin. Comme dans l'empire dĂ©cadent, la transcendance cĂšde la place Ă  la religion du jeu. Le football est une religion, avec ses prĂȘtres, son dogme, ses nombreux exĂ©gĂštes et surtout une foule innombrable de fidĂšles. Sur certaines radios, des Ă©missions quotidiennes de plusieurs heures sont consacrĂ©es au commentaire des matchs. Je connais des gens pour qui la lecture des dĂ©clarations des footeux dans L'Équipe Ă©quivaut Ă  l'analyse quotidienne des articles de Boulevard Voltaire ! Quand on connaĂźt le niveau lexical et la conjugaison hĂ©sitante des interviewĂ©s, cela devient un sacerdoce digne de l'enseignement du langage des signes Ă  un aveugle... Reste une bonne nouvelle les BrĂ©siliens les plus pauvres se rĂ©voltent contre cette dĂ©bauche d'argent pour organiser ces modernes jeux du cirque. Il reste sur cette terre des gens capables de dĂ©noncer ce nĂ©o-paganisme auquel, en France, on n'Ă©chappe que rĂ©fugiĂ© dans une chartreuse. 47 vues 12 juin 2014 Pas encore de compte, inscrivez-vous gratuitement sur possibilitĂ© d'ajouter de nouveaux commentaires a Ă©tĂ© dĂ©sactivĂ©e. DESHÉRÉSIES. Oeuvres complĂštes de saint Augustin traduites pour la premiĂšre fois en français, sous la direction de M. Raulx, Bar-Le-Duc, L. GuĂ©rin & Cie, Ă©diteurs, 1869, Tome XIV. p. 1-21. Traduction de M. l'abbĂ© AUBERT. Bien des fois, cher et saint Quodvultdeus (1), tu m'as instamment priĂ© d'Ă©crire , sur les hĂ©rĂ©sies, un livre Si elle a bien fait son choix Ă©vident entre Leo Messi et Cristiano Ronaldo, il n’est pas question de dĂ©cider qui elle prĂ©fĂšre entre Meghan Markle et Kate Middleton. Poissons ascendant Verseau, elle est dotĂ©e d'un sixiĂšme sens qui l'aide Ă  vous dĂ©nicher les informations les plus cachĂ©es sur vos stars prĂ©fĂ©rĂ©es. Chaque annĂ©e, le 10 aoĂ»t est une date douloureuse pour Vanessa Demouy. Il y a six ans, la comĂ©dienne perdait un ami qui lui Ă©tait trĂšs cher. Ce jour, elle lui a rendu Ă  nouveau un bel hommage, sur Instagram. Il Ă©tait l'un de ses plus fidĂšles amis, et depuis sa disparition Vanessa Demouy ne manque pas une occasion de lui rendre hommage. Ce 10 aoĂ»t plus qu'Ă  toute autre date puisqu'il s'agit du triste anniversaire de la disparition de Christophe Millant. C'Ă©tait il y a 6 ans jour pour jour, le chef d'entreprise, manager des relations publiques du Crazy Horse pendant dix ans, est dĂ©cĂ©dĂ© d'une crise cardiaque. S'il a donnĂ© un coup de pouce Ă  un nombre considĂ©rable d'artistes en quĂȘte de popularitĂ©, Christophe Millant Ă©tait devenu un ami pour Vanessa Demouy. Ce 10 aoĂ»t 2022, l'actrice de 49 ans a partagĂ© une belle photo en noir et blanc de ce dernier, sur Instagram. "10 aoĂ»t ... mon christophe ... je pense tellement Ă  toi ... tu m accompagnes de la haut ... je te 'sens' si souvent Ă  mes cĂŽtĂ©s ... mon Ă©toile ... je t aime", a-t-elle Ă©crit avec le hashtag "Amis pour la vie". Ce n'est pas la premiĂšre fois que la mĂšre de Solal 18 ans et Sharlie 11 ans, nĂ©s de sa relation avec son ex-mari Philippe Lellouche, dont elle n'est toujours pas officiellement divorcĂ©e, a une pensĂ©e pour le regrettĂ© Christophe Millant. Je pense tellement Ă  toi Les annĂ©es ont beau passer, elle n'oublie pas celui qui Ă©tĂ© son ami, son pilier, son roc. L'hĂ©roĂŻne de la sĂ©rie Ici tout commence a tenu Ă  lui rendre hommage, en partageant ce portrait de lui sur les rĂ©seaux, et en exprimant toute sa peine, en cette triste date. "Le manque reste, regrettait-elle dĂ©jĂ  l'an dernier, Ă  la mĂȘme Ă©poque. Je m'accroche Ă  nos souvenirs qui rejaillissent sans crier gare, au dĂ©tour d'une rue, au milieu d'une exposition ou lorsque je sens ton parfum dans la foule. Tes rires me manquent, ta bienveillance, ta douceur et tes conseils avisĂ©s aussi... je rĂȘve d'entendre de nouveau prononcĂ© le surnom dont tu m'avais affublĂ©e. Tu Ă©tais le seul Ă  pouvoir m'appeler comme ça. Je sais que de lĂ -haut tu veilles, j'espĂšre que tu es fier. Je t'aime." Vanessa Demouy n'Ă©tait pas la seule Ă  avoir eu la chance de connaĂźtre cet homme. L'an dernier, d'autres cĂ©lĂ©britĂ©s s'Ă©taient ainsi exprimĂ©es suite au post de l'actrice, parmi lesquelles Ariane Seguillon, ou encore Veronika Loubry. Abonnez-vous Ă  Purepeople sur facebook
Dupremier au dernier mail avec cet escroc : TĂ©moignage de Marcel qui raconte la tentative d’escroquerie qu’il a subit Ă  travers tous les mails reçus. Il s’agit donc d’une arnaque aux sentiments doublĂ©e d’une arnaque Ă  l’hĂ©ritage. CrĂ©dit : Jee & Rani Nature Photography.
Dans la presse Les Podcasts Impression Gratuit pour les moins de 2 ans Qui retrouvera le Prince Aubert ? Au fil du spectacle, les indices sont met Ă  votre disposition diffĂ©rents services afin de vous aider Ă  organiser vos sorties spectacle. ItinĂ©raire, plan d'accĂšs, informations sur le lieu de reprĂ©sentation...Le calendrier vous aidera Ă  mieux choisir le jour et l'horaire suceptible de vous fois la reprĂ©sentation terminĂ©e, n'oubliez pas de revenir visiter votre espace perso pour rĂ©diger une critique et partager votre expĂ©rience avec les autres espace perso vous permet Ă©galement de consulter et imprimer vos billets. En cas d'empĂȘchement, vous pourrez procĂ©der Ă  l'annulation d'une votre propre Newsletter et restez informĂ© en prioritĂ© des bons plans !L'espace perso est accessible en haut Ă  droite de votre Ă©cran ! RĂ©server Carrefour Écrire une critique Seuls les utilisateurs identifiĂ©s peuvent laisser un avis
Quiretrouvera le Prince Aubert ? Au fil du spectacle, les indices sont donnĂ©s, tantĂŽt aux enfants, tantĂŽt Ă  la Princesse policiĂšre. Il ne reste qu’à recoller les morceaux. Humour et suspense sont au rendez-vous de cette histoire interactive, palpitante pour les enfants et hilarante pour les grands. Le Prince Aubert a Ă©tĂ© fait prisonnier par Madame Moche. Celle-ci
ComĂ©die Ă  3 comĂ©diens pour toute la famille Ă  partir de 4 retrouvera le Prince Aubert ? Au fil du spectacle, les indices sont donnĂ©s, tantĂŽt aux enfants, tantĂŽt Ă  la Princesse policiĂšre. Il ne reste qu’à recoller les morceaux. Humour et suspense sont au rendez-vous de cette histoire interactive, palpitante pour les enfants et hilarante pour les Prince Aubert a Ă©tĂ© fait prisonnier par Madame Moche. Celle-ci projette Ă  prĂ©sent d’empoisonner le Roi. Tout le Royaume est en danger. Le temps est compté La Princesse Pervenche, sorte de FantĂŽmette en herbe, va-t-elle deviner le complot qui se trame et dĂ©couvrir Ă  temps le vrai visage de Madame Moche ?Vrai garçon manquĂ©, la Princesse dĂ©tective plaĂźt autant aux filles qu’aux personnages de la mĂ©chante et du prince sont, eux, particuliĂšrement ridicules et vraie intrigue policiĂšre, pendant laquelle les enfants vont saisir les indices au fur et Ă  mesure avec, en gĂ©nĂ©ral, une longueur d’avance sur la jeune hĂ©roĂŻne !Cette comĂ©die qui en est Ă  sa 6Ăšme annĂ©e de succĂšs, entraĂźne les enfants dans une aventure pleine de rires et de rebondissements. C’est aussi un petit bijou d’humour pour les parents qui ne s’ennuient jamais. Fous rires garantis !Du mĂȘme auteur voir Ă©galement Ă  Paris La Princesse au petit pois dans la tĂȘte », la Princesse Rose et le retour de l’Ogre », Toutankhamon et le scarabĂ©e d’or », Pierre et la Princesse ensorcelĂ©e »
Devenule prĂ© de Clagny avant la RĂ©volution, puis le quartier des PrĂ©s Ă  partir de 1779, il fut progressivement construit, avec la crĂ©ation du boulevard de la Reine en 1777, et surtout avec l’arrivĂ©e de la ligne de chemin de fer (Paris Saint-Lazare) au cours de la Monarchie de juillet (1839), puis avec la construction des quartiers de Clagny, et au nord, de Glatigny.
DĂ©couvert par Jacques Cartier en 1534, le QuĂ©bec Province de l'actuel Canada est la premiĂšre colonie française en AmĂ©rique du nord, aprĂšs la fondation de la ville de QuĂ©bec par Champlain en 1608. Son histoire se confond donc Ă  ses dĂ©buts avec celle de la Nouvelle-France. Pour comprendre la psychologie quĂ©bĂ©coise, il convient de se rĂ©fĂ©rer sans cesse Ă  ce prestigieux passĂ© qui vit les explorateur français donner au royaume un empire colonial immense qui couvrait la majeure partie du Canada et une grande partie des Etats-Unis. Mais ni les Français, ni les Anglais ne furent les premiers habitants du QuĂ©bec et une histoire de ce territoire, grand comme trois fois la France, ne saurait ignorer ce qui s'est passĂ© avant l'arrivĂ©e du premier EuropĂ©en. L'histoire du QuĂ©bec indien On admet gĂ©nĂ©ralement que le peuplement de l'AmĂ©rique du nord s'est essentiellement effectuĂ© par le dĂ©troit de BĂ©ring, voici plus de 20000 ans, Ă  l'Ă©poque glaciaire. Des vestiges archĂ©ologiques tĂ©moignent de la prĂ©sence d'un habitat de chasseurs palĂ©olithiques dans la vallĂ©e du Saint-Laurent voici 10000 ans. Plusieurs milliers d'annĂ©es plus tard, la chasse, la pĂȘche et la cueillette cĂ©dĂšrent la place Ă  des embryons d'agriculture. L'outillage se diversifia. La pierre taillĂ©e puis polie, fut remplacĂ©e progressivement par le cuivre. La prĂ©sence de minĂ©raux provenant de Pennsylvanie et du Labrador montre l'existence d'un rĂ©seau d'Ă©changes important. Le peuplement s'Ă©tendit vers les Laurentides et la poterie fit son apparition voici environ 5000 ans. L'arrivĂ©e des Inuits, qui remplacĂšrent les Tunits, aujourd'hui disparus, fut plus tardive ; ils ne seraient parvenus sur le territoire du QuĂ©bec qu'un millier d'annĂ©es avant notre Ăšre. Sur deux pierres trouvĂ©es dans les Cantons de l'Est, on a cru dĂ©couvrir une Ă©criture phĂ©nicienne. On pense que des moines irlandais, chassĂ©s par les Vikings, auraient pu se rĂ©fugier dans le Golfe du Saint-Laurent vers la fin du 9Ăšme siĂšcle. Vers l'an 1000, dans le sillage d'Erik le Rouge, installĂ© en Islande, qui explora Terre-Neuve, des Vikings s'installĂšrent sur la cĂŽte canadienne laissant des traces de leur prĂ©sence jusque vers 1340. Lors de l'arrivĂ©e des EuropĂ©ens, les tribus indiennes cultivaient dĂ©jĂ  le maĂŻs, la courge, le tournesol et le haricot, mĂȘme si ce dĂ©but d'agriculture n'Ă©tait pas trĂšs ancien. La population indienne s'Ă©levait alors Ă  quelques 30000 individus sur le territoire du QuĂ©bec actuel. Au dĂ©but du 16Ăšme siĂšcle, au cours de campagnes de pĂȘche Ă  la morue, des navigateurs français, notamment basques, frĂ©quentĂšrent les environs de Terre-Neuve. Ils ramenĂšrent en France quelques AmĂ©rindiens. En 1520, une colonie portugaise Ă©phĂ©mĂšre s’établit au Cap-Breton. En 1524, des marchands et le roi de France, François Ier, commanditĂšrent un explorateur florentin, Jean de Verrazane ou Verrazzano - 1485-1528, pour trouver un passage par l'ouest vers l'Orient mystĂ©rieux. La France, qui s’était laissĂ©e distancer par d'autres pays europĂ©ens dans la course aux dĂ©couvertes, entendait combler son retard. L'expĂ©dition Ă©choua, Verrazzano revint bredouille, aprĂšs avoir explorĂ© la cĂŽte amĂ©ricaine de la Floride Ă  Terre-Neuve. Mais le mouvement Ă©tait lancĂ© et, sur les cartes de l'Ă©poque, apparurent bientĂŽt la Mer de France, au large du Golfe du Saint-Laurent, le Cap Breton et la Terre des Bretons au sud du fleuve. Les trois voyages de Jacques Cartier Les trois voyages de Jacques Cartier 1491-1557, qui ont lieu de 1534 Ă  1542, marquent la premiĂšre Ă©tape significative de l'histoire et de la formation de la Nouvelle-France. Au cours du premier voyage, le navigateur breton, natif de Saint-Malo, explore le fleuve Saint-Laurent, toujours Ă  la recherche du passage qui permettrait d'atteindre le fabuleux Cathay de Marco Polo. Le 24 juillet 1534, il met pied Ă  terre Ă  GaspĂ© oĂč il plante une croix, on ne sait trop oĂč, prenant ainsi possession du littoral gaspĂ©sien au nom du roi de France. Il ramĂšne en France deux des fils du chef iroquois de l'endroit, Donnacona, lequel voit les EuropĂ©ens arriver sur son territoire avec apprĂ©hension. Au cours du second voyage 1535-1536, Jacques Cartier baptise une petite baie oĂč il fait relĂąche, le 10 aoĂ»t 1535, du nom du saint de ce jour lĂ , Saint-Laurent, puis remonte le fleuve qui portera ultĂ©rieurement ce nom. Il dĂ©couvre l'Ăźle aux Coudres, s'Ă©tablit au havre Sainte-Croix, prĂšs du village indien de StadaconĂ©, Ă  proximitĂ© de l'endroit oĂč s'Ă©lĂšvera plus tard QuĂ©bec, puis poursuit jusqu'Ă  Hochelaga, une bourgade indienne fortifiĂ©e de palissades, situĂ©e sur une Ăźle cultivĂ©e oĂč pousse du blĂ© d'inde, comme les QuĂ©bĂ©cois continuent d'appeler le maĂŻs. Jacques Cartier nomme la montagne oĂč se trouve le village indien Mont Royal ; elle porte toujours ce nom et la ville de MontrĂ©al s'Ă©lĂšve aujourd'hui Ă  ses pieds ainsi que sur ses pentes. Le Malouin y fait connaissance avec l'herbe Ă  petun, le tabac des calumets, qu'il apprĂ©cie peu. Le voyage bute alors sur les rapides Lachine et il faut rebrousser chemin. Au cours du retour, Jacques Cartier contourne Terre-Neuve et prouve ainsi qu'il s'agit d'une Ăźle. Il ramĂšne avec lui en France Donnacona, lequel mourra trois ans plus tard sans avoir revu son pays ; sont Ă©galement du voyage quelques autres Iroquois, dans l'intention de les prĂ©senter Ă  François Ier. Le roi de France, allĂ©chĂ© par les rĂ©cits du chef indien, engage Jacques Cartier Ă  entreprendre un troisiĂšme voyage, dans le but de rapporter de l'or, des pierres prĂ©cieuses et des Ă©pices, mais aussi d'implanter une colonie et de propager le catholicisme. En occupant les terres dĂ©couvertes, François Ier manifeste son intention de rejeter les prĂ©tentions de l'Autriche et du Portugal sur l'ensemble du Nouveau Monde. A cette fin, une expĂ©dition est montĂ©e ; elle doit ĂȘtre dirigĂ©e par un seigneur de la cour de France, Jean-François de la Roque de Roberval 1500-1560, natif de Carcassonne, nommĂ© lieutenant-gĂ©nĂ©ral de la Nouvelle-France. Mais, comme l'expĂ©dition prend du retard, Jacques Cartier, qui ne goĂ»te probablement pas le rĂŽle de second qu’on lui impose, part le premier en 1541. La traversĂ©e est difficile ; un fort n'en est pas moins construit au confluent du Saint-Laurent et de la riviĂšre du Cap Rouge, Charlesbourg-Royal, pour prĂ©parer la colonisation. En mĂȘme temps, le navigateur se procure auprĂšs des Indiens ce qu'il croit ĂȘtre de l'or et des diamants. En 1542, alors qu'il revient en France, il rencontre Roberval Ă  Terre-Neuve. Celui-ci lui ordonne de retourner dans le Saint-Laurent ; le Breton refuse et rentre dans sa patrie oĂč il se retrouvera bredouille, sa cargaison n'Ă©tant composĂ©e que de pyrite et de quartz sans valeur ! En 1542, Roberval arrive au havre Sainte-Croix avec trois gros navires et une centaine de colons. L'hiver dĂ©cime les nouveaux venus. En 1543, il explore le Saguenay Ă  la recherche du merveilleux royaume que Donnacona et ses fils ont prĂ©tendu exister sur ses rives Ă  François Ier. Il espĂšre Ă©galement dĂ©couvrir un passage vers le nord-ouest jusqu'Ă  la mer qui baigne les Indes. Cette exploration demeure vaine mais Roberval laisse son nom Ă  une ville qui s'Ă©lĂšve aujourd'hui sur les berges du Lac Saint-Jean. L'explorateur rentre en France ruinĂ©, et la colonisation est temporairement abandonnĂ©e. Roberval a cependant remontĂ© la riviĂšre des Outaouais et son pilote, Jean Fontenaud ou Jean Alphonse de Saintonge 1484-1549, a dĂ©montrĂ© l'existence d'un dĂ©troit navigable entre le Groenland et le Labrador. Le pilote tentera de revenir sur les lieux toujours Ă  la recherche d'un passage vers le nord-est. Les Espagnols enverront son navire par le fond, Ă  une date indĂ©terminĂ©e, alors qu'il rentre vers La Rochelle. Les terres explorĂ©es ne paraissant recĂ©ler ni or ni diamant, on s'en dĂ©sintĂ©resse et on laisse leur approche aux pĂȘcheurs, parmi lesquels des Français Basques, Bretons et Normands jusqu'Ă  ce que le commerce des peaux n'attire Ă  nouveau les convoitises. L'Ă©poque des guerres de religion ne favorise d’ailleurs guĂšre les aventures maritimes. La fondation de la Nouvelle-France par Samuel Champlain A partir de 1581, des commerçants français commencent Ă  pratiquer la traite des fourrures dans le Golfe du Saint-Laurent. A la diffĂ©rence de la pĂȘche, cette nouvelle activitĂ© suppose l'existence de comptoirs, c'est-Ă -dire d'Ă©tablissements fixes, et l'idĂ©e de la colonisation vient naturellement Ă  l'esprit. En 1600, Pierre de Chauvin 1575-1603 ouvre un poste de traite Ă  Tadoussac, au confluent du Saguenay et du Saint-Laurent. En 1603, Samuel de Champlain 1567-1635, natif de Brouage, participe comme navigateur, explorateur et cartographe, Ă  un voyage organisĂ© par un autre marchand, François GravĂ©, qu'il assiste en tant que second. Il remonte le Saint-Laurent jusqu'Ă  Trois-RiviĂšres. Un second voyage l'amĂšne Ă  l'embouchure du Saguenay. Il y rencontre le chef montagnais Anadabijou ; celui-ci accueille d'autant mieux le navigateur qu'un Indien qui revient de France dit le plus grand bien du roi Henry IV, et de sa bienveillance pour les gens de la race rouge. Le calumet de la paix est fumĂ©. Cette premiĂšre entente va influencer durablement la politique indigĂšne de la France qui s'engage contre les Iroquois, une puissante confĂ©dĂ©ration de cinq tribus, dont l'organisation inspirera plus tard la constitution des Etats-Unis. Champlain remonte ensuite le fleuve jusqu'aux rapides pour en dresser la carte qu'il doit remettre au roi. De 1604 Ă  1607, le navigateur explore la cĂŽte amĂ©ricaine jusqu'Ă  Cap Cod Massachussetts au cours d'une expĂ©dition dirigĂ©e par Pierre Dugua de Mons avec, une fois de plus, François GravĂ© comme pilote. Plusieurs Ă©tablissements sont créés, dont Port-Royal ; c'est le dĂ©but de l'Acadie. Mais les privilĂšges commerciaux accordĂ©s Ă  Dugua de Mons ayant Ă©tĂ© rĂ©voquĂ©s, l'expĂ©dition revient en France en laissant Port-Royal Ă  la garde du chef indien ami Membertou. La France entre sur ce point en compĂ©tition avec les Hollandais et les Anglais. En 1598, Troillus des MesgoĂŒets ou Troilus de La Roche de Mesgouez 1536-1606, nommĂ© gouverneur de Terre-Neuve par Henri III, puis Henry IV, embarque une quarantaine de mendiants qu'il dĂ©pose sur l'Île des Sables, qu'il baptise Île Bourbon, prĂšs de la Nouvelle-Ecosse actuelle. Presque tous mourront. En 1608, Champlain repart comme lieutenant de Dugua de Mons, qui reste en France, avec vingt huit personnes de sexe masculin, dans le dessein de crĂ©er un Ă©tablissement permanent. Il dĂ©barque au pied du Cap Diamant et fonde la ville de QuĂ©bec, d'aprĂšs le nom que les Montagnais ont donnĂ© au lieu, c'est-Ă -dire RĂ©trĂ©cissement du fleuve ». Au cours du premier hivernage, la petite colonie est dĂ©cimĂ©e par le scorbut et la dysenterie. Seul huit hommes survivent en plus de Champlain. Celui-ci renforce son alliance avec les Montagnais et les Algonquins. Les relations avec ces derniers sont d'autant plus faciles qu'ils sont en conflit quasi permanent avec les Iroquois au sujet du commerce des fourrures. En 1609, Champlain remonte la riviĂšre Richelieu et dĂ©couvre le lac qui porte aujourd'hui son nom. Aucune mauvaise rencontre n'ayant eu lieu, une partie de la troupe quitte l'explorateur. Celui-ci reste seul avec deux Français et une soixantaine de Hurons. C'est alors, qu'Ă  l'emplacement du futur fort Carillon, un peu au sud de Crown Point Etat de New-York, l'expĂ©dition entre au contact des Iroquois. Le lendemain, deux cents guerriers sont sur le sentier de la guerre. Champlain tue un de leurs chefs d'un coup d'arquebuse semant la terreur parmi ses ennemis qui se dĂ©bandent. Ce coup de feu marque le dĂ©but d'une longue lutte qui opposera les Français, amis des Hurons, des Montagnais et des Algonquins, aux Iroquois alliĂ©s des Anglais. Champlain rentre en France avec l'espoir de relancer le commerce de la fourrure et d'intĂ©resser les marchands Ă  l'Ă©tablissement de QuĂ©bec. De retour au Canada, en 1610, il y est blessĂ© d'une flĂšche Ă  l'oreille et au cou, lors d'un nouvel affrontement avec les Iroquois, sur la riviĂšre Richelieu. Le commerce des fourrures s'avĂ©rant dĂ©sastreux et Henry IV Ă©tant mort assassinĂ©, Champlain revient en France une fois de plus et s'y marie avec une jeune fille mineure ĂągĂ©e de 12 ans. Il retourne au Canada en 1611 pour explorer les environs de l'Ăźle de MontrĂ©al, notamment la riviĂšre des Prairies, et baptise une des Ăźles du fleuve du nom de Sainte-HĂ©lĂšne, en l'honneur de sa jeune Ă©pouse. Un dĂ©frichement est entrepris dans le secteur de l'actuelle Place Royale, dans un endroit qui sert de lieu de rassemblement aux Indiens ; le site est protĂ©gĂ© contre les crues par un muret de pierres. Champlain descend les rapides dans un canoĂ« d'Ă©corce pour asseoir son prestige sur les Indiens. Il revient en France en 1611 afin d'assurer l'avenir de son entreprise abandonnĂ©e par les marchands. En 1612, Louis XIII nomme le comte de Soissons, futur prince de CondĂ©, lieutenant-gĂ©nĂ©ral en Nouvelle-France ; Champlain, avec le titre de lieutenant, le remplacera en son absence ; il exercera l'autoritĂ© de la couronne, continuera de rechercher un passage vers la Chine et d'exploiter les mines de mĂ©taux prĂ©cieux qui viendraient Ă  ĂȘtre dĂ©couvertes. Dans ce cadre, dĂšs 1613, le navigateur français entreprend un premier voyage vers le Pays d'en Haut par la riviĂšre des Outaouais Ottawa. Mais les informations qu'il obtient des Indiens le laissent dubitatif et il revient sur ses pas, aprĂšs avoir perdu son astrolabe. Les compagnies Ă  charte En 1614, de nouveau en France, il fonde la Compagnie des marchands de Rouen et de Saint-Malo et la Compagnie de Champlain, avant de revenir au Nouveau monde, en 1615, accompagnĂ© de RĂ©collets pour Ă©vangĂ©liser les Indiens Denis Jamet ?-1625, Jean Dolbeau 1586-1652, Joseph Le Caron 1586-1632, Pacifique Duplessis 1584-1619. Une maison et une chapelle sont construites ; une premiĂšre messe est cĂ©lĂ©brĂ©e Ă  la RiviĂšre des Prairies par le pĂšre Denis Jamet assistĂ© du pĂšre Joseph Le Caron. La mĂȘme annĂ©e, Champlain entreprend un nouveau voyage vers le Pays d'en Haut, jusqu'au lac Ontario. Il longe ensuite la riviĂšre Oneida. Entre les lacs Oneida et Onondaga, il rencontre un fort iroquois, livre bataille avec les Hurons qui l'accompagnent et est Ă  nouveau atteint par deux flĂšches, dont l'une le blesse au genou. AprĂšs trois heures de combat, il est contraint de battre en retraite. Il se rĂ©fugie en Huronie, pour y passer l'hiver. Perdu en forĂȘt, au cours d'une partie de chasse au cerf, il erre 3 jours durant, et il est tenu pour mort, avant de rejoindre ses semblables. En 1616, aprĂšs avoir amĂ©liorĂ© les dĂ©fenses de QuĂ©bec, il repart pour la France. Le prince de CondĂ© a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©, et le marĂ©chal de ThĂ©mines l'a remplacĂ© avec le titre de vice-roi. Champlain plaide la cause du Canada auprĂšs du pouvoir le territoire contrĂŽlĂ© est immense, il est traversĂ© par les plus belles riviĂšres du monde, les Indiens ne demandent qu'Ă  se convertir. Il suggĂšre l'envoi de 15 RĂ©collets, 300 familles de colons et 300 soldats. Il Ă©value le produit potentiel de la colonie Ă  plus de 5 millions de livres. Les autoritĂ©s sont convaincues et Champlain retrouve le monopole sur la traite des fourrures tandis que la poursuite de la colonisation est confirmĂ©e. En 1618, aprĂšs avoir soumis Ă  Louis XIII un plan d'Ă©vangĂ©lisation des Indiens, Champlain s'apprĂȘte Ă  regagner la Nouvelle-France lorsque de nouvelles difficultĂ©s surgissent. Les Anglais ont obtenu la libertĂ© du commerce et ses associĂ©s contestent son autoritĂ©. En 1619, le prince de CondĂ©, sorti de prison, cĂšde sa vice-royautĂ© au duc de Montmorency, amiral de France ; ce dernier confirme Champlain dans ses fonctions et le roi lui enjoint de maintenir la Nouvelle-France dans l'obĂ©issance. Champlain retourne en AmĂ©rique avec sa femme devenue majeure. Il renforce encore les dĂ©fenses de QuĂ©bec en construisant le Fort Saint-Louis, en haut du Cap Diamant. Un conflit oppose sa compagnie Ă  celle de traite des fourrures des frĂšres CaĂ«n ; la dispute est rĂ©glĂ©e par la fusion des deux compagnies sous la direction des CaĂ«n. Champlain influence le choix du chef d'une tribu indienne et parvient Ă  Ă©tablir une paix prĂ©caire avec les Iroquois. En 1624, il revient en France avec son Ă©pouse. EncouragĂ© Ă  continuer, il repart bientĂŽt, mais sans sa femme qui ne s'est jamais habituĂ©e Ă  vivre parmi les Sauvages. En 1627 Richelieu manifeste son intĂ©rĂȘt pour la colonie en crĂ©ant la Compagnie de la Nouvelle-France ou compagnie des Cent-associĂ©s, regroupement de marchands et d'aristocrates dont il est membre, ainsi que Champlain. Cette compagnie est chargĂ©e d'amener chaque annĂ©e 300 colons. Le systĂšme des compagnies Ă  charte bĂ©nĂ©ficiant du monopole de la traite des fourrures vient de voir le jour. Le rĂ©gime seigneurial est introduit en Nouvelle-France. Champlain devient le commandant du cardinal dans la colonie. Mais les affaires se gĂątent. En 1628, les Anglais pillent la ferme du Cap Tourmente. Champlain est sommĂ© par des marchands britanniques, les Kirke, de traiter avec eux. Devant son refus, ils bloquent QuĂ©bec. Les vivres manquent et Champlain, contraint de capituler, le 14 septembre 1629, est emmenĂ© captif Ă  Londres. Le TraitĂ© de Saint-Germain-en-Laye 1632 le libĂšre en 1633. RĂ©intĂ©grĂ© comme commandant Ă  QuĂ©bec, en l'absence de son supĂ©rieur, comme antĂ©rieurement, il regagne la colonie que les Anglais restituent avec regret. Les JĂ©suites succĂšdent aux RĂ©collets ; ils vont promouvoir la Nouvelle-France auprĂšs des Français riches et cultivĂ©s. En 1634, Champlain relĂšve les ruines, renforce les fortifications et charge Laviolette de fonder un nouveau poste Ă  Trois-RiviĂšres, Ă  la demande du chef Algonquin Capitanal. Il envisage de reprendre l'offensive contre les Iroquois qui ne se tiennent pas tranquilles. Mais, en octobre 1635, il est frappĂ© de paralysie et meurt le 25 dĂ©cembre suivant. Dans le courant de la mĂȘme annĂ©e, les JĂ©suites ont ouvert le collĂšge de QuĂ©bec. La colonie compte encore moins de 200 habitants, mais la Nouvelle-France est fondĂ©e. A la mort de Champlain, la Nouvelle-France existe mais elle est encore trĂšs faible. Il va falloir la maintenir en vie et la faire grandir dans un environnement hostile. En 1636, un nouveau gouverneur, Charles Jacques Huault de Montmagny 1583-1653, arrive dans la colonie. Il dĂ©fait les Iroquois et conclut avec eux la Paix de Trois-RiviĂšres 1645. Il contribue, avec les JĂ©suites, Ă  l'agrandissement de la Nouvelle-France vers le nord et l'ouest. Par dĂ©formation de son nom, les Indiens le nomment Onontio Grande Montagne, titre qui sera portĂ© dĂ©sormais par tous les gouverneurs français. Il est un des personnages de l'ouvrage de Cyrano de Bergerac L'Autre Monde » 1657. En 1639, Jean-Jacques Olier 1608-1657, fondateur des Sulpiciens qui participeront Ă  l'Ă©vangĂ©lisation de la Nouvelle-France, Paul Chomedey de Maisonneuve 1612-1676, Jeanne Mance 1606-1673 et AngĂ©lique Faure de Bullion 1593-1662 fondent la SociĂ©tĂ© Notre-Dame de MontrĂ©al Ă  qui la Compagnie des Cent-AssociĂ©s concĂšde l'Ăźle de MontrĂ©al. En 1641, la population de la colonie ne dĂ©passe encore pas 300 habitants ; c'est alors que commence une guerre franco-iroquoise qui durera 25 ans. La crĂ©ation de MontrĂ©al par Maisonneuve En 1642, Maisonneuve arrive dans l'Ăźle de MontrĂ©al. Il est accompagnĂ© de la missionnaire laĂŻque d'origine bourguignonne, Jeanne Mance, dont la vocation s'est forgĂ©e en soignant les victimes de la peste et de la Guerre de Trente ans. L'Ă©poque est favorable Ă  la colonisation, Anne d'Autriche, Ă©pouse catholique du roi Louis XIII, rĂ©gente de France Ă  partir de 1643, soutenue par les JĂ©suites, encourage le dĂ©veloppement de la Nouvelle-France ; pendant sa rĂ©gence, sous le gouvernement de Mazarin, 1250 français, originaires des provinces de l'ouest, viennent peupler la colonie. Maisonneuve fonde Ville-Marie, au confluent du Saint-Laurent et de la petite riviĂšre Saint-Pierre, sur un emplacement oĂč les Autochtones se rĂ©unissent depuis des siĂšcles. Il plante une croix au sommet du Mont Royal. Il entreprend la construction d'un fort. Jeanne Mance soigne les soldats et les bĂątisseurs. En 1643, les Iroquois tuent trois colons prĂšs de Ville-Marie ; en 1644, les chiens de Maisonneuve dĂ©busquent les Iroquois cachĂ©s dans les environs de la ville, mais ils sont trop nombreux pour ĂȘtre chassĂ©s. En 1645, Jeanne Mance ouvre un modeste hĂŽpital 6 lits pour les hommes et 2 pour les femmes, qui se dĂ©veloppera par la suite, avec l'appoint des SƓurs hospitaliĂšres, Ă  partir de 1659, et deviendra l'HĂŽtel Dieu de MontrĂ©al. Des religieux et des religieuses affluent pour Ă©vangĂ©liser les Sauvages, dont Anne Compain de Sainte-CĂ©cile, Anne Le Boutz de Notre-Dame, Madeleine de la Peltrie. Cette derniĂšre fournit aux JĂ©suites les fonds nĂ©cessaire Ă  la reconstruction de la petite Ă©glise de bois Ă©difiĂ©e Ă  la hĂąte en 1615 Ă  Tadoussac par le pĂšre rĂ©collet Dolbeau 1586-1652, qui a laissĂ© son nom Ă  une bourgade du QuĂ©bec. Louis XIV fait don Ă  cette premiĂšre Ă©glise en pierre construite au Canada, d'une cloche de bronze et d'une statue de l'enfant JĂ©sus habillĂ© d'une robe de soie brodĂ©e par sa mĂšre, Anne d'Autriche, que l'on peut encore voir aujourd'hui. Les guerres indiennes – Le massacre des religieux En 1646, le pĂšre jĂ©suite Isaac Jogue 1607-1646, qui a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© capturĂ© et torturĂ© par les Iroquois en 1642, est dĂ©capitĂ© par ces derniers qui le soupçonnent de sorcellerie ; son compagnon, Jean de la Lande 1620-1646, subit le mĂȘme sort. En 1649, c'est au tour des missionnaires jĂ©suites Jean de BrĂ©beuf 1593-1649 et Gabriel Lallemant 1610-1649 de pĂ©rir sous les coups des Iroquois. De 1642 Ă  1649, pas moins de huit religieux jĂ©suites sont victimes des Indiens, sur les bords du lac Huron aujourd'hui en Ontario ; canonisĂ©s par le pape Pie XI, en 1930, ils sont collectivement les saints patrons du Canada sous le nom de Martyrs canadiens. En 1651, les Iroquois attaquent l'hĂŽpital de Jeanne Mance oĂč Denis Archambeault 1630-1651 est tuĂ© par l'explosion de son canon, mais les dĂ©fenseurs repoussent les assaillants aprĂšs 12 heures de combat. En 1653, Maisonneuve revient de France avec une centaine de soldats, pour lutter contre les Iroquois. Il est accompagnĂ© d'une jeune champenoise, Marguerite Bourgeoys 1620-1700 ; cette derniĂšre, tenaillĂ©e par la vocation religieuse, gagne la Nouvelle-France, aprĂšs avoir rencontrĂ© Maisonneuve, lequel recrutait des gens en France pour dĂ©velopper la colonie. Pendant le voyage, elle a soignĂ© Ă  bord du navire les passagers victimes de la peste. DĂšs son arrivĂ©e au Nouveau Monde, elle s'apitoie sur les conditions de vie misĂ©rables de la population. En 1657, elle jette les fondations d'une premiĂšre chapelle destinĂ©e plus tard Ă  devenir Notre-Dame-de-Bon-Secours qui abrite aujourd'hui un musĂ©e dĂ©diĂ© Ă  sa fondatrice. La mĂȘme annĂ©e 1657, la guerre s'intensifie entre les Iroquois et la petite colonie française. Ville-Marie, qui compte encore moins de 400 habitants, est isolĂ©e. La traite des fourrures devient difficile. En 1658, Marguerite Bourgeoys ouvre nĂ©anmoins une premiĂšre Ă©cole, rue Saint Paul, Ă  l'emplacement d'une vieille Ă©table. La mĂȘme annĂ©e, Dollard des Ormeaux 1635-1660 dĂ©barque en Nouvelle-France. En 1659, aprĂšs avoir recrutĂ© des institutrices en France, Marguerite Bourgeoys fonde la CongrĂ©gation religieuse de Notre-Dame de MontrĂ©al. Un vicaire apostolique, François de Laval 1623-1708, arrive Ă  QuĂ©bec, ce prĂ©lat remarquable va fortement contribuer Ă  la propagation du catholicisme. Les Filles du Roy Louis XIV encourage le peuplement de la colonie en accordant des terres le long du fleuve aux soldats qui s'y Ă©tablissent. Malheureusement, ceux-ci prĂ©fĂšrent vivre Ă  la façon des Sauvages plutĂŽt que de dĂ©fricher la forĂȘt. En l'absence de femmes europĂ©ennes, ils s'accouplent avec des squaws. La population se mĂ©tisse et les anciens soldats du roi deviennent coureurs des bois. Pour les sĂ©dentariser, on imagine de leur envoyer des filles de France ; dĂšs 1660, on recrute des volontaires et un millier de petites françaises courageuses, souvent orphelines, dotĂ©es par le roi, viennent s'Ă©tablir dans les solitudes du Nouveau Monde ; on les appelle les Filles du Roy. Contrairement Ă  une lĂ©gende, elles ne sont pas toutes des filles de mauvaise vie, loin s'en faut. L'institution fondĂ©e par Marguerite Bourgeoys les accueille et surveille leurs frĂ©quentations ; elle Ă©duque les jeunes et leur apprend Ă  tenir un foyer et une ferme. Elle aide aussi les colons Ă  faire face aux Ă©poques de disette. Une hostellerie du Vieux MontrĂ©al, bĂątie Ă  l'intĂ©rieur des fortifications, en 1725, porte encore aujourd'hui leur nom. Dollard des Ormeaux est recrutĂ© par Maisonneuve qui lui confie le commandement du fort Ville-Marie. La menace d'une invasion iroquoise se prĂ©cise. Le commandant du fort Ville-Marie dĂ©cide de prendre les devants. AprĂšs une escarmouche oĂč les Français ont le dessus, Dollar des Ormeaux et sa petite troupe, d'une quinzaine d'EuropĂ©ens renforcĂ©s par une quarantaine de Hurons et quatre Algonquins, s'installent dans un ancien poste algonquin abandonnĂ© au lieu-dit Long-Sault. Ils y sont bientĂŽt assaillis par une nuĂ©e d'Iroquois. Une partie des Hurons fait dĂ©fection ; ils ne sont d'ailleurs pas d'une grande utilitĂ© car le rĂ©gime colonial français leur interdit la possession d'armes Ă  feu. Les Français et leurs alliĂ©s se dĂ©fendent avec vigueur causant d'Ă©normes pertes dans les rangs ennemis jusqu'au moment oĂč une grenade artisanale ou un baril de poudre explose au milieu des dĂ©fenseurs. Dollard est tuĂ©. DĂ©sormais, toute rĂ©sistance devient impossible. Les survivants sont massacrĂ©s sur place ; quelques-uns sont emmenĂ©s pour ĂȘtre torturĂ©s Ă  mort et mĂȘme mangĂ©s, selon certaines sources ; un seul parvient Ă  s'Ă©chapper. Mais les pertes iroquoises sont si Ă©levĂ©es qu'elles dissuadent provisoirement l'invasion projetĂ©e. Dollard des Ormeaux devient un hĂ©ros de la Nouvelle-France, mais un hĂ©ros aujourd'hui contestĂ© car on pense, qu'en se portant au devant des Iroquois, son principal dessein Ă©tait de leur tendre une embuscade pour s'emparer de leurs fourrures plutĂŽt que de sauver la colonie. En 1661, les Iroquois attaquent Ă  nouveau et tuent une centaine de Français. La Nouvelle-France colonie royale Le rĂ©gime des compagnies Ă  charte s'est rĂ©vĂ©lĂ© dĂ©cevant et peu propre Ă  dĂ©velopper la colonie dont le peuplement stagne. Aussi Louis XIV et Colbert dĂ©cident-ils, en 1663, de transformer la Nouvelle-France en colonie royale ; la Compagnie des Cent-AssociĂ©s est dissoute ; François de Laval fonde le SĂ©minaire de QuĂ©bec. En 1664, Louis XIV crĂ©e la Compagnie des Indes occidentales, dans un but commercial et d'Ă©vangĂ©lisation des AmĂ©rindiens ; elle ne durera pas plus de dix ans. En 1665, Maisonneuve disgraciĂ©, malgrĂ© les efforts qu'il a dĂ©ployĂ©s, est rappelĂ© en France, oĂč il mourra oubliĂ©. DĂ©sormais, La Nouvelle-France est administrĂ©e comme une province française. Le roi y dĂ©pĂȘche un intendant, Jean Talon 1626-1694 qui s'efforce de diversifier l'Ă©conomie locale, afin de rendre la colonie autosuffisante et surtout d'accroĂźtre sa population. En 1665, pour assurer la sĂ©curitĂ© des colons, Louis XIV envoie le rĂ©giment de Carignan-SaliĂšres. Les Iroquois sont repoussĂ©s chez eux. Lors du premier recensement effectuĂ©, en 1666, l'intendant dĂ©nombre 3215 d'autres disent 3418 habitants, dont 63% d'hommes. En 1672, Jeanne Mance pose une des pierres angulaires de la premiĂšre Ă©glise de Ville Marie. Elle dĂ©cĂšde un an plus tard, en odeur de saintetĂ©, aprĂšs avoir lĂ©guĂ© son cƓur aux MontrĂ©alais. Elle repose dans la crypte de l'HĂŽtel-Dieu dont elle fut la fondatrice. Le gouverneur Louis de Buade de Frontenac 1622-1698, natif de Saint-Germain-en-Laye, joue un rĂŽle trĂšs important dans l'Ă©volution de la Nouvelle-France. Il est nommĂ© une premiĂšre fois gouverneur en 1672. Le dĂ©part de l'intendant Jean Talon, en novembre de la mĂȘme annĂ©e, lui confĂšre pratiquement les pleins pouvoirs sur la colonie, jusqu'Ă  l'arrivĂ©e, en 1675, d'un nouvel intendant, Jacques Duchesneau de la DoussiniĂšre et d'Ambault mort en 1696 ; les relations entre le gouverneur et l'intendant, qui reproche au premier de fermer les yeux sur le trafic de fourrures illicite des coureurs des bois, manqueront de cordialitĂ©. Frontenac nomme La ValliĂšre commandant de l'Acadie, entretient des relations avec Boston, assure l'alliance avec les AbĂ©naquis et maintient la paix avec les Iroquois. Mais l'expansion de la colonie française prive ces derniers de territoires de chasse et gĂȘne leurs communications avec les Anglais. En 1674, le diocĂšse de QuĂ©bec voit le jour et François de Laval en devient l'Ă©vĂȘque. En 1682, les intrigues de l'intendant, pour obtenir la disgrĂące du gouverneur, entraĂźnent le rappel des deux hommes en France. En 1685, le nouvel intendant, Jacques Demeulle de la Source, instaure l'usage du papier-monnaie en rĂ©quisitionnant les cartes Ă  jouer qui serviront par intermittence de billets de banque monnaie de carte jusqu'en 1714 ; avant le 19Ăšme siĂšcle, la monnaie mĂ©tallique sera reprĂ©sentĂ©e indiffĂ©remment par les piĂšces françaises, anglaises, espagnoles, mexicaines et amĂ©ricaines. AprĂšs 1685, Ă  la suite de la RĂ©vocation de l'Edit de Nantes, quelques protestants, convertis de maniĂšre plus ou moins forcĂ©e, qui souffrent de l'hostilitĂ© de leur voisinage en France, cherchent la tranquillitĂ© en se rĂ©fugiant sur les bords du Saint-Laurent. Vers 1688, le gouverneur de MontrĂ©al, Louis-Hector de CalliĂšres 1648-1703, natif de Normandie, obtient une partie du terrain qui porte aujourd'hui le nom de Pointe-Ă -CaillĂšres, au bord du fleuve ; il y Ă©rige sa rĂ©sidence, Ă  l’endroit oĂč s'Ă©lĂšve maintenant le MusĂ©e archĂ©ologique de MontrĂ©al. Le massacre de Lachine – Les guerres intercoloniales En 1689, Frontenac est replacĂ© Ă  la tĂȘte de la colonie. En son absence, la situation s'est dĂ©gradĂ©e. Les Anglais, alliĂ©s aux Iroquois, se montrent de plus en plus agressifs. Le gouverneur fait rĂ©occuper le fort Frontenac, qu'il avait Ă©difiĂ© en 1673, sur la lac Ontario. Il fortifie QuĂ©bec et MontrĂ©al. Les Iroquois, armĂ©s par les Anglais, attaquent Lachine, massacrent des dizaines de colons et en emmĂšnent encore plus en captivitĂ© ; le nombre des victimes, tuĂ©s, blessĂ©s prisonniers n'est pas connu avec prĂ©cision, on parle de plusieurs centaines ; ce qui est sĂ»r, c'est que la fĂ©rocitĂ© de l'attaque terrorise les habitants ; des femmes enceintes ont Ă©tĂ© Ă©ventrĂ©es pour extraire le fruit de leurs entrailles et des prisonniers ont Ă©tĂ© rĂŽtis avant d'ĂȘtre dĂ©vorĂ©s. Cet acte barbare marque le dĂ©but ce que l'on a appelĂ© la PremiĂšre Guerre intercoloniale 1689-1697. En mesure de reprĂ©sailles, une expĂ©dition française est montĂ©e contre le village anglais de Corlaer Shenectady dont 60 habitants sont tuĂ©s et 25 autres emmenĂ©s comme prisonniers. La population de la Nouvelle-France s'Ă©lĂšve alors Ă  15000 personnes et celle de la Nouvelle-Angleterre Ă  200000. En 1690, les Anglais tentent de rĂ©duire la Nouvelle-France. L'amiral William Phips 1651-1695, un marin gouverneur du Massachusetts, prend le fort Pentagouet et Port-Royal en Acadie. Mais l'expĂ©dition contre MontrĂ©al Ă©choue sur les bords du lac Champlain. La flotte de Phips assiĂšge nĂ©anmoins QuĂ©bec. Un ultimatum est adressĂ© Ă  Frontenac qui le repousse avec Ă©nergie. Les Anglais tentent un dĂ©barquement Ă  Beauport et bombardent QuĂ©bec. Mais Frontenac, qui a reçu un renfort envoyĂ© de MontrĂ©al par M. de CalliĂšres, tient bon et, aprĂšs trois jours d'efforts infructueux, les assaillants renoncent. Les Anglais, Ă©chaudĂ©s, chargeront dorĂ©navant les Iroquois d'attaquer les Français Ă  leur place. En 1692, Madeleine de VerchĂšres 1678-1747, fille d'un seigneur de Nouvelle-France, dĂ©fend mousquet en mains, pendant quatre jours, jusqu'Ă  l'arrivĂ©e des renforts de MontrĂ©al, le fort de VerchĂšres contre les attaques iroquoises. Par cet exploit, l'adolescente s'Ă©lĂšve au rang d'une Jeanne Hachette ou d'une Jeanne d'Arc quĂ©bĂ©coise. En 1693, une nouvelle incursion a lieu contre MontrĂ©al. Par ailleurs, les Iroquois essaient de se rĂ©concilier avec les Outaouais ; une entente entre ces tribus porterait un grave prĂ©judice au commerce français et une forte pression est exercĂ©e sur Frontenac pour que les villages iroquois soient dĂ©truits. Le gouverneur n'agit cependant pas sans le feu vert du ministre de la Marine. En 1696, une troupe de plus de 2000 hommes, tant de forces rĂ©guliĂšres que de milices et d'alliĂ©s indiens quitte MontrĂ©al pour le territoire iroquois. Mais l'ennemi a fuit aprĂšs avoir incendiĂ© le village cible de l'attaque. On brĂ»le les rĂ©coltes et on dĂ©truit tous les vivres trouvĂ©s aux alentours. Frontenac poursuit l'expansion vers l'ouest, crĂ©ant de nouveaux postes et nouant des contacts avec les Indiens des Prairies. En 1697, la paix de Ryswick est signĂ©e entre la France et l'Angleterre et la Nouvelle-France peut souffler un peu. Mais Frontenac n'a plus qu'une annĂ©e Ă  vivre. La prĂ©dominance anglaise sur la Baie d'Hudson est acquise. La France obtient la Baie James et recouvre Port-Royal. En 1700, Marguerite Bourgeoys meurt en odeur de saintetĂ©, aprĂšs avoir offert sa vie pour sauver une jeune religieuse malade qui recouvre effectivement la santĂ© ; elle est canonisĂ©e en 1982 par Jean-Paul II. Enfin, trois ans aprĂšs la disparition de Frontenac, Louis-Hector de CalliĂšres, qui a succĂ©dĂ© Ă  Frontenac comme gouverneur, rĂ©ussit le tour de force de rĂ©concilier Iroquois et Algonquins, c'est la Grande Paix de MontrĂ©al 1701. Cette paix ne durera pas longtemps la Guerre de Succession d'Espagne 1701-1713 Ă©clate bientĂŽt en Europe ; ce nouveau conflit entraĂźne en AmĂ©rique la Seconde Guerre intercoloniale 1702-1713. La vie mouvementĂ©e d’un aventurier Pierre-Esprit Radisson La destinĂ©e mouvementĂ©e de Pierre-Esprit Radisson 1636-1710 fournit une illustration saisissante de ce qu'Ă©tait la vie dans les territoires français d'AmĂ©rique du Nord au temps de Louis XIV. ArrivĂ© en Nouvelle-France en 1652, alors qu'il n'Ă©tait ĂągĂ© que de 16 ans, Radisson tombe aux mains des Iroquois au cours d'un raid menĂ© par ces derniers. Il est adoptĂ© par ses ravisseurs et passe deux ans en leur compagnie, se familiarisant avec leurs coutumes et leur mode de vie. Il revient ensuite parmi les Français, est recrutĂ© par MĂ©dard Chouart des Groseilliers 1618-1696, qui a Ă©pousĂ© entre temps sa demi-sƓur, et devient coureur des bois dans la rĂ©gion des Grands Lacs. Les deux hommes ramĂšnent beaucoup de fourrures qui leur sont confisquĂ©es par le gouverneur de la Nouvelle-France, pour lors Pierre de Voyer d'Argenson 1625-1709, au prĂ©texte qu'ils n'ont pas de permis pour la traite des fourrures. Ils envisagent alors de lancer une entreprise commerciale en Baie d'Hudson mais, malgrĂ© un voyage en France de des Groseilliers, ils n'obtiennent pas l'appui escomptĂ© des autoritĂ©s françaises. Ils tentent alors leur chance auprĂšs des Britanniques Ă  Boston. Le colonel George Cartwright, les emmĂšne Ă  Londres oĂč il les prĂ©sente au roi Charles II Stuart qui crĂ©e la Compagnie de la Baie d'Hudson Ă  leur instigation. En 1668, ils partent pour la baie avec deux navires, l'Eaglet et le Nonsuch, affrĂ©tĂ©s par le prince Rupert, un esthĂšte fortunĂ© d'origine germanique, qui s'intĂ©resse Ă  l'AmĂ©rique du Nord, et qui deviendra le premier gouverneur de la Compagnie. Seul le Nonsuch, qui porte nos deux aventuriers, parvient Ă  destination ; l'autre navire, avariĂ© au cours d'une tempĂȘte, a regagnĂ© l'Angleterre. En 1674, de retour en Europe, insatisfaits du traitement que la Compagnie de la Baie d'Hudson leur a rĂ©servĂ©, les deux aventuriers rencontrent Ă  Londres un JĂ©suite d'origine auvergnate, prisonnier des Anglais, Ă  la suite d'une mission envoyĂ©e auprĂšs du gouverneur anglais Bayly par Frontenac. Ce religieux, le pĂšre Charles Albanel 1614-1696 - La bourgade quĂ©bĂ©coise d'Albanel porte son nom, a explorĂ© la Baie d'Hudson en 1671, dans le cadre d'une expĂ©dition montĂ©e par l'intendant Jean Talon ; il les engage Ă  revenir vers leur patrie d'origine. Ils y sont fraĂźchement accueillis par Frontenac. Radisson entre malgrĂ© tout dans la marine royale française. En 1681, il est pressenti par un marchand de Nouvelle-France, Charles Aubert de La Chesnaye 1632-1702, l'homme le plus fortunĂ© de Nouvelle-France, qui nĂ©gocie l'obtention d'une charte pour la traite des fourrures, suite Ă  la dissolution de la Compagnie des Indes occidentales, document qu'il obtient l'annĂ©e suivante. En 1682, Radisson participe au dĂ©but de reconquĂȘte de la Baie d'Hudson par la France. Radisson et des Groseilliers s'engagent dans une expĂ©dition qui doit fonder un Ă©tablissement Ă  l'embouchure de la riviĂšre Nelson pour le compte de la Compagnie du Nord de La Chesnaye. Ils font de nombreux prisonniers au nombre desquels John Bridgar, gouverneur de la colonie anglaise, et s'emparent d'un important lot de fourrures. De retour Ă  QuĂ©bec, ils n'obtiennent pas, selon eux, la juste rĂ©munĂ©ration de leurs efforts. Le nouveau gouverneur de la Nouvelle-France, Joseph-Antoine Le Febvre de La Barre, les envoie en France plaider leur cause. Radisson, frustrĂ© une fois de plus, change encore de camp et passe au service de la Compagnie de la Baie d'Hudson pour laquelle il se bat contre les Français. Puis, de 1685 Ă  1687, il dirige le commerce Ă  l'embouchure de Fleuve Nelson. Devenu citoyen anglais en 1687, Radisson rĂ©dige un rĂ©cit de ses aventures avant de mourir en Grande-Bretagne dans la pauvretĂ©. Une localitĂ© du nord du QuĂ©bec et une station de mĂ©tro de MontrĂ©al portent aujourd'hui son nom. L’expansion de la Nouvelle-France en direction du Mississipi Les gouvernorats de Frontenac sont marquĂ©s par la rĂ©ussite d'explorations particuliĂšrement marquantes. En 1673, Louis Jolliet 1645-1700, premier explorateur nĂ© dans la colonie, prĂšs de QuĂ©bec, se lance dans l'exploration du bassin du Mississipi, Ă  partir des Grands Lacs. On connaĂźt l'existence du fleuve, que les Indiens appellent La Grande RiviĂšre et que les Français ont baptisĂ© la RiviĂšre Colbert. Mais on pense alors qu'il dĂ©bouche dans le Pacifique Mer de Californie. L'expĂ©dition a Ă©tĂ© initiĂ©e par Jean Talon, qui souhaitait nouer une alliance avec les Indiens de cette rĂ©gion, mais Frontenac adhĂšre Ă  cette audacieuse entreprise. Au moment de s'y lancer, Jolliet s'associe le pĂšre jĂ©suite Jacques Marquette, originaire de Laon France, un auxiliaire prĂ©cieux car il connaĂźt le langage de plusieurs tribus indiennes. AprĂšs avoir atteint un affluent du Mississipi, les deux explorateurs descendent celui-ci jusqu'au grand fleuve et le suivent jusqu'Ă  l'embouchure de l'Ohio, Ă  1100 kilomĂštre de celle du Mississipi, et ils savent dĂ©sormais que ce dernier aboutit au Golfe du Mexique. A partir de lĂ , les choses commencent Ă  se gĂąter ; Marquette ne comprend plus le langage des Indiens dont il apprend tout de mĂȘme qu'ils sont en contact avec les Espagnols ; de plus, les interlocuteurs des explorateurs se montrent menaçants. Les deux hommes dĂ©cident de revenir. Jolliet a rĂ©digĂ© des notes de voyage ; malheureusement, il fait naufrage au Sault-Saint-Louis, en amont de MontrĂ©al, et perd ses papiers. N'ayant pas obtenu de Colbert l'autorisation de s'Ă©tablir au pays des Illinois, Jolliet s'installe Ă  Sept-Îles. En 1679, il est chargĂ© par Frontenac d'une mission Ă  la Baie d'Hudson. Le gouverneur anglais, Charles Baily, qui a entendu parler de ses exploits, le reçoit avec honneur. Il fonde des pĂȘcheries sur l'archipel Mingan, au nord du Saint-Laurent, passe l'Ă©tĂ© sur l'Ăźle d'Anticosti et l'hiver Ă  QuĂ©bec, s’occupant de ses terres et de son commerce. En 1690, William Phips s'empare de sa barque, confisque ses marchandises et fait prisonniĂšres sa femme et sa belle-mĂšre. Il passe les derniĂšres annĂ©es de sa vie Ă  explorer la cĂŽte du Labrador et Ă  la cartographier ; il enseigne au collĂšge des JĂ©suites de QuĂ©bec. Il meurt Ă  une date imprĂ©cise, premier habitant de Nouvelle-France Ă  avoir Ă©tĂ© connu internationalement de son vivant. En 1682, RenĂ© Robert Cavelier de la Salle 1643-1687, natif de Rouen, et Henri de Tonti 1649-1704, un soldat italien au service de la France, descendent Ă  leur tour le Mississippi jusqu’à son delta. Ils construisent le fort Prud'homme qui devient plus tard la ville de Memphis. L'expĂ©dition arrive Ă  l'embouchure du Mississippi en avril ; Cavelier de La Salle y fait dresser une croix et une colonne portant les armes du roi de France la souverainetĂ© française s'Ă©tend dĂ©sormais sur l'ensemble de la vallĂ©e du Mississippi, mais c’est une souverainetĂ© largement virtuelle. L'expĂ©dition repart par le mĂȘme chemin vers la Nouvelle-France et Cavelier de La Salle retourne Ă  Versailles. LĂ , il convainc le ministre de la Marine de lui accorder le commandement de la Louisiane. Il fait croire que celle-ci est proche de la Nouvelle-Espagne en dessinant une carte sur laquelle le Mississippi paraĂźt beaucoup plus Ă  l'ouest que son cours rĂ©el. Il met sur pied une nouvelle expĂ©dition, mais celle-ci tourne au dĂ©sastre Cavelier de La Salle ne parvient pas Ă  retrouver le delta du Mississippi et se fait assassiner en 1687. Il appartiendra Ă  Pierre Le Moyne d'Iberville 1661-1706, natif de Ville-Marie, de relever le flambeau. Ce dernier, fils de deux colons normands Ă©migrĂ©s, d'abord destinĂ© Ă  la prĂȘtrise mais manquant de vocation, est devenu militaire par inclination. EntrĂ© dans la marine royale, il a participĂ© en 1686, Ă  une expĂ©dition dans la Baie d'Hudson, sous les ordres du chevalier Pierre de Troyes 1645-1688, en remontant en canots la riviĂšre des Outaouais, depuis MontrĂ©al, puis en poursuivant le chemin en traĂźneaux Ă  chiens jusqu'Ă  la Baie James. L'expĂ©dition rĂ©ussit au-delĂ  des espĂ©rances ; elle s'empare du fort Monsoni, rebaptisĂ© fort Saint-Louis, puis du fort Rupert et mĂȘme d'un voilier, Le Craven. D'Iberville rentre Ă  QuĂ©bec par la mer, chargĂ© de fourrures et de marchandises anglaises. L'annĂ©e suivante, d'Iberville, nommĂ© capitaine de la frĂ©gate Le Soleil d'Afrique, retourne en Baie d'Hudson avec le dessein de fermer aux Anglais l'accĂšs Ă  la riviĂšre Nelson, en faisant tomber le fort York ; il arraisonne deux navires et capture 80 Anglais. En 1690, il assiĂšge le fort New Severn que la garnison fait sauter avant de s'enfuir. En 1694, il prend enfin le fort York. Frontenac donne ensuite l'ordre au marin français de patrouiller le long des cĂŽtes de l'Atlantique, depuis Terre-Neuve jusqu'Ă  la Nouvelle Angleterre. En 1696, d'Iberville dĂ©truit le fort William Henry Maine puis remonte vers Terre-Neuve oĂč il attaque les villages et pĂȘcheries anglaises de la cĂŽte est de l'Ăźle, pillant et brĂ»lant les maisons et ramenant de nombreux prisonniers. A la fin de l'expĂ©dition, en 1697, il ne reste plus aux Anglais que deux bourgades dans l'Ăźle ; trente six de leurs colonies ont Ă©tĂ© dĂ©truites ; et, pour couronner la campagne, d'Iberville se paie le luxe de triompher de trois navires de guerres ennemis il en coule un, s'empare du second et le troisiĂšme ne doit son salut qu'Ă  la fuite. Ce brillant capitaine est alors choisi par le ministre de la Marine pour diriger une expĂ©dition chargĂ©e de redĂ©couvrir et d'explorer l'embouchure du Mississipi, lĂ  oĂč Cavelier de la Salle a Ă©chouĂ© une dizaine d'annĂ©es plus tĂŽt. D'Iberville construit le fort Maurepas, en 1699, Ă  proximitĂ© de la ville actuelle d'Ocean Springs. En 1700 et 1701, il bĂątit les forts Mississipi et Saint-Louis. La Louisiane, appelĂ©e ainsi en l'honneur de Louis XIV, vient rĂ©ellement de naĂźtre. Avant de s'en Ă©loigner, d'Iberville noue des alliances avec les Autochtones, afin d'assurer la pĂ©rennitĂ© de cette nouvelle conquĂȘte française. En 1706, il met la main sur l'Ăźle anglaise de Nevis, dans les CaraĂŻbes. Il se rend de lĂ  Ă  La Havane, quĂ©rir des renforts espagnols pour attaquer la Caroline. Mais, atteint de la fiĂšvre jaune, il dĂ©cĂšde dans le port de la capitale cubaine, oĂč il est inhumĂ©. Progressivement, les Français ont imposĂ© leur prĂ©sence le long du Mississipi, construisant des forts et des postes de traite aux points stratĂ©giques, jetant ainsi les bases de la reconnaissance de l'ouest mystĂ©rieux et enfermant les Anglais dans leurs possessions de la cĂŽte atlantique. Mais cet immense territoire n'est pratiquement pas peuplĂ© et la position de la France reste prĂ©caire. En 1711, alors que la Guerre de succession d'Espagne bat son plein en Europe, l'amiral Hovenden Walker 1666-1728 monte une expĂ©dition contre QuĂ©bec avec des effectifs considĂ©rables 5300 soldats et 6000 marins. Mais des vents violents drossent une partie de la flotte sur une Ăźle ; l'expĂ©dition est un Ă©chec. En 1713, les TraitĂ©s d'Utrecht ramĂšnent la paix sur le continent europĂ©en et en AmĂ©rique la France cĂšde Ă  l'Angleterre l'Acadie, Terre-Neuve et la baie d'Hudson. En 1714, le gouverneur Philippe de Rigaud de Vaudreuil 1643-1725 dĂ©cide de protĂ©ger MontrĂ©al et QuĂ©bec par des enceintes fortifiĂ©es de pierre qui ne seront achevĂ©es que longtemps aprĂšs sa mort. La Nouvelle-France a Ă©tĂ© fondĂ©e par une poignĂ©e d’individus oĂč la proportion de militaires, de missionnaires, d’explorateurs et d’aventuriers Ă©tait sans doute disproportionnĂ©e par rapport Ă  celle des laboureurs. Ces individus se sont mĂȘlĂ©s aux Indiens et en ont adoptĂ© parfois les mƓurs pour devenir coureurs des bois. Ils n’ont pas Ă©tĂ© mĂ©nagĂ©s par leurs adversaires mais, bien qu’en situation de faiblesse numĂ©rique, ils ont rĂ©sistĂ© avec opiniĂątretĂ©. HabituĂ©s Ă  faire face, les Ă©checs et les calamitĂ©s ne les ont pas rebutĂ©s. Ils ont tracĂ© l’esquisse d’un vaste empire, mais se sont malheureusement montrĂ©s plus soucieux d’en repousser les limites que de le peupler. Ces origines vont peser lourd dans l’histoire de la colonie et dans celle du QuĂ©bec. Heurs et malheurs de l’Acadie Voyons maintenant rapidement ce qui s'est passĂ© du cĂŽtĂ© de l'Acadie. On l'a vu, celle-ci naĂźt en 1604 pour disparaĂźtre trois ans plus tard, Ă  la suite d'un diffĂ©rend commercial. En 1610, quelques colons sont de retour. Mais, en 1613, Samuel Argall ?-1626, de Virginie, s'empare du territoire et en chasse la population. En 1621, le gouvernement anglais baptise le territoire Nouvelle-Ecosse et y fait venir des colons Ă©cossais. En 1631, Charles de la Tour 1593-1666, lieutenant-gĂ©nĂ©ral de l'Acadie pour le roi de France, construit des forts au cap Sable et Ă  Saint-Jean. L'annĂ©e suivante, le TraitĂ© de Saint-Germain-en-Laye attribue le territoire Ă  la France. Environ 300 colons français remplacent les Ecossais. La mort du gouverneur Razilly 1587-1635, cousin du cardinal de Richelieu, entraĂźne une guerre civile entre les deux prĂ©tendants Ă  la succession de La Tour et Charles de Menou d'Aulnay 1604-1650, cousin de Razilly. Port-Royal est alors la capitale de la colonie française. D'Aulnay, qui voit l'avenir de l'Acadie dans l'agriculture, favorise la venue de nouveaux colons. AprĂšs sa mort, un nouveau conflit Ă©clate entre la France et l'Angleterre. En 1654, l’Acadie est conquise par les Anglais. Mais le TraitĂ© de BrĂ©da, en 1667, la restitue Ă  la France. A partir de 1670, Port-Royal essaime, donnant naissance Ă  deux villages Beaubassin et Grand-PrĂ©. En 1690, William Phips, conquiert une fois de plus le pays, qui retourne Ă  la France lors de la paix de Ryswick, sept ans aprĂšs. Par le TraitĂ© d'Utrecht, en 1713, l'Acadie est cĂ©dĂ©e dĂ©finitivement Ă  l'Angleterre et redevient la Nouvelle-Ecosse. Les Acadiens sont autorisĂ©s Ă  gagner des territoires français ; la plupart restent sur place. En 1720, les Français construisent la forteresse de Louisbourg, sur l'Ăźle Royale ou du Cap-Breton. Une importante immigration gonfle la population et, lors de la Guerre de succession d'Autriche 1740-1748, qui dĂ©clenche en AmĂ©rique la TroisiĂšme Guerre intercoloniale 1744-1748, les Français tentent en vain de reconquĂ©rir l'Acadie. C'est au contraire les Anglais qui prennent Louisbourg, en 1745. A la fin du conflit, le TraitĂ© d'Aix-la-Chapelle 1748 attribue l'Ăźle Saint-Jean ou Île-du-Prince-Édouard et l'Ăźle Royale Ă  la France, ce qui est perçu comme un affront par les Anglais. En 1749, ils rĂ©pliquent en crĂ©ant Halifax, avec l'apport de 2000 colons. La situation ne cesse de s'envenimer, Anglais et Français se disputant l'allĂ©geance des Acadiens et construisant des forts en prĂ©paration d'une nouvelle guerre. Le Grand DĂ©rangement En 1755, pour rĂ©gler dĂ©finitivement la question, le gouverneur de la Nouvelle Ecosse, Charles Lawrence 1709-1760, dĂ©cide la dĂ©portation massive des Acadiens. On tient d'abord la mesure secrĂšte, afin qu'ils ne s'enfuient pas avec leur bĂ©tail. L'opĂ©ration est ensuite conduite avec une grande brutalitĂ©. On les entasse dans des bateaux envoyĂ©s vers le sud Massachusetts, Connecticut, Maryland..., dans des Etats oĂč ils sont mal accueillis voire refoulĂ©s et conduits Ă  errer sans asile ou encore assignĂ©s Ă  rĂ©sidence comme des criminels, ou bien encore ils sont transfĂ©rĂ©s en Angleterre, oĂč on les traite en prisonniers de guerre. Ceux qui cherchent Ă  s'Ă©chapper sont fusillĂ©s. Beaucoup gagnent des territoires voisins sous juridiction française, au risque d'ĂȘtre chassĂ©s Ă  nouveau, par suite des alĂ©as de l'histoire. Plusieurs milliers reviennent en France, notamment dans le Poitou. D'autres se rendent en Louisiane ou aux Antilles ; d'autres encore atterrissent aux Malouines, puis en AmĂ©rique du Sud. Beaucoup se rĂ©fugient au Nouveau Brunswick. Ceux dont la prĂ©sence demeure tolĂ©rĂ©e en territoire britannique sont condamnĂ©s Ă  vivre en parias, Ă  l'Ă©cart, sur les terres les moins fertiles, en Ă©vitant tout regroupement jugĂ© trop important par les autoritĂ©s, sous peine de travaux forcĂ©s. D'aprĂšs des historiens amĂ©ricains, ce nettoyage ethnique, qualifiĂ© de Grand DĂ©rangement, entraĂźna la mort de 7500 Ă  9000 personnes sur les 12000 Ă  18000 habitants que comptait l'Acadie. Il traumatisa les autres habitants de la Nouvelle-France dont il marqua pour longtemps la conscience collective. La chute de Louisbourg, en 1758, sonne le glas dĂ©finitif de la colonisation française sur le territoire actuel des Provinces Maritimes. Revenons maintenant au bord du Saint-Laurent. Au dĂ©but du rĂšgne de Louis XV, l'expansion de la Nouvelle-France se poursuit. Mais on parle de plus en plus de Canada et de moins en moins de Nouvelle-France. L'Acadie est perdue depuis 1713, mais les possessions françaises sont encore immenses. Seulement, il devient de plus en plus Ă©vident qu'elles manquent d'assises solides du fait d'un peuplement insuffisant. Elles comptent encore moins de 20000 habitants alors qu'il y en a plus de 400000 en Nouvelle-Angleterre ! Les Français, bĂ©nĂ©ficiant d'un pays tempĂ©rĂ© et d'une agriculture prospĂšre, n'Ă©migrent pas volontiers, Ă  la diffĂ©rence d'autres peuples europĂ©ens moins bien lotis. A partir de 1730, 648 personnes condamnĂ©es pour dĂ©lits mineurs sont dĂ©portĂ©es en Nouvelle-France. Mais c’est insuffisant ; il est facile de prĂ©voir que la colonisation française pourra difficilement s'imposer face Ă  une colonisation anglaise beaucoup plus dense et que la question se rĂšglera certainement, en dehors du vƓu des populations locales, sur le théùtre des affrontements europĂ©ens. L’expansion de la Nouvelle-France vers l’ouest Les explorations de la premiĂšre pĂ©riode du rĂšgne sont l'Ɠuvre de Pierre Gaultier de Varennes de La VĂ©rendrye 1685-1749. Natif de Trois-RiviĂšres, cet homme entreprenant est le fils d'un officier du rĂ©giment de Carignan-SaliĂšres. ElĂšve du petit sĂ©minaire de QuĂ©bec, il commence sa vie de soldat Ă  12 ans, comme cadet Ă  l'acadĂ©mie navale. Au dĂ©but des annĂ©es 1700, il fait ses premiĂšres campagnes, notamment Ă  Terre-Neuve contre les Anglais. En 1706, il est nommĂ© enseigne en second. Il entre dans les troupes coloniales Ă  20 ans, puis sert en Europe pendant la Guerre de Succession d'Espagne ; blessĂ© et fait prisonnier Ă  Malplaquet, en 1709, il est promu au grade de lieutenant. De retour en Nouvelle-France, en 1712, il se livre Ă  l'agriculture et Ă  l'Ă©levage, sans abandonner ses fonctions militaires. En 1715, il obtient la permission d'ouvrir un comptoir pour traiter avec les Indiens et commence Ă  se dĂ©tourner des travaux agricoles, en s'associant Ă  un de ses frĂšres qui commande un poste dans la rĂ©gion du lac SupĂ©rieur. En 1729, fort des renseignements qu'il a obtenu des Indiens, il sollicite du gouverneur de la Nouvelle-France, Charles de Beauharnais de la Boische 1671-1749, une aide financiĂšre en vue de partir Ă  la dĂ©couverte de la mer de l'ouest, dont parlent les Indiens, le Pacifique. L'intendant, Gilles Hocquart 1694-1783, et le gouverneur appuient sa requĂȘte auprĂšs du roi. L'autorisation de monter une expĂ©dition lui est accordĂ©e, mais sans aide financiĂšre. Il doit donc s'endetter pour financer le projet, mais il compte rembourser sa dette en construisant des forts de traite de fourrures le long du chemin ; il obtient d'ailleurs le monopole de la traite des fourrures pour trois ans. En 1731, il est prĂȘt Ă  partir en compagnie de trois de ses fils et quelques autres personnes. L'expĂ©dition se dirige vers le lac SupĂ©rieur, puis le lac Ă  la Pluie. Le fort Saint-Pierre est construit. En 1732, un poste secondaire s'Ă©lĂšve sur la RiviĂšre-Rouge. En 1734, alors que La VĂ©rendrye revient Ă  MontrĂ©al dĂ©dommager ses crĂ©anciers, d'autres membres de l'expĂ©dition marchent vers le lac Winnipeg oĂč ils construisent le fort Maurepas. Malheureusement, alors que le chef de l'expĂ©dition revient vers l'ouest, un de ses fils ainsi qu'un JĂ©suite, le pĂšre Jean-Pierre Alneau de la Touche 1705-1736, et 19 compagnons sont tuĂ©s par des Sioux sur le sentier de la guerre au lac des Bois. Les survivants continuent d'avancer vers l'ouest. En 1738, ils Ă©rigent le fort La Reine sur la riviĂšre Assiniboine et le fort Rouge Ă  l'emplacement actuel de Winnipeg. Ils bifurquent ensuite vers le sud et pĂ©nĂštrent dans le territoire de l'actuel Dakota, au pays des Mandanes. Déçu de ne pas rencontrer de riviĂšre coulant en direction de la mer de l'ouest, contrairement aux dires des Indiens, La VĂ©rendrye revient Ă  MontrĂ©al tandis que ses fils poursuivent vers la riviĂšre Saskatchewan, les lacs Manitoba et Winnipeg. En 1741, de retour, il dĂ©cide la construction des forts Dauphin, sur le lac Manitoba, et Bourbon, au nord du lac Winnipeg. Ces deux forts seront Ă©tablis en 1742. En mĂȘme temps, deux de ses fils s'enfoncent vers l'ouest, remontent le Missouri, puis la riviĂšre Yellowstone et parviennent jusqu'aux Rocheuses, que leurs guides indiens refusent de franchir sous prĂ©texte qu'ils se trouveraient alors en territoire ennemi. Tout le monde rentre Ă  MontrĂ©al opportunĂ©ment car les autoritĂ©s françaises commencent Ă  s'interroger sur les motivations rĂ©elles de La VĂ©rendrye la dĂ©couverte de nouveaux territoires ou le commerce lucratif des fourrures ? Cinq ans plus tard, peu de temps avant sa mort, Pierre Gaultier obtient du roi la Croix de Saint-Louis, suprĂȘme rĂ©compense, une seigneurie hĂ©rĂ©ditaire et le grade de capitaine. Il a fait reculer les frontiĂšres de la Nouvelle-France jusqu'au Manitoba et, en transformant une partie des Grands Lacs en mers intĂ©rieures françaises, il a dĂ©tournĂ© vers le Saint-Laurent une bonne part du trafic des fourrures qui passait jusqu'alors par la Baie d'Hudson anglaise. Pendant ce temps, que s’est-il passĂ© dans la colonie ? En 1721, un violent incendie dĂ©truit une grande partie de MontrĂ©al. L'intendant Michel BĂ©gon de la PicardiĂšre 1669-1747, natif de Blois, petit cousin par alliance de Colbert, intendant de Nouvelle-France depuis 1710, ordonne que les maisons soient reconstruites en pierre. La pierre Ă©tant plus coĂ»teuse que le bois, cette ordonnance oblige les moins fortunĂ©s Ă  quitter la ville ; des faubourgs commencent Ă  se dĂ©velopper Ă  l'extĂ©rieur de l’enceinte. En 1730, François Poulin de Francheville, seigneur de Saint-Maurice 1692-1733, crĂ©e les Forges Saint-Maurice. Mais l'expĂ©rience tourne court ; le fondateur de l'entreprise disparaĂźt prĂ©maturĂ©ment et l'Etat devient propriĂ©taire de la Compagnie en 1743. En 1734, un nouvel incendie dĂ©truit l'HĂŽtel-Dieu de MontrĂ©al et une quarantaine de rĂ©sidences ; on accuse probablement Ă  tort une esclave noire, Marie-JosĂšphe, dite AngĂ©lique ; condamnĂ©e Ă  mort, elle est pendue en public puis brĂ»lĂ©e. La colonie vit essentiellement de la traite des fourrures qui reprĂ©sente 70% de ses exportations. Elle est toujours considĂ©rĂ©e en France comme un moyen d'Ă©couler les produits de la mĂ©tropole pour engranger de l'argent mercantilisme oblige. Cependant l'orage se prĂ©pare. Les colonies anglaises veulent en finir avec les possessions françaises. C'est d'ailleurs en partie parce qu'elles craignaient leur intervention dans le conflit qu'elles ont si impitoyablement dispersĂ© les Acadiens. Au milieu du siĂšcle, la colonie française compte 85000 habitants, la politique de peuplement a donc portĂ© ses fruits, essentiellement d'ailleurs en raison d'une forte natalitĂ©, mais c'est insuffisant car la Nouvelle-Angleterre compte prĂšs de 1,5 millions d'habitants. Le guet-apens de Washington En 1747, Rolland-Michel Barrin 1693-1756, comte de La GalissoniĂšre, gouverneur intĂ©rimaire de la Nouvelle-France, milite ardemment pour la crĂ©ation d'une chaĂźne de postes reliant le Canada Ă  la Louisiane, en suivant la vallĂ©e de l'Ohio, qui devient ainsi un lieu de friction privilĂ©giĂ© entre Français et Anglais. En mĂȘme temps, il s'efforce de maintenir sur leur territoire les AbĂ©nakis alliĂ©s de la France, de maniĂšre Ă  assurer une zone tampon entre le Canada et l'Acadie. En 1754, George Washington 1732-1799, depuis peu promu lieutenant-colonel, recrute une petite armĂ©e et se dirige sur l'Ohio. Il surprend un parti français commandĂ© par Joseph Coulon de Villiers, sieur de Jumonville 1718-1754, un officier militaire canadien français nĂ© Ă  VerchĂšres, simplement en reconnaissance. Les circonstances de l'engagement restent obscures ; on dit que les blessĂ©s et les prisonniers furent froidement achevĂ©s. Cet assassinat pĂšsera sur la mĂ©moire du chef de l'indĂ©pendance amĂ©ricaine ; il explique en partie la froideur avec laquelle les Canadiens français accueilleront la rĂ©volution amĂ©ricaine. Le meurtre de Jumonville constitue le premier acte de la Guerre de Sept Ans, que l'on appelle Guerre de la ConquĂȘte, en AmĂ©rique. De la guerre de conquĂȘte Ă  la chute de la Nouvelle-France En 1756, Louis Joseph de Montcalm-Gozon, marquis de Montcalm 1712-1759, natif de NĂźmes, arrive au Canada, ex-Nouvelle-France, avec trois mille hommes, pour commander les troupes françaises. Il accepte mal d'ĂȘtre subordonnĂ© au marquis Pierre de Rigaud de Vaudreuil de Cavagnal 1698-1778, natif de QuĂ©bec, fils d'un prĂ©cĂ©dent gouverneur, gouverneur Ă  son tour. Les premiĂšres campagnes de Montcalm contre les Britanniques sont couronnĂ©es de succĂšs. Il accroĂźt les dĂ©fenses du fort Ă©difiĂ© sur le lac Champlain. Il capture et dĂ©truit le fort Oswego, sur le lac Ontario. Il triomphe au fort William Henry en 1757. Il remporte encore une victoire inespĂ©rĂ©e au fort Carillon, en 1758. On le rĂ©compense en le nommant lieutenant gĂ©nĂ©ral. QuĂ©bec, assiĂ©gĂ©e par l'Anglais Wolfe, rĂ©siste pendant prĂšs de trois mois, en 1759. Mais, le 13 septembre, sur les Plaines d'Abraham, Montcalm est mortellement blessĂ© alors que son armĂ©e dĂ©faite bat en retraite il mourra avant que les Anglais ne s'emparent du pays qu'il avait pour mission de dĂ©fendre. Son adversaire, le gĂ©nĂ©ral anglais, lui aussi touchĂ© mortellement, l'accompagne dans l'autre monde. QuĂ©bec tombe. Les rescapĂ©s se rĂ©fugient Ă  MontrĂ©al. En 1760, sous les ordres de LĂ©vis, les Français lancent une contre-offensive. Ils remportent la victoire de Sainte-Foy. Les Anglais se retranchent derriĂšre les remparts de QuĂ©bec ; ils rĂ©sistent jusqu'Ă  l'arrivĂ©e de leur flotte qui contraint LĂ©vis Ă  lever le siĂšge. Au cours des combats, Jean Vauquelin 1728-1772, un officier de marine nĂ© Ă  Dieppe, se couvre de gloire avec sa frĂ©gate l'Atalante, Ă©chouĂ©e Ă  la Pointe-aux-Trembles ; il rĂ©siste jusqu'au bout Ă  la flotte anglaise et son bateau n'est plus qu'une Ă©pave lorsqu'il est fait prisonnier, aprĂšs avoir rĂ©ussi Ă  faire dĂ©barquer la plupart de ses hommes ; les Anglais, fortement impressionnĂ©s, le laissent rentrer en France. Trois colonnes de troupes anglaises convergent vers MontrĂ©al, dernier bastion de la rĂ©sistance française, l'une en provenance de QuĂ©bec, l'autre depuis le lac Champlain et la troisiĂšme par le cours supĂ©rieur du Saint-Laurent. Toute rĂ©sistance est vouĂ©e Ă  l'Ă©chec. En effet, la flottille chargĂ©e de vivres et de renforts venant de France, sous les ordres de François Chenard de La Giraudais 1727-1776, aprĂšs avoir essuyĂ© bien des Ă©preuves au cours de la traversĂ©e, a Ă©tĂ© contrainte de se rĂ©fugier dans la Baie des Chaleurs, puis dans la riviĂšre Ristigouche oĂč, aprĂšs plusieurs jours de furieux combats contre la marine anglaise, elle s'est sabordĂ©e, le 8 juillet. Le 1er septembre, le fort Chambly, construit en bois en 1665, contre les Iroquois, et rebĂąti en pierre en 1709, contre les Anglais, tombe aux mains de ces derniers. Vaudreuil, dernier gouverneur du Canada français, capitule le 8 septembre 1760, tandis que LĂ©vis brĂ»le ses drapeaux. Les AmĂ©rindiens alliĂ©s des Français ont capitulĂ© quelques jours plus tĂŽt au fort La PrĂ©sentation. Douze jours plus tard, la reddition de Trois-RiviĂšres met un point final Ă  la grandiose aventure coloniale française en AmĂ©rique. Vaudreuil sera d'abord traduit en justice, puis acquittĂ©. Qui est donc responsable de la perte des possessions françaises ? Certains auteurs dĂ©signent Montcalm qui n'aurait pas su les dĂ©fendre efficacement. D'autres incriminent la mauvaise conduite des derniers intendants, comme François Bigot 1703-1778, natif de Bordeaux, qui trafiquait des fourrures et des armes entreposĂ©es dans l'immeuble joliment baptisĂ© La Friponne , pour s'enrichir au dĂ©triment du fisc, et qui fut embastillĂ© aprĂšs son rappel en France ! Mais c'est plus vraisemblablement le dĂ©sĂ©quilibre dĂ©mographique dĂ©jĂ  signalĂ©, le dĂ©sintĂ©rĂȘt de l'opinion publique française pour ces arpents de neige » et surtout la dĂ©faite de nos armes en Europe qui expliquent le dĂ©sastre. Le TraitĂ© de Paris, qui met fin Ă  la Guerre de Sept Ans, en 1763, attribue la Nouvelle-France Ă  l'Angleterre ; seules les Ăźles Saint-Pierre et Miquelon restent françaises ; la Louisiane, opportunĂ©ment espagnole depuis 1762, Ă©chappe aux convoitises anglaises ; elle redeviendra française en 1800, mais NapolĂ©on la vendra aux États-Unis en 1803, conscient de son incapacitĂ© Ă  la dĂ©fendre ; l'aventure amĂ©ricaine de la France aura alors pris fin. AprĂšs la chute de la Nouvelle-France, plus de 2000 colons français retournent dans leur patrie d'origine ceux qui ont les moyens de payer leur passage. Les autres demeurent au pays espĂ©rant que la mĂšre patrie reviendra un jour Ă  la faveur d'une victoire en Europe sur l'Anglais redoutĂ© et honni. Ils sont 60 Ă  65000 et ils constituent la source principale des quelques 7,8 millions de QuĂ©bĂ©cois francophones d'aujourd'hui et de tous ceux, presque aussi nombreux, que les vicissitudes de l'histoire ont poussĂ© Ă  Ă©migrer dans les autres provinces du Canada oĂč aux Etats-Unis. La tentative d’assimilation En attendant mieux, ils se serrent autour de leurs Ă©glises et commencent Ă  mettre en Ɠuvre la politique qualifiĂ©e de revanche des berceaux en multipliant les naissances pour noyer les Anglais dans un ocĂ©an d'adversaires. La population va doubler Ă  chaque gĂ©nĂ©ration. Monseigneur Jean-Olivier Briand 1715-1794, Ă©vĂȘque de QuĂ©bec, ordonne Ă  ses ouailles de reconnaĂźtre le roi d’Angleterre comme leur souverain mais le clergĂ©, en mĂȘme temps, encourage la natalitĂ©. L'application des lois britanniques ne se fait pas attendre. DĂšs 1763, Marie-Josephte Corriveau 1733-1763, condamnĂ©e Ă  mort pour avoir assassinĂ© son mari qui la maltraitait, est pendue et sa dĂ©pouille exposĂ©e aux regards de la population dans une cage de fer ; un tel supplice, incompatible avec les mƓurs françaises, frappe les Canadiens la Corriveau se mĂ©tamorphose en personnage du folklore quĂ©bĂ©cois ! L'Angleterre octroie une constitution, sous forme d'une Proclamation royale, au territoire conquis devenu The province of Quebec » ; ce texte prĂ©voit l'assimilation Ă  plus ou moins long terme des colons français ; la loi anglaise s'applique Ă  tous, aussi bien au civil qu'au pĂ©nal ; la langue officielle est l'anglais, la religion le protestantisme. Les catholiques ont le droit de conserver leur religion, mais ils doivent la renier, par le serment du test, s'ils se portent candidats Ă  un poste dans l'Administration ; par cette mesure, les catholiques sont exclus des emplois officiels ; le gouverneur, James Murray 1721-1794, en est rĂ©duit Ă  confier ces emplois Ă  des personnes incompĂ©tentes ! La capitulation de MontrĂ©al prĂ©voit d'Ă©tendre aux tribus amĂ©rindiennes alliĂ©es des Français les avantages concĂ©dĂ©s Ă  ces derniers. Ces tribus ne s'en rĂ©voltent pas moins contre l'occupant britannique, sous la direction du chef outaouais Pontiac, essentiellement pour la conservation de leurs terres ; le clergĂ© francophone invite ses fidĂšles Ă  aider l'occupant britannique Ă  rĂ©duire la rĂ©volte indienne qui est Ă©crasĂ©e. En 1764, commence la publication d'un journal bilingue La Gazette de QuĂ©bec ; une pĂ©tition circule dĂ©jĂ  dans les milieux francophones pour dĂ©noncer le rĂ©gime britannique tandis que les Anglophones rĂ©clament la crĂ©ation d'une assemblĂ©e pour les reprĂ©senter. En 1768, Guy Carlton, baron Dorchester 1724-1808, succĂšde Ă  James Murray, comme gouverneur ; il se montre favorable Ă  une rĂ©forme revenant aux lois et coutumes françaises et hostile Ă  la crĂ©ation d'une assemblĂ©e. La Guerre d’indĂ©pendance des Etats-Unis En 1775 commence la Guerre d'indĂ©pendance des Etats-Unis. Ce soulĂšvement d'anciens vĂ©tĂ©rans des guerres contre la Nouvelle-France ne suscite que trĂšs peu de sentiments favorables parmi la population canadienne qui n'a oubliĂ© ni la dĂ©portation des Acadiens ni l'assassinat de Jumonville ; la devise du QuĂ©bec ne sera-t-elle pas plus tard Je me souviens ». Aussi, lorsque les AmĂ©ricains tentent de rallier Ă  leur cause les habitants de la province, ils sont loin d'ĂȘtre accueillis Ă  bras ouverts. Ils trouvent nĂ©anmoins quelques partisans, assez pour former deux rĂ©giments 747 miliciens qui se distingueront Ă  Saratoga 1777 et Ă  Yorktown 1781. Parmi ces partisans, on peut citer un commerçant prospĂšre de MontrĂ©al, qui fut aussi juge de paix, Pierre Calvet, propriĂ©taire de la maison qui abrite aujourd'hui l'Hostellerie des Filles du Roy. Pour dissuader toute vellĂ©itĂ© de soutien aux Insurgents amĂ©ricains, Monseigneur Jean-Olivier Briand rappelle aux catholiques leur serment d'allĂ©geance au roi d'Angleterre, le trahir serait pĂȘcher ! DirigĂ©s par Richard Montgomery 1738-1775 et Benedict Arnold 1741-1801, les AmĂ©ricains, guidĂ©s par leurs partisans, envahissent la province du QuĂ©bec et occupent la rĂ©gion de MontrĂ©al, oĂč le chĂąteau de Ramezay, aujourd'hui converti en musĂ©e, leur sert de quartier gĂ©nĂ©ral. Mais, en 1776, ils Ă©chouent dans leur tentative de prendre QuĂ©bec oĂč Montgomery est tuĂ©. Benjamin Franklin 1706-1790 honore son ami Pierre Calvet d'une visite ; il est Ă  MontrĂ©al pour sonder les intentions des Canadiens ; il en repart avec le sentiment qu'il serait plus facile d'acheter la province que de la conquĂ©rir. Les renforts britanniques, composĂ© de mercenaires allemands, arrivent en grand nombre et chassent bientĂŽt les Insurgents. La reconnaissance de la spĂ©cificitĂ© quĂ©bĂ©coise Cependant, la Guerre d'indĂ©pendance amĂ©ricaine, va marquer profondĂ©ment l'avenir du QuĂ©bec. D'abord, dĂšs 1774, conscients du danger que reprĂ©senterait pour l'Empire Britannique un soulĂšvement conjoint des Insurgents amĂ©ricains et des Canadiens, les Anglais ont rĂ©voquĂ© la Proclamation royale Ă©mise une dizaine d'annĂ©es plus tĂŽt. Par l'Acte de QuĂ©bec, le territoire de la province est dĂ©limitĂ© d'une maniĂšre extensive de la GaspĂ©sie jusqu'aux Grands Lacs ; une entitĂ© recouvrant grosso-modo le QuĂ©bec et l'Ontario voit ainsi le jour ; par ailleurs, l'abolition du serment du test rĂ©habilite le catholicisme tandis que la langue, le droit français et le rĂ©gime seigneurial d'antan sont restaurĂ©s ; la spĂ©cificitĂ© des Canadiens français est ainsi reconnue. Les Anglophones protestent contre ces dispositions favorables aux Francophones. Une autre consĂ©quence de la rĂ©volution amĂ©ricaine influencera encore plus durablement l'avenir du Canada ; les AmĂ©ricains ne rejettent en effet pas unanimement la soumission Ă  l'Angleterre ; celle-ci conserve ses partisans. Ces derniers se trouvent Ă©videmment en butte Ă  l’hostilitĂ© des Insurgents ; ils se rĂ©fugient dans les territoires restĂ©s sous contrĂŽle britannique, les provinces maritimes, oĂč ils contribuent Ă  chasser les derniers Acadiens, et aussi la province du QuĂ©bec oĂč les Francophones, qui sont maintenant 90000, voient dĂ©ferler, sur le territoire qu'on vient de leur reconnaĂźtre, quelques 50000 Loyalistes brandissant l'Union-Jack. Ces AmĂ©ricains, demeurĂ©s fidĂšles au roi d'Angleterre, vont peupler ce qui deviendra l'Ontario, mais un grand nombre d'entre eux s'Ă©tablissent aussi sur le territoire du QuĂ©bec actuel, en particulier en Estrie, oĂč ils fonderont la ville de Sherbrooke, et oĂč existe encore, Ă  Lennoxville, la seule universitĂ© anglicane d'AmĂ©rique du Nord. On les installe sur des terres confisquĂ©es aux Canadiens français et aux Indiens. En 1778, la France prend officiellement partie pour les Insurgents amĂ©ricains, en envoyant un corps expĂ©ditionnaire de 6000 hommes, aux ordres de Rochambeau 1725-1807, rejoindre Lafayette 1757-1834 et quelques autres membres de la noblesse française qui se battent dĂ©jĂ  par idĂ©al auprĂšs des partisans de l’indĂ©pendance amĂ©ricaine. Les Canadiens reprennent espoir ; peut-ĂȘtre le retour de la vieille mĂšre-patrie est-il proche. L'amiral d'origine auvergnate Charles-Henri d'Estaing 1729-1794 encourage cet espoir en diffusant un manifeste, affichĂ© Ă  la porte des Ă©glises, dans lequel il invite les Français d'AmĂ©rique Ă  s'allier aux Etats-Unis, Ă  la grande colĂšre du gouverneur Frederick Haldimand 1718-1791, d'origine suisse et francophone. Malheureusement, malgrĂ© la victoire franco-amĂ©ricaine, si le TraitĂ© de Versailles, en 1783, reconnaĂźt bien l'indĂ©pendance des Etats-Unis, il oublie purement et simplement les Français d'AmĂ©rique qui, compte tenu de l'arrivĂ©e des Loyalistes, porteront dĂ©sormais le nom de Canadiens français. DĂ©cidĂ©ment, les arpents de neige » n'intĂ©ressent personne en Europe. La dĂ©sillusion est immense et sera durable. La RĂ©volution française et l’Empire MalgrĂ© leur rancune Ă  l'encontre de la mĂšre-patrie, les Canadiens français accueillent la RĂ©volution Française avec enthousiasme. DĂšs 1789, on parle de l'Ă©vĂ©nement le plus important du monde depuis l'avĂšnement du christianisme. Mais, aprĂšs la chute de la monarchie, l'opinion bascule et devient majoritairement hostile, en grande partie sous l'influence du clergĂ©. Les autoritĂ©s ecclĂ©siastiques insistent sur fait que, le roi de France n'existant plus, c'est au roi d'Angleterre que l'on doit maintenant fidĂ©litĂ©. De son cĂŽtĂ©, la propagande britannique dissocie habilement la France des hommes qui la dirigent et insiste sur la nĂ©cessitĂ© de combattre ces infernaux suppĂŽts de l'AntĂ©christ. La sĂ©paration du Haut-Canada Ontario et du Bas-Canada QuĂ©bec ParallĂšlement, l'Angleterre revoit sa copie coloniale. Pour permettre aux Loyalistes de jouir des droits qui Ă©taient les leurs avant la rĂ©volution amĂ©ricaine, comme ils le rĂ©clament, et aussi pour Ă©viter de les noyer dans la masse des Francophones, Pitt, dĂšs 1791, sĂ©pare le Canada en deux parties distinctes le Haut-Canada, majoritairement anglophone, et encore peu peuplĂ©, et le Bas-Canada, majoritairement francophone, oĂč l'on compte dĂ©jĂ  environ 160000 descendants des anciens colons français. L'Ontario et le QuĂ©bec voient le jour, mĂȘme si l'on parle encore seulement de Canada. L'Acte constitutionnel de 1791 dote le Bas-Canada d'une AssemblĂ©e consultative, Ă©lue au suffrage censitaire, et accorde mĂȘme le droit de vote aux femmes elles le perdront en 1834 pour ne le retrouver qu'en 1940. Un Francophone, Jean Antoine Panet 1751-1815 est le premier prĂ©sident Ă©lu de cette assemblĂ©e. Tout le monde n'est cependant pas dupe et les esprits Ă©clairĂ©s comprennent que l'Angleterre instrumentalise la crise politique en France pour renforcer sa domination sur le Canada. En 1794, les Francophones rejettent le projet de crĂ©ation d'une milice et, en 1796, ils refusent l'entretien de la voierie devant leur porte, qu'une nouvelle loi leur impose ; l'adoption d'une loi sur les ponts et les chemins cause mĂȘme une Ă©meute. MalgrĂ© l'apparente dĂ©saffection de l'opinion canadienne française pour la RĂ©volution, l’occupant britannique redoute toujours que les idĂ©es subversives ne se propagent dans la population francophone. En 1793, un mĂ©moire dĂ©fendant la reconquĂȘte du Canada n'a-t-il pas Ă©tĂ© soutenu devant la Convention nationale de Paris ? En 1794, une Association pour le maintien des lois, de la constitution et du gouvernement du Bas-Canada est formĂ©e pour dĂ©pister les foyers rĂ©volutionnaires. L'arrivĂ©e d'Ă©migrĂ©s, dont 51 prĂȘtres rĂ©fractaires, renforce le climat contre-rĂ©volutionnaire. Pour Ă©viter toute contamination de l'extĂ©rieur, les frontiĂšres sont sĂ©vĂšrement contrĂŽlĂ©es et des mesures d'exception sont prises contre les Ă©trangers que l'on filtre soigneusement. Un AmĂ©ricain, soupçonnĂ© de complot, David MacLane est pendu Ă  titre d'exemple. Cette situation durera jusqu'Ă  la fin du Premier Empire que sert un gĂ©nĂ©ral de brigade originaire de QuĂ©bec François Joseph d’Estienne de Chaussegros de Lery 1754-1824. La tranquillitĂ© sociale est d'abord favorisĂ©e par la relative prospĂ©ritĂ© dont jouit le Canada Ă  cette Ă©poque. La culture des cĂ©rĂ©ales se dĂ©veloppe stimulĂ©e par le prix Ă©levĂ© du blĂ© Ă  l'exportation. Mais, en 1801, de mauvaises rĂ©coltes conjuguĂ©es Ă  l'effondrement du commerce des fourrures, qui cesse d'ĂȘtre l'activitĂ© Ă©conomique dominante, causent des difficultĂ©s pendant les annĂ©es suivantes. L'Institution royale d'Ă©coles gratuites vise Ă  angliciser l'ensemble de la population. Un problĂšme fiscal contribue, en 1805, Ă  dresser les deux communautĂ©s fondatrices du Canada l'une contre l'autre ; pour financer la construction de prisons, va-t-on instituer une taxe sur les importations ou sur la propriĂ©tĂ© fonciĂšre ? Dans le premier cas, ce sont les Anglophones qui vont payer, dans le second, ce sont les Francophones. C'est la premiĂšre solution qui est retenue, au grand dam des Anglophones, dont la presse se dĂ©chaĂźne. Toujours en 1805, des banques canadiennes commencent Ă  imprimer leurs premiers billets ; l'Ă©vĂȘque anglican Jacob Mountain 1749-1825 estime devoir ĂȘtre le seul Ă  porter ce titre, ce qui est jeter un Ă©norme pavĂ© dans le jardin du catholicisme. Un journal anglophone The Quebec Mercury tourne les Francophones en ridicule. Une pĂ©tition est adressĂ©e Ă  NapolĂ©on pour l'appeler au secours du Canada, mais elle ne recueille que 12 signatures ; a contrario, une souscription est lancĂ©e pour l'Ă©rection Ă  MontrĂ©al d'un monument Ă  Horatio Nelson 1758-1805 qui vient d'ĂȘtre tuĂ© en remportant la victoire de Trafalgar. En 1806, La crĂ©ation du journal Le Canadien, organe du Parti canadien, de tendance libĂ©rale, fondĂ© au dĂ©but du siĂšcle, n'est sans doute pas Ă©trangĂšre Ă  la polĂ©mique dĂ©clenchĂ©e par le financement des prisons ; on notera le titre de ce premier organe de presse francophone, il est significatif on ne parle pas encore du QuĂ©bec. Un nouveau conflit religieux s'Ă©lĂšve entre les Francophones et la couronne britannique. Le nombre de prĂȘtres est notoirement insuffisant et le dĂ©ficit ne fait que s'accroĂźtre. L'Ă©vĂȘque catholique de QuĂ©bec, Joseph-Octave Plessis 1763-1825, en poste Ă  partir de 1806, bataille ferme contre le gouverneur et l'Ă©vĂȘque anglican pour garder son titre et pour obtenir une division des diocĂšses, de maniĂšre Ă  suivre l'Ă©volution de la dĂ©mographie ; mais il se heurte aux rĂ©ticences de Londres. Le RĂšgne de la Terreur En 1807, James Henry Craig 1748-1812 devient gouverneur de l'AmĂ©rique du Nord britannique ; assistĂ© d'un secrĂ©taire fanatique, il inaugure l'Ăšre qualifiĂ©e de RĂšgne de la Terreur pendant laquelle les traitres » sont maintenus en prison sans jugement. PersuadĂ© que le Bas-Canada est un foyer de sĂ©dition, il s'efforce de contrĂŽler la composition de son AssemblĂ©e et Ă©carte les Francophones des emplois publics. Il multiplie les dissolutions de l'AssemblĂ©e et emprisonne mĂȘme un candidat, François Blanchet 1776-1830, pendant les Ă©lections. En 1809, la couronne britannique dĂ©tache le Labrador du QuĂ©bec ; c'est un nouveau sujet de contestation. Une mesure Ă  caractĂšre antisĂ©mite expulse un commerçant juif, Ezekiel Hart 1770-1843, de l'AssemblĂ©e qui est dissoute. En 1810, l'AssemblĂ©e rĂ©clame le contrĂŽle de la liste civile, elle est Ă  nouveau renvoyĂ©e devant les Ă©lecteurs ; le journal Le Canadien est interdit et ses rĂ©dacteurs BĂ©dard, Blanchet, Taschereau sont arrĂȘtĂ©s pour sĂ©dition. Mgr Plessis engage ses fidĂšles Ă  demeurer loyaux au roi d'Angleterre et il condamne la doctrine du Parti canadien ; en rĂ©compense de son engagement politique, l'Ă©vĂȘque de QuĂ©bec reçoit un traitement de mille livres du gouvernement britannique. Les Ă©lections Ă  l'AssemblĂ©e dĂ©savouent le gouverneur et le haut clergĂ©. Craig recommande au roi l'union du Haut et du Bas-Canada. De 1812 Ă  1814, une nouvelle guerre oppose l'Angleterre aux Etats-Unis. Ces derniers essaient, une fois de plus, de conquĂ©rir le Canada. Mais ils rencontrent encore moins de succĂšs qu'en 1775-1776 auprĂšs de la population francophone. Le 26 octobre 1813, leurs troupes avancent le long de la riviĂšre ChĂąteauguay dans l'intention de s'emparer de MontrĂ©al. Charles-Michel de Salaberry 1778-1829, Ă  la tĂȘte de ses voltigeurs Canadiens français les attend Ă  la hauteur d'Allan's Corners. Les envahisseurs reçoivent une rĂ©ception si chaude qu'ils ne tenteront plus jamais d'envahir le Canada. L'Ă©conomie du Bas-Canada poursuit son Ă©volution le commerce des fourrures ne reprĂ©sente plus que 9%, le Haut-Canada Ă©tant plus favorable Ă  sa culture, le blĂ© rĂ©gresse au profit de l'avoine et du fourrage, la culture de la pomme de terre se dĂ©veloppe, tandis que se maintiennent celles des pois et des fĂšves les fĂšves au lard sont un plat traditionnel, du chanvre, du lin et du maĂŻs. En 1816, le Bas-Canada subit sa pire rĂ©colte depuis le dĂ©but du siĂšcle. En 1817, la Banque de MontrĂ©al voit le jour et, l'annĂ©e suivante, c'est au tour de la Banque de QuĂ©bec. En 1815, Le gouverneur George Prevost 1767-1816, en poste depuis 1811, est rappelĂ© Ă  Londres, Ă  la demande de la bourgeoisie anglaise qui lui reproche sa bienveillance Ă  l'Ă©gard du Parti canadien. Il est remplacĂ© par un homme plus Ă©nergique, John Coape Sherbrooke 1764-1830. Toujours en 1815, Louis-Joseph Papineau 1786-1871, un avocat natif de MontrĂ©al, est Ă©lu orateur, c'est-Ă -dire prĂ©sident, de l'AssemblĂ©e du Bas-Canada, Ă  laquelle il appartiendra pendant 28 ans et qu'il prĂ©sidera pendant 22 ans ; cet homme politique Ă©minent va jouer un rĂŽle fondamental dans l'Ă©volution des Canadiens français ; sa maison Ă  MontrĂ©al ainsi que son manoir Ă  Montebello existent encore aujourd'hui. La sociĂ©tĂ© canadienne française est toujours rĂ©gie par des rĂšgles antĂ©rieures Ă  la RĂ©volution Française ; Papineau prĂŽne l'abolition du rĂ©gime seigneurial. L’organisation de la rĂ©sistance En 1817, Sherbrooke obtient du gouvernement britannique la reconnaissance officielle de l'Eglise catholique du Canada, en rĂ©compense des positions prises par Mgr Duplessis. En 1822, les Canadiens anglais militent pour un acte d'union des deux Canadas qui Ă©liminerait la langue française. Papineau, alors prĂ©sident de l'AssemblĂ©e, et J. Neilson, un journaliste francophile, vont Ă  Londres pour s'opposer Ă  ce projet, munis d'une pĂ©tition comportant 60000 signatures. Le Bas-Canada compte alors 420000 habitants et le Haut-Canada 125000. Une forte immigration irlandaise pose des problĂšmes sociaux. En 1825, le gouverneur George Ramsay Dalhousie 1770-1838, excĂ©dĂ© par les nombreux conflits qui l'opposent Ă  l'AssemblĂ©e, se rend Ă  son tour dans la capitale britannique dans le but de faire modifier la constitution de 1791. Pendant son absence, son subalterne, le lieutenant-gouverneur Francis Nathaniel Burton 1766-1832, s'entend avec le Parti canadien, ce qui rend caduque l'initiative du gouverneur que ce compromis rend furieux. A cette Ă©poque, la population quĂ©bĂ©coise est Ă  90% rurale. Toujours en 1825, le Canal Lachine est inaugurĂ©. Le commerce du bois joue alors un rĂŽle Ă©minent dans l'Ă©conomie rĂ©gionale. En 1826, le Parti canadien devient le Parti patriote ; Louis-Joseph Papineau, partisan de rĂ©formes constitutionnelles, dans le cadre de la lĂ©galitĂ©, et hostile Ă  la lutte armĂ©e, en devient le chef. En 1827, Dalhousie dissout l'AssemblĂ©e et convoque de nouvelles Ă©lections dans l'intention de se dĂ©barrasser de Papineau ; mais les Ă©lecteurs dĂ©jouent la manƓuvre. L'AssemblĂ©e demande Ă  Londres la destitution du gouverneur. Un nouveau gouverneur, James Kempt, plus accommodant, succĂšde Ă  Dalhousie, en 1828. En 1829, Ă  la suite d'un conflit politique entre l'AssemblĂ©e et le Conseil lĂ©gislatif, dĂ©signĂ© par la couronne, un dĂ©faut de crĂ©dit entraĂźne la fermeture des Ă©coles qui venaient juste d'ouvrir. En 1830, un nouveau gouverneur, Matthew Whitworth-Aylmer 1775-1850, entre en fonction. C'est un militaire sans expĂ©rience administrative ; il se montre incapable de gĂ©rer les exigences croissantes des Canadiens français et exacerbe les tensions en favorisant les Canadiens anglais. Le Parti patriote se radicalise il ne se contente plus d'une AssemblĂ©e sans pouvoir et exige le contrĂŽle des finances de la colonie ; par ailleurs, il se brouille avec le clergĂ©. Une immigration anglophone vigoureuse gonfle la population canadienne et tend Ă  modifier l'Ă©quilibre dĂ©mographique jusqu'alors favorable aux Francophones. En 1831, une Ă©pidĂ©mie de cholĂ©ra, qui sĂ©vira aussi l'annĂ©e suivante, dĂ©cime la population 2723 morts Ă  QuĂ©bec et 2547 Ă  MontrĂ©al. En 1833, on compte 400000 Francophones au Canada. Cette mĂȘme annĂ©e, l'abolition de l'esclavage ne soulĂšve aucun problĂšme, celui-ci Ă©tant restĂ© rĂ©siduel dans la colonie française. En 1834, les radicaux du Parti patriote l'emportent sur les modĂ©rĂ©s et gagnent les Ă©lections avec 77% des suffrages ; ils rĂ©digent 92 rĂ©solutions qui demandent, pour le Bas-Canada, un gouvernement responsable, l'Ă©lection du Conseil exĂ©cutif et davantage de Canadiens français dans l'Administration du pays. Ces requĂȘtes, envoyĂ©es Ă  Londres, tombent au plus mauvais moment, l'Angleterre traversant une crise politique. Le gouverneur cesse de rĂ©unir une AssemblĂ©e devenue incontrĂŽlable. Une forme de communautarisme se dĂ©veloppe alors dans la colonie les Canadiens français se rassemblent dans la SociĂ©tĂ© Saint-Jean Baptiste, un saint dont la fĂȘte sera celle du QuĂ©bec; les autres communautĂ©s ethniques crĂ©ent leurs propres sociĂ©tĂ©s. En 1835, la dĂ©tĂ©rioration de la situation entraĂźne le rappel d'Aylmer. Un nouveau gouverneur, Archibald Acheson, comte Gosford 1776-1849, arrive avec une mission de conciliation. Les Anglophones mĂ©contents fondent le belliqueux Doric Club une version du British Rifle Corps ; les Francophones rĂ©pliquent en crĂ©ant Les Fils de la LibertĂ©, dont l'homme politique canadien George-Etienne Cartier 1814-1873, un des futurs pĂšres de la confĂ©dĂ©ration, est l'un des 500 fondateurs. La rĂ©bellion des patriotes En 1837, le rejet des 92 rĂ©solutions met le feu aux poudres. Londres leur oppose en effet 10 rĂ©solutions, parmi lesquelles figure le droit de l'exĂ©cutif Ă  utiliser sans contrĂŽle l'argent de l'Etat, ce qui constitue une vĂ©ritable provocation. MalgrĂ© la dĂ©nonciation du radicalisme par la hiĂ©rarchie catholique et les rĂ©ticences de Papineau, l'agitation fait tache d'huile Ă  travers le Bas-Canada. Fils de la libertĂ© et membres du Doric Club en viennent aux mains Ă  MontrĂ©al. Le commandement des troupes est confiĂ© Ă  John Colborne 1778-1863 et Gosford quitte ses fonctions. La rĂ©pression militaire s'abat sur les patriotes. Vingt six mandats d'arrĂȘt pour crime de haute trahison sont Ă©mis contre eux. La tĂȘte de Papineau, pourtant hostile aux Ă©meutes, est mise Ă  prix ; il se rĂ©fugie d'abord aux Etats-Unis, puis en France ; il ne sera amnistiĂ© qu'en 1845. Des affrontements armĂ©s ont lieu, Ă  Saint-Denis, oĂč les patriotes triomphent, et dans Saint-Charles, oĂč ils sont battus ainsi que dans le village de Saint-Eustache, au nord de MontrĂ©al, dont l'Ă©glise garde encore la marque des boulets anglais. La bataille de Saint-Eustache immortalise Jean-Olivier ChĂ©nier 1806-1837, une des figures patriotiques les plus emblĂ©matiques. Ce mĂ©decin de Saint-Eustache, engagĂ© dans le mouvement rĂ©volutionnaire, est gĂ©nĂ©ral en chef du comtĂ© des Deux-Montagnes. Alors que Joseph Papineau prĂȘche la modĂ©ration, ChĂ©nier lance un appel aux armes ; dĂšs lors, sa tĂȘte est mise Ă  prix. En dĂ©cembre 1837, il commande quelques deux cents hommes retranchĂ©s dans l'Ă©glise, le presbytĂšre et le couvent de Saint-Eustache, pour rĂ©sister Ă  l'armĂ©e britannique. La partie n'est pas Ă©gale. Les morts sont bientĂŽt nombreux parmi les patriotes. Les Anglais triomphent et ChĂ©nier est tuĂ© au moment oĂč il sort de l'Ă©glise en flammes. Les victimes de la rĂ©pression sont nombreuses. L'armĂ©e britannique brĂ»le le village de Saint-BenoĂźt. La Constitution du Bas-Canada est suspendue. Les Ă©checs ne dĂ©couragent cependant pas les patriotes qui se regroupent aux Etats-Unis, bien dĂ©cidĂ©s Ă  prendre leur revanche. Ils pĂ©nĂštrent dans la province et proclament la RĂ©publique, la sĂ©paration de l’Église et de l’État, la suppression de la dĂźme, l’abolition des redevances seigneuriales, la libertĂ© de la presse, le suffrage universel pour les hommes, le scrutin secret, la nationalisation des terres de la couronne et celles de la British American Land Co., l’élection d’une AssemblĂ©e constituante et l’emploi des deux langues dans les affaires publiques. En 1838, le successeur de Gosford, John George Lambton, comte Durham 1792-1840, profite de l'accĂšs au trĂŽne de la reine Victoria pour amnistier 153 rebelles, tandis que 8 chefs de l'insurrection sont exilĂ©s aux Bermudes ; critiquĂ© Ă  Londres, il dĂ©missionne. Colborne reprend l'affaire en mains ; il proclame la loi martiale, repousse les patriotes venus des Etats-Unis et lutte contre les FrĂšres chasseurs, un mouvement clandestin qui donne du fil Ă  retordre aux forces britanniques en MontĂ©rĂ©gie. Les arrestations sont nombreuses ; une cour martiale est instituĂ©e pour juger 108 accusĂ©s. En 1839, douze patriotes sont pendus dans une prison de MontrĂ©al ; cinquante-huit autres sont dĂ©portĂ©s en Australie ; des Ă©crivains et imprimeurs sont emprisonnĂ©s pour Ă©crits sĂ©ditieux. La rĂ©volte ne s'est pas limitĂ©e au Bas-Canada ; elle s'inscrit en fait dans le vaste mouvement d'Ă©mancipation des nations qui agite l'Europe. Mais la tentative de Mackenzie, en Haut-Canada, dans une rĂ©gion dominĂ©e par les Loyalistes, n'a revĂȘtu qu'une importance secondaire, et elle n'en a Ă©tĂ© que plus facilement rĂ©primĂ©e. Nombre de vaincus s'enfuient aux Etats-Unis. Le Parti patriote change une fois de plus de nom, il devient dĂ©sormais le Parti libĂ©ral. L'emprise des libĂ©raux sur l'opinion publique est refoulĂ©e au profit d'un retour en force de l'influence clĂ©ricale. L'Eglise excommunie les patriotes qui seront rĂ©habilitĂ©s au 20Ăšme siĂšcle. L'image lĂ©gendaire du patriote, sabots aux pieds, pipe au bec, fusil Ă  l'Ă©paule, taille serrĂ©e dans une ceinture flĂ©chĂ©e, tuque bonnet en laine Ă  pompons en tĂȘte, n'en restera pas moins populaire au QuĂ©bec. Elle refleurira dans les annĂ©es 1970, au moment de l'essor du mouvement indĂ©pendantiste. Les patriotes ne se rassemblaient pas derriĂšre le drapeau bleu et blanc frappĂ© de fleurs de lys, qui n'apparut que plus tard. Leur Ă©tendard Ă©tait tricolore vert, blanc rouge, comme celui de l'Italie. Il est intĂ©ressant de souligner qu'ils se sont inspirĂ©s de la RĂ©volution Française plutĂŽt que de l'exemple amĂ©ricain pourtant voisin. Notons que le pourcentage des professions intellectuelles est plus faible dans la population francophone 0,12 % que dans la population anglophone 0,34% et que les intellectuels francophones occupent souvent un emploi infĂ©rieur Ă  leur compĂ©tence. Un problĂšme social s'ajoute donc au problĂšme politique. Il refera surface un siĂšcle plus tard. Le retour Ă  la politique d’assimilation – La crĂ©ation du Canada L'Ă©chec du soulĂšvement est suivi par une importante rĂ©forme constitutionnelle en 1840. Cette rĂ©forme s'inspire du rapport rĂ©digĂ© par Lord Durham Ă  la suite de la prise d'armes, document dans lequel les Canadiens français sont prĂ©sentĂ©s comme un peuple infĂ©rieur, sans histoire et sans culture. Cette opinion restera rĂ©pandue chez les Anglophones jusqu'Ă  une Ă©poque rĂ©cente. François-Xavier Garneau 1809-1866 rĂ©plique Ă  cette grossiĂšre falsification de la rĂ©alitĂ© en rĂ©digeant une Histoire du Canada » qui fait justice des calomnies anglaises, lesquelles ne poursuivent qu'un seul but servir d'alibi Ă  la rĂ©duction en quasi esclavage des Canadiens français. Quoi qu'il en soit, un Acte d'Union rĂ©unit le Haut et le Bas-Canada dans un seul gouvernement du Canada. Les AssemblĂ©es des deux entitĂ©s prĂ©cĂ©dentes disparaissent. Elles sont remplacĂ©es par une AssemblĂ©e du Canada unique oĂč Francophones et Anglophones sont reprĂ©sentĂ©s Ă  paritĂ©. Les Francophones vont se battre pour obtenir une reprĂ©sentation proportionnelle, mais on ne leur accordera pas celle-ci avant que l'immigration n'ait rendu les Anglophones majoritaires ; la balance est pour le moment favorable aux Canadiens français ils sont encore 20% plus nombreux que les Canadiens anglais, mais cela ne durera pas car une forte immigration anglophone va inverser la position respective des deux communautĂ©s dĂšs 1851. Un gouverneur-gĂ©nĂ©ral administre la colonie. C'est l'acte de naissance d'un Canada, dont la langue officielle redevient l'anglais. On notera que ce Canada, limitĂ© Ă  l'Ontario et au QuĂ©bec actuels, ne comprend ni les provinces maritimes, ni Terre-Neuve, ni Ă©videmment les provinces de l'ouest qui ne sont pas encore colonisĂ©es. La rĂ©volte, comme c'est souvent le cas, s'est donc accompagnĂ©e d'une rĂ©gression au dĂ©triment des Canadiens français dont l'identitĂ© culturelle et linguistique est menacĂ©e. La volontĂ© assimilationniste des Anglais se manifeste Ă  nouveau, comme lors de la conquĂȘte. Cette rĂ©forme, qui entre en application en 1841, ne satisfait personne et elle s'avĂšre rapidement source d'instabilitĂ© politique les gouvernements, installĂ©s Ă  MontrĂ©al en 1843, se succĂšdent rapidement. Les nouvelles institutions soulĂšvent toutefois peu d'opposition parmi les Francophones, encore sous le coup de la rĂ©pression. La Grande HĂ©morragie des Canayens Cependant, les Canadiens anglais usurpent le nom de Canadiens que se donnaient jusqu'Ă  prĂ©sent les Canadiens français ; ces derniers, pour se distinguer des Canadians, s'appellent donc Anciens Canadiens ou Canayens. Les plus hostiles Ă©migrent aux Etats-Unis, tant d'ailleurs pour des raisons Ă©conomiques que politiques ; ils sont si nombreux que l'on nomme cette Ă©poque celle de La Grande HĂ©morragie. Ce mouvement de population nĂ©gatif est contrebalancĂ© par une forte immigration des Irlandais chassĂ©s de leur pays par la famine ; farouchement hostiles aux Anglais, ils se sentent proches des Francophones, mais ils contribuent nĂ©anmoins Ă  angliciser la province. MalgrĂ© ses imperfections, la nouvelle constitution n'en est pas moins appuyĂ©e par Louis Hippolyte Lafontaine 1807-1864, un ancien fidĂšle de Papineau, briĂšvement emprisonnĂ© en 1838, que l'expĂ©rience a rendu modĂ©rĂ© et qui, devant le fait accompli, s'efforce de tirer le meilleur parti possible des nouvelles institutions. Il est aidĂ© en cela par les rĂ©formistes anglophones qui poursuivent le mĂȘme but. En 1843, une grĂšve Ă  Beauharnais tourne mal et les forces britanniques tuent 20 grĂ©vistes. En 1845 et 1846, des incendies ravagent un quartier de QuĂ©bec. En 1847-1848, le typhus tue le tiers des immigrants irlandais retenus Ă  Grosse-Île, station de quarantaine pour immigrants, dans l'estuaire du Saint-Laurent. En 1848, Lafontaine et Robert Baldwin 1804-1858 obtiennent une modification dĂ©mocratique de la constitution par l'introduction du principe de la responsabilitĂ© ministĂ©rielle devant l'AssemblĂ©e, ce qui ne change rien Ă  la domination des Anglophones sur les Francophones; tout au plus l'alliance de Lafontaine avec les rĂ©formistes anglophones attĂ©nue-t-il la pression assimilationniste. La mĂȘme annĂ©e, Joseph Papineau, amnistiĂ© en 1845, est Ă©lu dĂ©putĂ© de l'AssemblĂ©e du Canada. Il Ă©volue vers le rĂ©publicanisme, sous l'influence de ses sĂ©jours aux Etats-Unis et en France, et va devenir partisan de l'intĂ©gration de ce qui fut le Bas-Canada dans les Etats-Unis, Ă  dĂ©faut de mieux, tout espoir paraissant dĂ©sormais fermĂ© aux Francophones dans le Canada uni. En 1849, des Ă©meutiers anglophones incendient l'Ă©difice parlementaire canadien de MontrĂ©al pour marquer leur opposition Ă  la French Domination ; les instances gouvernementales dĂ©mĂ©nagent Ă  Toronto. La mĂȘme annĂ©e, James Bruce Lord Elgin 1811-1863, gouverneur gĂ©nĂ©ral du Canada, fait approuver une amnistie gĂ©nĂ©rale et les exilĂ©s politiques de 1838 peuvent rentrer au pays ; les habitants du Bas-Canada ayant subi des pertes lors des Ă©vĂ©nements de 1837-1838 sont indemnisĂ©s. Des Ă©meutes paysannes Ă©clatent contre les taxes scolaires et l'instruction obligatoire. Les Ă©vĂ©nements qui viennent d'ĂȘtre rapportĂ©s se sont dĂ©roulĂ©s dans un contexte Ă©conomique dĂ©favorable. L'augmentation rapide de la population a entraĂźnĂ© un morcellement des propriĂ©tĂ©s. Les nouvelles terres Ă  cultiver sont lointaines et peu productives. L'exploitation de la forĂȘt offre des ressources insuffisantes pour remplacer les pertes de revenu causĂ©es par l'essoufflement de la traite des fourrures. Entre 1842 et 1846, dans le cadre d'une politique de libre-Ă©change, les produits canadiens cessent de bĂ©nĂ©ficier d'une protection tarifaire. Au plan Ă©conomique, le Canada ne possĂšde pas la taille critique pour espĂ©rer rivaliser avec son voisin du sud et son retard industriel ne fait que se creuser. Tous ces Ă©lĂ©ments favorisent l'exode rural et aussi l'Ă©migration vers des Etats-Unis plus dynamiques La Grande HĂ©morragie. En 1851, le gouvernement se transfĂšre Ă  QuĂ©bec. En 1852, un nouvel incendie dĂ©truit plusieurs centaines de maisons Ă  MontrĂ©al ; l'UniversitĂ© Laval est fondĂ©e Ă  QuĂ©bec qu'endeuille une Ă©pidĂ©mie de cholĂ©ra. En 1854, le rĂ©gime seigneurial est aboli ; les Ă©difices parlementaires sont dĂ©truits par un incendie et le gouvernement retourne siĂ©ger Ă  Toronto. En 1855, le gouverneur Edmund Walker Head humilie bĂȘtement les Canadiens français en exaltant la supĂ©rioritĂ© de la race anglo-saxonne. En 1857, la reine Victoria dĂ©signe Ottawa comme capitale du Canada ; une crise Ă©conomique Ă©clate dans la colonie. En 1859, le gouvernement revient Ă  QuĂ©bec. En 1861, plus de 85% des habitants du Bas-Canada habitent Ă  la campagne et le quart de cette population est anglophone ; la population du Canada croit 5,5 fois plus vite que celle du futur QuĂ©bec. Les tensions entre les communautĂ©s, avivĂ©es par les difficultĂ©s Ă©conomiques, montrent aux esprits les plus clairvoyants que la solution d’un Canada uni, dans lequel la spĂ©cificitĂ© francophone serait vouĂ©e Ă  disparaĂźtre, est du domaine de l’utopie. DĂšs 1864, un projet de confĂ©dĂ©ration des colonies britanniques d'AmĂ©rique est dĂ©battu au cours de plusieurs confĂ©rences, Ă  Charlottetown Île-du-Prince-Édouard et Ă  QuĂ©bec. Le catholicisme Ă©lĂ©ment principal d’un peuple Ă  vocation agricole George-Etienne Cartier, reprĂ©sentant du monde des affaires et du clergĂ© se montre partisan de la rĂ©forme. Antoine-AimĂ© Dorion 1818-1891, homme politique libĂ©ral, la juge insuffisante et dangereuse ; il estime que ce n'est qu'une fĂ©dĂ©ration dĂ©guisĂ©e et souhaiterait la restreindre aux deux provinces qui seront le QuĂ©bec et l'Ontario. En 1865, le gouvernement canadien s'installe Ă  Ottawa. En 1866, Alexander T. Galt 1817-1893, reprĂ©sentant du comtĂ© de Sherbrooke, fait adopter Ă  Londres un texte garantissant les droits scolaires des minoritĂ©s. De 1850 Ă  1870 s'Ă©labore une idĂ©ologie nouvelle selon laquelle le catholicisme est l'Ă©lĂ©ment principal d'un peuple canadien-français dont la vocation est agricole. La naissance de la ConfĂ©dĂ©ration – La rĂ©surrection du QuĂ©bec En 1867, l'instabilitĂ© politique, les pressions intĂ©rieures et extĂ©rieures ainsi que les difficultĂ©s Ă©conomiques, mettent un terme Ă  l'expĂ©rience malheureuse du Canada uni. Le voisin amĂ©ricain, secouĂ© par la guerre de sĂ©cession, se montre Ă  nouveau menaçant, l'Angleterre ayant pris position en faveur des Sudistes. D'autre part, l'intĂ©gration des colonies anglaises dans l'espace Ă©conomique nord-amĂ©ricain est devenue inĂ©vitable. L'Acte d'Union est dissout. Un Canada fĂ©dĂ©ral voit le jour sous la forme d'une ConfĂ©dĂ©ration canadienne, dominion de l'Empire Britannique. Elle intĂšgre d'abord l'ancien Haut-Canada, devenu l'Ontario, peuplĂ© de Loyalistes, l'ancien Bas-Canada, qui redevient la province du QuĂ©bec, peuplĂ©e de Canadiens français, ainsi que les provinces de Nouvelle-Ecosse et du Nouveau-Brunswick, oĂč rĂ©sident encore des descendants des Acadiens. Les autres provinces constituant le Canada actuel s'y agrĂšgeront ensuite au cours du temps. La consĂ©quence majeure de cette rĂ©forme pour les Francophones, c'est Ă©videmment la rĂ©apparition d'une province dans laquelle ils se trouvent Ă  nouveau majoritaires. Cet Acte de l'AmĂ©rique du Nord britannique entĂ©rine l'Ă©chec de la politique d'assimilation ; il ne remet pas en cause les droits de la couronne puisqu'elle continue de contrĂŽler Ă©troitement la politique extĂ©rieure et l'armĂ©e du dominion, dont le pouvoir est limitĂ© aux finances, Ă  la politique intĂ©rieure et au commerce. Mais elle octroie aux provinces un certain degrĂ© d'autonomie qui justifie l'existence Ă  leur niveau d'une AssemblĂ©e lĂ©gislative et d'un gouvernement. C'est pourquoi elle a Ă©tĂ© soutenue par George-Etienne Cartier 1814-1873 et par John A. MacDonald 1815-1891, le second Ă©tant pourtant partisan d'un Etat plus unitaire. C'est enfin une loi anglaise qui, en thĂ©orie, ne peut ĂȘtre modifiĂ©e que par le Parlement anglais. Ottawa devient la capitale de l'Etat fĂ©dĂ©ral. Les opposants les plus dĂ©terminĂ©s aux nouvelles institutions se recrutent parmi les Ecossais et les Irlandais ; l'un de ces derniers assassine Ă  coups de revolver un dĂ©putĂ© fĂ©dĂ©raliste Ă  MontrĂ©al. La population anglophone de la province du QuĂ©bec amorce un lent dĂ©clin. En 1868, le premier ministre du QuĂ©bec Pierre-Joseph-Olivier Chauveau 1820-1890 crĂ©e un ministĂšre de l'Instruction publique qui sera abolit en 1875 sous la pression du clergĂ© qui redoute une Ă©volution vers la laĂŻcitĂ©, assimilĂ©e Ă  la Franc-Maçonnerie propagatrice de l'idĂ©ologie rĂ©volutionnaire. D’emblĂ©e, le jeune gouvernement provincial se heurte Ă  trois forces antagonistes le pouvoir fĂ©dĂ©ral, l'opposition anglophone et le clergĂ© catholique. La rĂ©volte des mĂ©tis En 1869, le gouvernement canadien acquiert la Terre de Rupert Ă  la Compagnie de la Baie d'Hudson marquant par lĂ  sa volontĂ© de soustraire l'ouest canadien aux appĂ©tits des Etats-Unis. Sans consulter la population, il prononce l'annexion de la province du Manitoba. Cet acte unilatĂ©ral entraĂźne la rĂ©volte des colons de l'endroit majoritairement francophones. Ils se dressent pour la dĂ©fense de leur langue, de leur foi et pour leur autogestion. Le mouvement, qualifiĂ© de RĂ©bellion de la RiviĂšre Rouge, est dirigĂ© par un MĂ©tis Louis Riel 1844-1885. Un gouvernement provisoire est créé ; il se heurte Ă  une opposition anglophone qui mĂ©prise l'autoritĂ© des MĂ©tis. Des arrestations ont lieu et des condamnations Ă  mort sont prononcĂ©es par le nouveau pouvoir mĂ©tis, immĂ©diatement suivies de grĂąces. Cependant, l'un des conjurĂ©s, Thomas Scott, insulte ses gardiens qui exigent son exĂ©cution. Riel accĂšde Ă  leur demande et Scott est fusillĂ©. Le gouvernement provisoire nĂ©gocie cependant avec le gouvernement canadien ; on parvient Ă  un accord et le Manitoba rejoint la ConfĂ©dĂ©ration canadienne. Un dĂ©tachement militaire fĂ©dĂ©ral, est envoyĂ© dans la colonie, sous les ordres de Garnet Wolseley 1833-1913, un militaire d’origine irlandaise chevronnĂ©, pour dissuader d'Ă©ventuelles tentatives amĂ©ricaines. Mais on dit aussi que les miliciens ontariens se proposent de lyncher Riel. Celui-ci se rĂ©fugie aux Etats-Unis. Il ne revient au Manitoba qu'en 1871, rassurĂ© par l'Ă©lection de ses partisans. Il participe mĂȘme Ă  une mobilisation gĂ©nĂ©rale contre les Fenians yankees, un groupe d'Irlandais qui se livrent Ă  des raids en territoire canadien. SaluĂ© cordialement par le reprĂ©sentant de la couronne, on n'en cherche pas moins Ă  l'Ă©carter, en lui offrant une somme d'argent, par l'intermĂ©diaire d'un Ă©vĂȘque. Il s'efface quelques temps puis revient dans l'arĂšne politique, soutenu par George-Etienne Cartier qui milite pour son amnistie mais mourra malencontreusement en 1873, sans avoir obtenu gain de cause. Elu au parlement canadien, réélu, dĂ©mis puis réélu Ă  nouveau, Riel doit jouer Ă  cache-cache avec ses ennemis qui menacent de l'assassiner et l'empĂȘchent de siĂ©ger normalement, ce qui lui vaut une grande popularitĂ© parmi les Francophones. Le premier ministre de l'Ontario, Edward Blake, va jusqu'Ă  proposer une rĂ©compense de 5000 dollars pour sa capture ! De nouveau exilĂ© aux Etats-Unis, il apprend la condamnation Ă  mort d’Ambroise-Dydime LĂ©pine 1840-1923, son adjoint lors de la RĂ©bellion de la RiviĂšre rouge, en punition de l'exĂ©cution de Scott. L'opinion francophone s'indigne et rĂ©clame la clĂ©mence pour Riel et LĂ©pine ; ce dernier finit par obtenir la commutation de sa peine. Mais Riel, dont la santĂ© est dĂ©jĂ  Ă©branlĂ©e, sombre dans une sorte de narcissisme religieux qui nĂ©cessite des soins, lesquels lui sont prodiguĂ©s clandestinement au QuĂ©bec. AprĂšs un bref rĂ©pit en famille, en 1878, il part vers l'ouest et se mĂȘle maladroitement de politique au Montana oĂč il enseigne pendant quelques temps, dans une mission jĂ©suite. En 1871 un recensement rĂ©vĂšle que les Francophones ne reprĂ©sentent plus que 30% de la population du Canada. En 1873, une crise Ă©conomique Ă©branle la ConfĂ©dĂ©ration. Le gouvernement conservateur fĂ©dĂ©ral de John A. Macdonald met en Ɠuvre une politique protectionniste en frappant les importations de droits de douane Ă©levĂ©s, pour favoriser l'industrialisation du pays ; il prĂŽne l'extension des chemins de fer vers les villes secondaires et l'appel Ă  l'immigration pour dĂ©velopper l'ouest du pays. Les rĂ©sultats de cette politique s'avĂšrent profitables pour l'ensemble du Canada, et pour le QuĂ©bec en particulier qui voit une bourgeoisie urbaine fortunĂ©e se crĂ©er. En 1876, un fermier de Thetford dĂ©couvre une Ă©trange pierre l'amiante ; l'exploitation miniĂšre va commencer. En 1877, Wilfrid Laurier 1841-1919, ministre libĂ©ral fĂ©dĂ©ral originaire du QuĂ©bec, dĂ©nonce les pressions du clergĂ© sur les Ă©lecteurs qui, l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente, ont causĂ© la dĂ©faite d'un dĂ©putĂ© libĂ©ral dans un QuĂ©bec toujours dominĂ© par un catholicisme hostile au Parti libĂ©ral; le pape rappelle aux prĂȘtres leur devoir de rĂ©serve en matiĂšre Ă©lectorale et la hiĂ©rarchie du clergĂ© quĂ©bĂ©cois invite ce dernier Ă  ne plus se mĂȘler de politique en chaire. En 1880, un auteur francophone, Adolphe-Basile Routhier 1839-1920, Ă©crit son poĂšme Ô Canada » qui deviendra l'hymne national canadien. AprĂšs la RĂ©bellion de la RiviĂšre Rouge, beaucoup de MĂ©tis sont partis vers le Nord-Ouest. Mais les conditions d'existence y sont de plus en plus dĂ©favorables, notamment en raison de la disparition des bisons. Aussi, les MĂ©tis font-ils de nouveau appel Ă  Riel. Ce dernier accepte, mais la tĂąche s'avĂšre rude il faut concilier les points de vue diffĂ©rents des MĂ©tis, francophones et anglophones, et dĂ©jouer les manƓuvres dilatoires du gouvernement fĂ©dĂ©ral. Riel se sĂ©pare de plus en plus de la religion et du clergĂ©. Une rĂ©volte armĂ©e finit par Ă©clater. Elle se rĂ©fĂšre Ă  la RĂ©volution Française les rebelles composent une Marseillaise rielliste. L'un des chefs, Gabriel Dumont 1837-1906, se montre partisan d'une longue lutte de guĂ©rilla propre Ă  dĂ©courager l'adversaire ; Riel se prononce pour un affrontement gĂ©nĂ©ral. Les rencontres ont lieu au Saskatchewan. L'armĂ©e des MĂ©tis remporte un succĂšs Ă  Fish Creek mais elle essuie une sĂ©vĂšre dĂ©faite Ă  la Bataille de Batoche, un mois plus tard, en mai 1885. Riel, fait prisonnier, est envoyĂ© Ă  Winnipeg pour y ĂȘtre jugĂ©. Mais, comme on redoute que le jury de la capitale du Manitoba ne lui soit par trop favorable, il est redirigĂ© sur RĂ©gina Saskatchewan oĂč on l'enferme, boulet aux pieds, dans une cellule de 3 m2, pendant deux mois, sans le secours du moindre avocat. AccusĂ© de plusieurs actes de trahison, son cas est soumis Ă  un jury dont une seule personne comprend un peu le français ; la dĂ©fense est assurĂ©e par de jeunes avocats du QuĂ©bec et par un avocat anglophone rĂ©cemment Ă©tabli Ă  RĂ©gina. La condamnation ne fait aucun doute. L'accusĂ© expose longuement les droits des MĂ©tis. Le jury, qui n'a Ă©videmment rien compris Ă  cette intervention, et qui pense mĂȘme qu'on juge le prĂ©venu pour le meurtre de Scott, le dĂ©clare coupable tout en rĂ©clamant la clĂ©mence. Le juge passe outre Ă  la requĂȘte du jury et Riel est pendu, aprĂšs s'ĂȘtre rĂ©conciliĂ© avec l'Ă©glise catholique, le 16 novembre 1885. Cet assassinat juridique monte un peu plus les Francophones contre les Anglophones. Dans la mĂ©moire des premiers, dont certains sont sangs mĂȘlĂ©s, Riel, martyr de la cause mĂ©tisse, est l'un des leurs. Cette affaire est symbolique des rapports psychologiques qui se sont dĂ©veloppĂ©s entre les deux peuples fondateurs du Canada, d'un cĂŽtĂ© des Francophones vaincus et qui se sentent humiliĂ©s, de l'autre cĂŽtĂ© des Anglophones, sans doute ethniquement plus purs parce que leur Ă©migration s'est souvent faite par famille, vainqueurs et imbus de leur supĂ©rioritĂ© raciale et Ă©conomique. Cette prĂ©sentation schĂ©matique, Ă  peine forcĂ©e, subsistera jusque vers la fin du vingtiĂšme siĂšcle. En 1885, des libĂ©raux et des conservateurs du QuĂ©bec, choquĂ©s par le dĂ©nouement de l'affaire Riel, rejoignent le Parti national, existant depuis 1871, dont le leader, HonorĂ© Mercier 1840-1894, devient premier ministre provincial en 1887. Dans la seconde moitiĂ© du 19Ăšme siĂšcle, l'Ă©conomie du QuĂ©bec s'industrialise, Ă  partir de l'exploitation des ressources naturelles hydroĂ©lectricitĂ©, pĂątes Ă  papier, mĂ©tallurgie de l'aluminium, moulins Ă  laine pour le tissage, amiante.... Vers 1880, apparaissent des organisations syndicales inspirĂ©es des Etats-Unis, les Chevaliers du Travail que Mgr ElzĂ©ar-Alexandre Taschereau 1820-1898 fera interdire par le Vatican en 1885 sous l'accusation de Franc-Maçonnerie, ce qui n'empĂȘchera pas Ă  d'autres organisations ouvriĂšres de se constituer pour amĂ©liorer les conditions d'existence des travailleurs. La population rurale ne reprĂ©sente plus que 70% des habitants du QuĂ©bec. L'Ă©lectricitĂ© et le tĂ©lĂ©phone font leur apparition. En 1897, la premiĂšre automobile Ă  essence du Canada, la fossmobile, est fabriquĂ©e Ă  Sherbrooke, dans les Cantons de l'Est du QuĂ©bec, par George Foote Foss 1876-1968. La production quĂ©bĂ©coise est surtout destinĂ©e Ă  l'exportation. Comme les capitaux locaux font dĂ©faut, les nouvelles entreprises sont financĂ©es d'abord par des Anglais ensuite par des AmĂ©ricains. L'Ă©conomie quĂ©bĂ©coise Ă©chappe ainsi en grande partie aux Francophones. L'exode vers les villes se poursuit, mais l'Ă©migration vers les Etats-Unis devient rĂ©siduelle les QuĂ©bĂ©cois trouvent des emplois sur place. Le syndicalisme se dĂ©veloppe pour la dĂ©fense des ouvriers spĂ©cialisĂ©s, seuls Ă  bĂ©nĂ©ficier d'un emploi stable. L'immigration est encouragĂ©e par le gouvernement canadien pour occuper les territoires de l'ouest et les soustraire ainsi Ă  la convoitise des Etats-Unis. Un chemin de fer, le Canadian-Pacific, rapproche l'Atlantique du Pacifique. Le peuplement des nouvelles provinces de l'ouest relativise l'importance du QuĂ©bec au moment oĂč sa population francophone voit arriver des Anglais, mais aussi des Italiens, des Grecs et des ressortissants des pays de l'est europĂ©en Polonais, Ukrainiens. Je n'oublierai pas aussi le faible apport des Alsaciens-Lorrains qui refusent l'annexion de leur rĂ©gion Ă  l'Allemagne, Ă  l'issue de la guerre de 1870, puisque j'ai connu un de leurs descendants. La plupart de ces nouveaux-venus rĂȘvent de s'intĂ©grer dans une AmĂ©rique du Nord anglo-saxonne. Ils vont donc modifier sensiblement l'Ă©quilibre dĂ©mographique entre les Anglophones et les Francophones suscitant parfois chez ces derniers un sentiment de rejet teintĂ© de xĂ©nophobie. En 1890, la suppression du français dans les Ă©coles du Manitoba, mesure prĂ©cĂ©dĂ©e puis imitĂ©e dans d'autres provinces, suscite au QuĂ©bec une poussĂ©e de nationalisme. En 1891, les partis fĂ©dĂ©raux profitent d'un scandale financier pour faire tomber HonorĂ© Mercier qu’ils estiment capable de mener le QuĂ©bec Ă  l'indĂ©pendance. En 1896, aprĂšs une longue lutte, l'Ontario obtient la reconnaissance par Londres de la souverainetĂ© des provinces dans leurs sphĂšres de juridiction. En 1900, pour faire piĂšce au monde financier Anglo-saxon, qui refuse ses prĂȘts aux Francophones, Alphonse Desjardins 1854-1920 fonde un mouvement de coopĂ©ratives d'Ă©pargne et de crĂ©dit qui est promis Ă  un bel avenir et porte encore son nom. Un mot sur les conditions sanitaires de la province Ă  cette Ă©poque en 1885, une Ă©pidĂ©mie de variole tue prĂšs de 3000 personnes Ă  MontrĂ©al ; la mortalitĂ© infantile est trĂšs Ă©levĂ©e dans la province 30% Ă  MontrĂ©al ! Ă  cause de la diarrhĂ©e, de la tuberculose, de la diphtĂ©rie de la scarlatine et de la typhoĂŻde. Au dĂ©but du 20Ăšme siĂšcle, la population du QuĂ©bec dĂ©passe 1,6 millions d'habitants, mais les autres provinces du Canada en comptent plus de 3,7 millions. La rĂ©surgence du nationalisme quĂ©bĂ©cois Le nationalisme canadien français se dĂ©veloppe alors autour d’Henri Bourassa 1868-1952, petit-fils de Louis-Joseph Papineau, journaliste et homme politique catholique, qui s'est opposĂ©, en 1899, Ă  l'implication de la confĂ©dĂ©ration dans la Guerre des Boers. A cette occasion, alors qu'il prononce un discours en français, il est interpellĂ© par un dĂ©putĂ© anglophone qui lui crie Speak white ! », ce qui est significatif du mĂ©pris dans lequel il tient les Francophones assimilĂ©s Ă  des Indiens. Il est Ă  noter que le premier ministre fĂ©dĂ©ral, qui est pour la premiĂšre fois francophone, Wilfrid Laurier, refuse la participation du Canada au conflit mais, pour mĂ©nager les susceptibilitĂ©s anglaises, il accepte de dĂ©frayer le transport des volontaires. En 1910, Henri Bourassa fonde le journal Le Devoir. Ce quotidien militera pour un projet d'Ă©mancipation du Canada de la tutelle britannique et dĂ©fendra les droits des Canadiens français. Bourassa plaide d'abord pour l'accĂšs de la ConfĂ©dĂ©ration Ă  la pleine souverainetĂ©. Il pense que l'harmonie se rĂ©tablira entre Francophones et Anglophones dans un Canada indĂ©pendant. Mais cette vision idĂ©ale des rapports entre les deux peuples fondateurs est remise en cause par un certain nombre d'incidents, notamment lorsque des lois provinciales restreignent l'usage du français. DĂšs 1901, les ruraux ne reprĂ©sentent plus que 60% de la population du QuĂ©bec. En 1912, le QuĂ©bec annexe le Nouveau-QuĂ©bec au nord de son territoire. La PremiĂšre Guerre mondiale En 1914, la Grande-Bretagne, qui dirige la politique extĂ©rieure du Canada, oblige ce dernier Ă  participer Ă  la PremiĂšre Guerre Mondiale 60000 morts canadiens. L'opposition entre Canadiens anglais, fidĂšles Ă  la couronne britannique, et Canadiens français, plus que rĂ©servĂ©s, devient alors manifeste. En 1917 un impĂŽt sur le revenu provisoire » est instaurĂ© au Canada pour financer l'effort de guerre ; il ne disparaĂźtra jamais. En 1918, la conscription entraĂźne une Ă©meute Ă  QuĂ©bec; l'armĂ©e mitraille la foule ; on relĂšve quatre morts, tous tuĂ©s par balles explosives, et de nombreux blessĂ©s ; plus de deux cents personnes sont arrĂȘtĂ©es dans les jours qui suivent ; l'Habeas corpus est suspendu. L'opinion de Bourassa Ă©volue du nationalisme canadien au nationalisme quĂ©bĂ©cois. Au lendemain de la Grande Guerre, le Royaume-Uni n'a plus la capacitĂ© de financer l'expansion Ă©conomique du Canada qui tombe de plus en plus sous l'emprise des capitaux amĂ©ricains. Tandis qu'un service d'autobus entre en service Ă  MontrĂ©al, en 1919, une rĂ©cession frappe la province et l'Ă©migration quĂ©bĂ©coise vers les Etats-Unis reprend massivement, jusqu'en 1926. Le gouvernement fĂ©dĂ©ral assouplit la politique d'immigration en raison de l'importance du dĂ©ficit migratoire. Deux courants idĂ©ologiques s'affrontent alors au QuĂ©bec le libĂ©ralisme de Louis-Alexandre Taschereau 1867-1952, premier ministre provincial de 1920 Ă  1936, favorable au progrĂšs et au dĂ©veloppement industriel, et le nationalisme clĂ©rical incarnĂ© par l'abbĂ© Lionel Groulx 1878-1967, Ă©crivain et historien nationaliste, qui dĂ©fend les valeurs traditionnelles familiales et agricoles et prĂ©sente la dĂ©faite de 1760 comme une catastrophe pour les Canadiens français. En 1922, la crĂ©ation de la station CKAC introduit la radiodiffusion au QuĂ©bec. A 1927, Londres fixe la frontiĂšre entre le QuĂ©bec et la Labrador qui est attribuĂ© Ă  Terre-Neuve. Le QuĂ©bec ne reconnaĂźt pas cette frontiĂšre avec un territoire riche en ressources miniĂšres dont il estime avoir Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ©. La Grande DĂ©pression AprĂšs un regain de prospĂ©ritĂ© dans la seconde partie des annĂ©es 1920, la grande dĂ©pression de 1929 frappe Ă  nouveau la province. Le taux de chĂŽmage passe de 3 Ă  25% et les salaires chutent de 40%. La situation devient d'autant plus difficile que les Etats-Unis n'offrent plus de dĂ©bouchĂ© au surplus de main-d’Ɠuvre quĂ©bĂ©coise. Le 22 juin 1930, deux jours avant la fĂȘte nationale de la Saint-Jean-Baptiste, est inaugurĂ©e Ă  MontrĂ©al, entre le Palais de Justice et l'HĂŽtel de Ville de MontrĂ©al, une statue Ă  la mĂ©moire de l'officier de marine français Jean Vauquelin qui s'est illustrĂ© en tentant de reprendre aux Anglais la ville de QuĂ©bec. La construction de ce monument a Ă©tĂ© parrainĂ©e par la SociĂ©tĂ© Saint-Jean-Baptiste. Le choix de son emplacement n'est pas innocent la statue se dresse face Ă  la colonne de Nelson, comme pour dĂ©fier le vainqueur de Trafalgar. Au symbole de l'impĂ©rieuse domination britannique, l'Ă©lite quĂ©bĂ©coise oppose celui de la valeur française malheureuse. Dans le mĂȘme ordre d'idĂ©e, une statue de Jeanne d'Arc s'Ă©lĂšve Ă  QuĂ©bec, non loin de l'endroit oĂč Wolfe Ă  triomphĂ© de Montcalm. En 1931, dans le contexte de la grande dĂ©pression, le statut de Westminster, qui institue le Commonwealth, confĂšre la pleine souverainetĂ© au Canada, sans soulever l'enthousiasme. L'Ontario et le QuĂ©bec, qui craignent un pouvoir fĂ©dĂ©ral trop puissant, ne voient pas ce changement sans apprĂ©hension. La transition s'effectue trĂšs lentement la citoyennetĂ© canadienne n'est effective qu'en 1947 ; le drapeau qu'en 1965, et encore nombre de Canadiens anglais continuent-ils de dĂ©ployer devant leur maison l'Union Jack, Ă  cĂŽtĂ© du drapeau Ă  feuille d'Ă©rable qui a remplacĂ© le Red Ensign frappĂ© de l’Union-Jack ; l'hymne national, Ă©crit par un francophone, en 1980. En 1935, la crise pousse le gouvernement provincial Ă  prĂŽner le retour Ă  la terre. A cette Ă©poque la population rurale ne reprĂ©sente plus que 40% de la population de la province et, au cours du siĂšcle qui vient de s'Ă©couler, prĂšs d'un million de QuĂ©bĂ©cois sont partis chercher du travail aux Etats-Unis. De 1932 Ă  1937, Grosse-Île, toujours station de quarantaine pour immigrants, est frappĂ©e par des Ă©pidĂ©mies de cholĂ©ra et de typhus. La mortalitĂ© infantile a beaucoup diminuĂ© au QuĂ©bec mais elle reste Ă©levĂ©e 10% quoique dans la norme des pays dĂ©veloppĂ©s. L’Union nationale, un conservatisme nationaliste Des dissidents du Parti libĂ©ral de Taschereau crĂ©ent l'Action libĂ©rale nationale qui s'allie au Parti conservateur pour donner naissance Ă  l'Union nationale dont le chef, Maurice Duplessis 1890-1959, exerce le pouvoir de 1936 Ă  1939. Ce leader conservateur doit sa fortune politique Ă  sa dĂ©nonciation du favoritisme patronage en quĂ©bĂ©cois dont fait preuve le Parti libĂ©ral, ce qui ne l'empĂȘche pas ultĂ©rieurement d'ĂȘtre soupçonnĂ© lui aussi de tomber dans ce travers. Il se singularise d'emblĂ©e, dĂšs 1937, par la Loi du Cadenas », jugĂ©e anticonstitutionnelle, qui musĂšle la libertĂ© d'expression, pour lutter contre le communisme et le syndicalisme, favorisant ainsi objectivement le monde des affaires anglo-saxon, au dĂ©triment du monde du travail francophone, paradoxe curieux pour un nationaliste. En 1939, les armoiries et la devise du QuĂ©bec Je me souviens » sont adoptĂ©es ; le Parti libĂ©ral revient au pouvoir. Le premier ministre, AdĂ©lard Godbout 1892-1956, reconnaĂźt aux travailleurs le droit syndical. A la veille de la Seconde Guerre mondiale, beaucoup de QuĂ©bĂ©cois Ă©voluent vers le nationalisme, d'une part parce qu'ils y voient le seul moyen d'Ă©chapper Ă  l'assimilation des Francophones Ă  l'Ɠuvre dans les autres provinces et, d'autre part, parce que la crise leur dĂ©montre que le gouvernement provincial n'est pas dotĂ© de pouvoirs suffisants pour les protĂ©ger contre les alĂ©as Ă©conomiques. En 1940, Godbout, accorde aux femmes le droit de vote. Il applique une politique qui annonce, sous certains aspects, la rĂ©volution tranquille. Mais, la guerre va lui ĂȘtre fatale en ravivant les tensions autour de la conscription. La Seconde Guerre mondiale et la querelle autour du service militaire La guerre donne un coup de fouet salutaire Ă  l'Ă©conomie du QuĂ©bec mais elle fait ressurgir Ă  nouveau le clivage entre Canadiens anglais, favorables Ă  la participation au conflit, et Canadiens français peu disposĂ©s Ă  aller se faire tuer en Europe pour le roi d'Angleterre. Le premier ministre fĂ©dĂ©ral, Mackenzie King 1874-1950, promet aux QuĂ©bĂ©cois qu'ils ne seront pas enrĂŽlĂ©s contre leur grĂ©. La jeunesse montre Ă  sa façon le peu de confiance qu'elle accorde aux promesses du premier ministre fĂ©dĂ©ral une Ă©pidĂ©mie de mariages se rĂ©pand Ă  travers le QuĂ©bec ; les prĂȘtres en bĂ©nissent plusieurs par jour, les jeunes gens espĂšrent qu'on n'osera pas les arracher Ă  leur foyer. Pour lutter contre ce manque Ă©vident d'enthousiasme pour les travaux guerriers, la propagande britannique propage la peur, afin de susciter des vocations militaires ; on appose des affiches qui incitent la population Ă  se protĂ©ger contre les bombardements allemands, alors qu'aucun avion n'est encore capable d'effectuer le trajet Europe-AmĂ©rique dans les deux sens, mĂȘme si des sous-marins nazis rĂŽdent prĂšs des cĂŽtes canadiennes ; on parle mĂȘme d'appliquer la politique de la terre brĂ»lĂ©e en cas d'invasion ! Le dĂ©putĂ© maire de MontrĂ©al, Camille Houde 1889-1958, fermement opposĂ© au service militaire, est dĂ©portĂ© pendant quatre ans sans jugement dans un camp de concentration. En 1941 l'assurance chĂŽmage est instituĂ©e. En 1942, le gouvernement fĂ©dĂ©ral demande aux Canadiens de le relever par rĂ©fĂ©rendum de sa promesse faite aux QuĂ©bĂ©cois de ne pas les forcer Ă  participer au conflit. Les rĂ©sultats de la consultation sont Ă©loquents 71% des QuĂ©bĂ©cois rĂ©pondent nĂ©gativement 85% des Francophones, mais 80% des citoyens des autres provinces apportent leur soutien Ă  la proposition gouvernementale qui est ainsi adoptĂ©e. Les QuĂ©bĂ©cois vont donc fournir malgrĂ© eux une part non nĂ©gligeable de la chair Ă  canon de l'Empire Britannique. Combien resteront sur les plages de France, Ă  Dieppe 2753 morts canadiens et en Normandie ? La preuve est une fois de plus administrĂ©e que les Canadiens français ne peuvent plus faire entendre leur voix dans l'ensemble fĂ©dĂ©ral et le nationalisme quĂ©bĂ©cois en sort renforcĂ©. Henri Bourassa, bien qu'Ă  l'Ă©cart de la vie publique depuis des annĂ©es, appuie le Bloc populaire canadien, un parti politique quĂ©bĂ©cois de centre-gauche, dans son opposition Ă  la conscription. En 1943, le QuĂ©bec rĂ©clame la restitution du Labrador. La mĂȘme annĂ©e, la Sicile est conquise par les alliĂ©s 2344 morts canadiens ; entre le 18 et le 24 aoĂ»t, la ville de QuĂ©bec accueille Churchill et Roosevelt venus s'entretenir de la chute de l'Italie fasciste et de la suite Ă  donner Ă  la guerre, au ChĂąteau Frontenac, avec Mackenzie King. En 1944, un rĂ©gime d'aide aux familles est Ă©laborĂ© mais le libĂ©ral Godbout est battu par le conservateur Duplessis qui dĂ©tient dans son jeu l'atout maĂźtre nationaliste. L’époque de la Grande Noirceur QuĂ©bec" />AprĂšs la fin du conflit, le QuĂ©bec connaĂźt une pĂ©riode de prospĂ©ritĂ© Ă©conomique. Les revenus progressent, les conditions de travail s'amĂ©liorent et les QuĂ©bĂ©cois commencent Ă  accĂ©der au rĂȘve amĂ©ricain. Mais en mĂȘme temps, la pĂ©riode qui va de 1945 Ă  1960 est qualifiĂ©e de Grande Noirceur. Elle est dominĂ©e par la personnalitĂ© de Maurice Duplessis qui restera premier ministre jusqu'Ă  sa mort. Ultraconservateur au plan politique comme au plan Ă©conomique, favorable au grand capitalisme amĂ©ricain et aux milieux d'affaires, opposĂ© Ă  l'interventionnisme Ă©tatique, imprĂ©gnĂ© de morale religieuse Ă©troitement traditionaliste, il impose au QuĂ©bec un rĂ©gime qui s'apparente Ă  celui de Salazar au Portugal. Il maintient fermement l'enseignement et les soins de santĂ© aux mains du clergĂ©. Il fait peser sur la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise une chape de plomb. Mais sa politique n'est pas exempte de contradictions puisqu'il crĂ©e aussi un MinistĂšre de la SantĂ© et du Bien Etre social. En 1948, des artistes s'Ă©lĂšvent contre l'immobilisme de la sociĂ©tĂ© et dĂ©fendent l'idĂ©e d'une culture quĂ©bĂ©coise spĂ©cifique dans un manifeste qui fait date, Refus global », mĂȘme si sa diffusion reste limitĂ©e dans un premier temps. Les lettres et les arts quĂ©bĂ©cois se sont Ă©troitement inspirĂ©s du modĂšle français dans le passĂ©, mais ce n'est maintenant plus le cas des Ɠuvres originales Ă©mergent, la notoriĂ©tĂ© internationale des artistes quĂ©bĂ©cois en portera bientĂŽt le tĂ©moignage. Paul-Emile Borduas 1905-1960, un des rĂ©dacteurs du manifeste, est exclu de l'Ă©cole oĂč il enseignait ; il s'exile en France. Nationaliste, Duplessis conteste les ingĂ©rences dans la vie provinciale d'un pouvoir fĂ©dĂ©ral qui concentre entre ses mains l'essentiel des ressources fiscales 83% en 1945. C'est sous son rĂ©gime, en 1948, que le drapeau bleu Ă  croix blanche fleurdelisĂ© devient l'emblĂšme du QuĂ©bec et remplace le pavillon anglais au fronton des bĂątiments publics ; il a Ă©tĂ© choisi de prĂ©fĂ©rence au drapeau tricolore des patriotes, jugĂ© probablement provocateur et trop rĂ©volutionnaire. Dans cette atmosphĂšre conservatrice et clĂ©ricale, Ă  contre courant de l'Ă©volution du reste du monde, malgrĂ© des progrĂšs Ă©conomiques indĂ©niables, le QuĂ©bec, qui accumule les retards en matiĂšre d'Ă©ducation et d'Ă©volution des mƓurs, reste nĂ©anmoins un lieu attractif d'immigration. Des Français qui fuient une Europe en ruines, toujours menacĂ©e par de nouveaux conflits, et aussi, plus tard des orphelins de la dĂ©colonisation, viennent y tenter leur chance. Ils n'y sont pas toujours bien accueillis. On reproche a ces ressortissants d'un pays jugĂ© bien petit, depuis la dĂ©faite de 1940, leur langage prĂ©cieux, leur inconcevable fatuitĂ© et surtout le fait qu'ils enlĂšvent des emplois aux enfants d'une contrĂ©e oĂč le chĂŽmage est structurellement Ă©levĂ© pendant la mauvaise saison. Certains talents sont cependant recherchĂ©s les mĂ©caniciens automobile, par exemple. De plus, les QuĂ©bĂ©cois gardent toujours une dent contre la France qui les a abandonnĂ©s deux siĂšcles plus tĂŽt. En 1949, une grĂšve dans les mines d'amiante se prolonge pendant cent trente huit jours ; elle aura un impact important sur les conditions de travail dans l'industrie miniĂšre. En 1952, la TĂ©lĂ©vision fait son apparition. En 1954, Duplessis crĂ©e un impĂŽt provincial sur le revenu. En 1955, une Ă©meute Ă©clate au Forum de MontrĂ©al ; le prĂ©sident de la Ligue nationale de hockey, Clarence Sutherland Campbell 1905-1984, qui a suspendu un joueur prestigieux, Maurice Richard 1921-2000, idole du public quĂ©bĂ©cois, est violemment pris Ă  partie par la foule en colĂšre. Ce mouvement d'humeur, assorti de jet de projectiles divers, est significatif de la tension qui rĂšgne entre les deux communautĂ©s Richard est un quĂ©bĂ©cois qui a rĂ©ussi et qui tient la dragĂ©e haute aux Anglophones dont Campbell est le reprĂ©sentant symbolique. Par association, un ingrĂ©dient alimentaire fera par la suite les frais de la vindicte populaire la sauce Campbell verra ses ventes chuter ! La rĂ©volution tranquille En 1960, le parti libĂ©ral gagne les Ă©lections et son chef, Jean Lesage 1912-1980, devient premier ministre du QuĂ©bec. Il inaugure une Ăšre de grands changements. Sous l'influence des sĂ©ries tĂ©lĂ©visĂ©es venues des Etats-Unis, la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise est en train d'accentuer son amĂ©ricanisation. Le dĂ©veloppement Ă©conomique, qui s'inscrit dans le prolongement des tendances antĂ©rieures, est propice Ă  la gĂ©nĂ©rositĂ©. Une relative abondance des ressources fiscales permet d'envisager des rĂ©formes sociales, notamment dans le domaine du bien ĂȘtre social et de l'assistance maladie. Mais les entreprises restent largement aux mains d'investisseurs Ă©trangers. En 1961, seulement 7% d'entre elles sont sous le contrĂŽle de QuĂ©bĂ©cois. C'est dans ce contexte que s'inscrit la rĂ©volution tranquille, en contrepoint Ă  la pĂ©riode d'immobilitĂ© de Duplessis. Sous le signe du changement, d'ambitieuses rĂ©formes sont lancĂ©es en matiĂšre de politique sociale, d'Ă©ducation, de santĂ© et de dĂ©veloppement Ă©conomique. Pour rĂ©duire l'emprise extĂ©rieure sur l'Ă©conomie, le gouvernement provincial Ă©labore un vaste programme de nationalisations sous l'Ă©gide du slogan MaĂźtres chez nous » visant Ă  rĂ©duire la suprĂ©matie des milieux d'affaires anglo-saxons et protestants. Des institutions financiĂšres Ă©tatiques sont créées, comme la Caisse de DĂ©pĂŽt et de Placement du QuĂ©bec et la SociĂ©tĂ© GĂ©nĂ©rale de Financement. Mais la mesure emblĂ©matique de l'Ă©poque est l'acquisition par l'Hydro-QuĂ©bec, fondĂ©e en 1944, de tous les distributeurs d'Ă©lectricitĂ© de la province, Ă  la suite d'une Ă©lection anticipĂ©e, jouĂ©e sur cette question, par les libĂ©raux qui sont reconduits au pouvoir. C’est aussi Ă  cette Ă©poque, entre 1962 et 1966, que les premiĂšres lignes du mĂ©tro de MontrĂ©al sont amĂ©nagĂ©es. Un effort particulier est consenti en faveur de l'Ă©ducation qui se laĂŻcise ; un ministĂšre de l'Education est créé, des commissions scolaires voient le jour, l'enseignement secondaire est dĂ©veloppĂ© par l'institution des CEGEP ; pour accompagner cette rĂ©novation, de nombreux enseignants français viennent effectuer au QuĂ©bec l'Ă©quivalent de leur service militaire, dans le cadre de la coopĂ©ration. L'existence d'une culture quĂ©bĂ©coise spĂ©cifique est Ă  nouveau revendiquĂ©e et on exige qu'elle ait enfin toute la place qui devrait lui revenir, quoi qu'en pense le monde anglo-saxon. Les valeurs traditionnelles sont remises en question, des interdits sont levĂ©s et la religion est en recul dans une population qui lui Ă©tait jusqu'Ă  prĂ©sent Ă©troitement soumise. Cette Ă©volution entraĂźne une forte baisse de la natalitĂ© les familles nombreuses, qui Ă©taient jadis la rĂšgle, deviennent l'exception. En 1964, les femmes obtiennent la capacitĂ© de signer des actes juridiques sans l'autorisation de leur mari. En rĂ©sumĂ©, on pourrait dire que la rĂ©volution tranquille consiste en l'avĂšnement d'un Etat-Providence moderne et laĂŻc, enfin Ă©mancipĂ© des influences religieuses. L'Ă©ducation et la charitĂ© chrĂ©tienne cĂšdent la place Ă  l'instruction laĂŻque et aux institutions sociales. Cette transformation rĂ©volutionnaire est indĂ©niablement la consĂ©quence des pressions accumulĂ©es depuis longtemps du fait de l'affaiblissement du monde rural au profit du monde urbain, pressions qui se sont accentuĂ©es du temps de la Grande Noirceur. Ajoutons qu'elle s'effectue dans un contexte extĂ©rieur caractĂ©risĂ© par d'importants changements sociĂ©taux, en Europe comme en AmĂ©rique. En matiĂšre de politique extĂ©rieure, elle dĂ©bouche sur une utilisation plus intense des marges de manƓuvre qu'offre aux provinces la Constitution canadienne pour nouer des relations avec des Etats Ă©trangers par le biais de dĂ©lĂ©gations gĂ©nĂ©rales. Cette transformation de la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise suscite l'incomprĂ©hension du gouvernement fĂ©dĂ©ral. En 1963, le premier ministre fĂ©dĂ©ral, Lester B. Pearson 1897-1972, pose la question Que veut le QuĂ©bec ? » et, pour tenter d'y rĂ©pondre, il crĂ©e une Commission royale d'enquĂȘte sur le bilinguisme et le biculturalisme. Les travaux de cette Commission aboutissent Ă  un Ă©chec qui ne fait que mettre en lumiĂšre le fossĂ© qui sĂ©pare les deux communautĂ©s. La montĂ©e du mouvement indĂ©pendantiste le concept de NĂšgres blancs d’AmĂ©rique Les Anglophones se montrent hostiles Ă  toute concession accordĂ©e aux Francophones qui prĂ©cĂšderait Ă  leurs yeux l'Ă©clatement de la ConfĂ©dĂ©ration et qui mettrait en question leur prĂ©dominance Ă©conomique. Du cĂŽtĂ© des Francophones, dans le contexte international de la dĂ©colonisation, le souverainisme quĂ©bĂ©cois Ă©volue vers la revendication de l'indĂ©pendance. Des partis politiques sĂ©cessionnistes se constituent, dĂšs 1960 Le Ralliement national RN et le Rassemblement pour l'indĂ©pendance nationale RIN. Au dĂ©but des annĂ©es 1960, une fraction des indĂ©pendantistes se radicalise et fonde le Front de LibĂ©ration du QuĂ©bec FLQ qui considĂšre que le QuĂ©bec est un pays colonisĂ© par les Anglais depuis la conquĂȘte et que seule la lutte armĂ©e permettra sa libĂ©ration, d'oĂč l'organisation d'une ArmĂ©e de LibĂ©ration du QuĂ©bec ALQ ; des attentats sont commis et l'idĂ©ologue du mouvement, Pierre ValliĂšres 1938-1998, dans une autobiographie qu'il rĂ©dige en prison, affirme que les QuĂ©bĂ©cois sont les NĂšgres blancs d'AmĂ©rique. Cette assimilation du QuĂ©bec Ă  un pays Ă  dĂ©coloniser trouve en partie son origine dans le dĂ©classement social d’une grande partie des Francophones et aussi dans le fait que la province est encore en retard en matiĂšre d’industrialisation, malgrĂ© les changements intervenus, et que son Ă©conomie est encore trop largement tournĂ©e vers l’exportation de matiĂšres premiĂšres transformĂ©es ailleurs. Jusqu'Ă  prĂ©sent, si l'ont met Ă  part les tentatives du 19Ăšme siĂšcle plus ou moins inspirĂ©es par la RĂ©volution Française, le nationalisme quĂ©bĂ©cois a plutĂŽt Ă©tĂ© l'apanage du conservatisme ; maintenant ce sont les partisans du mouvement qui l'incarnent ; l'esprit de conquĂȘte l'emporte sur l'esprit de rĂ©sistance. La figure du patriote de 1838 Ă©merge Ă  nouveau des brumes de l'histoire et son drapeau tricolore sort des poches des plus dĂ©terminĂ©s. En 1964, Ă  l'occasion d'une visite de la reine Elisabeth II, une foule inoffensive est brutalement dispersĂ©e Ă  coups de matraques. En 1965, sous la pression du QuĂ©bec, le gouvernement fĂ©dĂ©ral autorise le retrait d'une province d'un programme fĂ©dĂ©ral avec compensation. Aux Ă©lections de 1966, bien que le Parti libĂ©ral soit vainqueur en voix, c'est l'Union nationale qui remporte le plus grand nombre de siĂšge et Daniel Johnson 1915-1968 prend la tĂȘte du gouvernement. Mais l'Ă©lan est donnĂ© et les rĂ©formes vont se poursuivre. En 1967, le GĂ©nĂ©ral de Gaulle reçoit, de QuĂ©bec Ă  MontrĂ©al, sur le Chemin du Roy, un accueil triomphal. Au balcon de l'HĂŽtel de Ville de la seconde ville francophone du monde, l'enthousiasme de la foule lui rappelant la libĂ©ration de Paris, il ne peut retenir un retentissant Vive le QuĂ©bec libre » qui est aussitĂŽt interprĂ©tĂ©, par les deux camps, d'une maniĂšre qui dĂ©passe probablement sa pensĂ©e. Pour les fĂ©dĂ©ralistes, c'est une insupportable ingĂ©rence dans les affaires intĂ©rieures canadiennes ; pour les sĂ©paratistes, c'est un appel Ă  l'indĂ©pendance lancĂ© par le prĂ©sident de la vieille mĂšre-patrie et cet appel est perçu comme un encouragement Ă  intensifier la lutte. Un ministre libĂ©ral, RenĂ© LĂ©vesque 1922-1987, qui estime que le QuĂ©bec n'a aucun avenir dans le cadre fĂ©dĂ©ral, quitte son parti pour fonder le Mouvement SouverainetĂ©-Association. Cet homme politique charismatique, l'un des artisans des rĂ©formes, jouit d'une Ă©norme popularitĂ© et RenĂ© la Cigoune la cigarette, comme on le surnomme familiĂšrement, grand fumeur devant l'Ă©ternel, n'a pas fini de faire parler de lui. La mĂȘme annĂ©e, d'avril Ă  octobre, se tient l'Exposition universelle de MontrĂ©al ; elle accueille plus de 50 millions de visiteurs j'y Ă©tais. En 1968, Radio-QuĂ©bec et l'UniversitĂ© du QuĂ©bec sont créées. La mĂȘme annĂ©e, 290 personnes sont arrĂȘtĂ©es Ă  MontrĂ©al pendant le dĂ©filĂ© de la Saint-Jean Baptiste ; les partis souverainistes fusionnent pour donner naissance au Parti quĂ©bĂ©cois sous l'autoritĂ© de RenĂ© LĂ©vesque. En 1969, pour tenter de retenir le QuĂ©bec dans la ConfĂ©dĂ©ration, Pierre Eliott Trudeau 1919-2000, premier ministre du Canada, fait adopter une loi qui rend le bilinguisme officiel dans les institutions fĂ©dĂ©rales ; le recrutement de fonctionnaires francophones s'en trouve facilitĂ©. La mĂȘme annĂ©e, le projet de loi 63, qui met Ă  Ă©galitĂ© le français et l'anglais au QuĂ©bec, suscite de nombreuses manifestations hostiles et la crĂ©ation d'un Front commun du QuĂ©bec français qui rĂ©clame l'usage unique du français dans la province, Ă  tous les niveaux. AprĂšs de violents incidents, les manifestations sont interdites par le maire de MontrĂ©al, Jean Drapeau 1916-1999. A l'issue de la rĂ©volution tranquille, force est de constater que les QuĂ©bĂ©cois ne sont plus des Français vivants en AmĂ©rique du Nord, mais bel est bien un peuple amĂ©ricain nouveau, qui s'est forgĂ© une identitĂ© nationale spĂ©cifique, notamment Ă  partir de la prĂ©servation sourcilleuse de sa langue maternelle, mais pas seulement. La revendication culturelle quĂ©bĂ©coise s'adresse aussi bien Ă  la France qu'Ă  l'Angleterre. La loi sur les mesures de guerre En 1970, la montĂ©e du nationalisme dans la jeunesse est manifeste. Des personnes fortunĂ©es s'affolent et transfĂšrent des fonds importants en Ontario. Le Parti quĂ©bĂ©cois obtient 23% des voix contre 8% aux partis indĂ©pendantistes 4 ans plus tĂŽt. Le Parti libĂ©ral de Robert Bourassa 1933-1996 retrouve le pouvoir, aprĂšs avoir battu l'Union nationale, qui dirigeait la province depuis 1966. Bourassa est fĂ©dĂ©raliste, mais il admet que la ConfĂ©dĂ©ration doit ĂȘtre rĂ©formĂ©e et milite pour que les droits des QuĂ©bĂ©cois soient respectĂ©s. Il fait d'ailleurs adopter une loi la loi 22, en 1974, qui dĂ©clare le français langue officielle du QuĂ©bec, tout en reconnaissant deux langues nationales le français et l'anglais ; cette mesure ne satisfait ni les Anglophones, qui se sentent lĂ©sĂ©s, ni les Francophones, qui l'estiment insuffisante. Il institue Ă©galement l'assurance-maladie 1970, malgrĂ© l'opposition d'une partie des mĂ©decins, les allocations familiales 1973, l'aide juridique 1973 et la Charte des droits et libertĂ©s de la personne 1975. Il s'intĂ©resse aux femmes qui sont autorisĂ©es Ă  faire partie des jurĂ©s, aprĂšs que 7 d'entre elles aient chahutĂ© une audience ; il crĂ©e un Conseil du statut de la femme. Par ailleurs, Bourassa lance le projet hydroĂ©lectrique de la Baie James, malgrĂ© l'opposition des indiens Cris soutenus par les dĂ©fenseurs de l'environnement. Il travaille aussi efficacement, avec le maire de MontrĂ©al, Jean Drapeau, Ă  la prĂ©paration des Jeux Olympiques d'Ă©tĂ©, qui se tiendront en 1976 dans la mĂ©tropole canadienne. Mais l'Ă©vĂ©nement majeur de son premier mandat est la Loi sur les mesures de guerre. Peu aprĂšs son Ă©lection, Ă  l'automne 1970, le FLQ passe Ă  l'attaque en enlevant deux personnes un diplomate britannique, James Cross nĂ© en 1921, et surtout le ministre du Travail du gouvernement provincial, Pierre Laporte 1921-1970 qui est retrouvĂ© assassinĂ©. Ces enlĂšvements soulĂšvent une grande Ă©motion dans le pays et creusent encore un peu plus le fossĂ© qui s'Ă©largit entre les communautĂ©s. Je me souviens avoir vu Ă  cette Ă©poque, dans un village anglophone, un Ă©criteau sur lequel on lisait Maison Ă  vendre mais pas Ă  des Français » ! Le gouvernement provincial sollicite l'intervention du gouvernement fĂ©dĂ©ral qui dĂ©ploie des mesures militaires disproportionnĂ©es. L'armĂ©e canadienne prend le contrĂŽle de la province ; quatre cent cinquante sept personnalitĂ©s souverainistes sont arrĂȘtĂ©es, dont la chanteuse Pauline Julien 1928-1998, par la gendarmerie royale, dans des conditions contestables. Cette effervescence se calme assez rapidement, aprĂšs le dĂ©part vers Cuba des preneurs d'otages qui ont libĂ©rĂ© Cross. Mais Bourassa se heurte Ă  l'intransigeance du premier ministre du Canada, Pierre Eliott Trudeau 1919-2000, pourtant lui aussi libĂ©ral et d'origine quĂ©bĂ©coise, mais parfaitement bilingue et farouche partisan de l'unitĂ© du Canada. La situation constitutionnelle est gelĂ©e, ce qui ne peut que favoriser les indĂ©pendantistes. Aussi, aux Ă©lections suivantes, en 1976, le Parti quĂ©bĂ©cois accĂšde-t-il au pouvoir ; RenĂ© LĂ©vesque devient premier ministre du QuĂ©bec. Le Parti quĂ©bĂ©cois au pouvoir Le Parti quĂ©bĂ©cois a promis de ne pas proclamer l'indĂ©pendance sans consulter au prĂ©alable la population par rĂ©fĂ©rendum. En dehors de cette prĂ©caution, qui a sans doute levĂ© bien des rĂ©ticences, il proposait un programme social-dĂ©mocrate assorti de la protection des droits des Francophones qui sera largement appliquĂ©. La mesure phare de ce premier mandat est la loi sur la protection de la langue française Loi 101, votĂ©e en 1977, qui a valeur quasiment constitutionnelle et qui renforce les dispositions de la Loi 22 de 1974. Cette loi fera l'objet de nombreuses discussions et de recours devant les juridictions canadiennes qui amĂšneront un futur gouvernement provincial libĂ©ral Ă  l'amender. DĂ©criĂ©e par les Anglophones, elle met pourtant fin Ă  une anomalie dans les faits, le QuĂ©bec Ă©tait la seule province Ă  devoir pratiquer le bilinguisme. Cette situation s'avĂ©rait facteur d'injustice, au dĂ©triment des Francophones, dans la mesure oĂč les entreprises, majoritairement dirigĂ©es par des Anglo-saxons, privilĂ©giaient naturellement, au moment de l'embauche, les candidats parlant le mieux l'anglais. La loi offre ainsi des dĂ©bouchĂ©s aux Francophones, dont le taux de chĂŽmage est plus Ă©levĂ© que celui des Anglophones, surtout depuis les crises pĂ©troliĂšres du milieu des annĂ©es 1970, car les entreprises ont dĂ©sormais intĂ©rĂȘt Ă  rĂ©diger leurs documents en bon français. En rĂ©alitĂ©, depuis dĂ©jĂ  plusieurs annĂ©es, le mouvement Ă©tait amorcĂ© par les consommateurs quĂ©bĂ©cois qui avaient tendance Ă  boycotter les produits trop ouvertement anglo-saxons. Beaucoup de Francophones se sentent dĂ©sormais d'abord QuĂ©bĂ©cois et ils reprennent les Ă©trangers qui, peu au courant des subtilitĂ©s de la politique locale, les traitent de Canadiens. Leur capitale nationale, c'est QuĂ©bec, Ottawa n'est plus que la capitale fĂ©dĂ©rale. Entre 1976 et aujourd'hui, le Parti quĂ©bĂ©cois et le Parti libĂ©ral se partagent le pouvoir. L'union nationale conservatrice a Ă©tĂ© laminĂ©e avant de disparaĂźtre. Mais, au dĂ©but des annĂ©es 1990, un nouveau parti souverainiste entre en scĂšne l'Action dĂ©mocratique de Mario Dumont. A certaines pĂ©riodes, le Parti quĂ©bĂ©cois, fort de l'importance Ă©lectorale du QuĂ©bec, qui vote massivement pour les candidats francophones, reprĂ©sente l'opposition officielle au parlement d'Ottawa ; cette situation paradoxale donne l'occasion aux indĂ©pendantistes de dialoguer avec leurs opposants au sein mĂȘme des instances canadiennes et sans doute de faire tomber bien des prĂ©ventions. Le rapatriement de la Constitution et la querelle institutionnelle En 1981, Pierre Eliott Trudeau envisage de rapatrier la Constitution canadienne qui relĂšve toujours du Parlement britannique. Les discussions entre les provinces font apparaĂźtre de sĂ©rieuses divergences. Trudeau rĂšgle le problĂšme, en l'absence de RenĂ© LĂ©vesque, tenu volontairement Ă  l'Ă©cart, avec les autres chefs des gouvernements provinciaux, au cours d'une nuit qui a Ă©tĂ© qualifiĂ© de Nuit des Longs Couteaux. Ce procĂ©dĂ© inqualifiable est durement ressenti au QuĂ©bec qui votait jusqu'Ă  prĂ©sent pour le Parti libĂ©ral aux Ă©lections fĂ©dĂ©rales. Trudeau rĂ©duit les prĂ©rogatives du QuĂ©bec en matiĂšre de langue et d'Ă©ducation. En mettant le QuĂ©bec au rang d'une province comme les autres, il biffe 117 ans d'histoire et renonce au concept des deux peuples fondateurs. Aux Ă©lections fĂ©dĂ©rales suivantes, la sanction tombe les libĂ©raux sont battus. En 1982, la Grande-Bretagne autorise le rapatriement de la Constitution. Le Canada est indĂ©pendant et promulgue une nouvelle Constitution dont il n'existe qu'une version anglaise, puisque le QuĂ©bec n'est pas d'accord, mais Ă  laquelle il est tout de mĂȘme assujetti, imbroglio juridique gros de contradictions futures. En 1984, un militaire ouvre le feu dans les locaux de l'AssemblĂ©e nationale Ă  QuĂ©bec et tue trois personnes pour des raisons personnelles qui n'ont rien Ă  voir avec la politique. En 1985, Robert Bourassa revient au pouvoir. Il utilise une argutie juridique pour passer outre Ă  un jugement de la Cour suprĂȘme du Canada qui dĂ©clarait inconstitutionnelles des dispositions de la Charte de la langue française ; cette manƓuvre du chef du gouvernement quĂ©bĂ©cois entraĂźne la dĂ©mission de ministres anglophones. Robert Bourassa s'affirme partisan d'une sociĂ©tĂ© distincte pour le QuĂ©bec. En 1986, le gouvernement libĂ©ral du QuĂ©bec, Ă©nonce cinq conditions pour que la province signe la Constitution canadienne 1°- Reconnaissance du QuĂ©bec comme sociĂ©tĂ© distincte. 2°- Droit de vĂ©to sur tout changement constitutionnel. 3°- Garanties sur la nomination des juges Ă  la Cour suprĂȘme 1/3 doivent ĂȘtre quĂ©bĂ©cois. 4°- Compensations financiĂšres aux provinces qui refusent de participer aux programmes fĂ©dĂ©raux. 5°- Prise en charge de l'immigration sur son territoire par le QuĂ©bec. Une entente paraĂźt possible. Robert Bourassa participe Ă  une tentative de rĂ©forme constitutionnelle avec le gouvernement fĂ©dĂ©ral et les autres provinces ; la nĂ©gociation avorte. D'autres tentatives de rĂ©formes constitutionnelles auront encore lieu plus tard, sans rĂ©sultat, ce qui fournit des arguments aux partisans de l'indĂ©pendance. Ces querelles institutionnelles montrent que la revendication d’une spĂ©cificitĂ© quĂ©bĂ©coise dĂ©passe largement le camp des souverainistes et qu’il est l’expression de la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise dans son ensemble. Mais le QuĂ©bec se trouve isolĂ© car les habitants des autres provinces, quelle que soit leur origine, immigrĂ©s de date plus rĂ©cente, ont adhĂ©rĂ© aux valeurs anglo-saxonnes, du fait mĂȘme de leur immigration, et ils ne comprennent pas que les QuĂ©bĂ©cois, Ă  qui ces valeurs sont imposĂ©es, puissent les rejeter. En 1988, la Cour suprĂȘme du Canada ayant invalidĂ© des dispositions de la Loi 101, Robert Bourassa fait adopter un texte qui restreint l'affichage bilingue ; plusieurs dizaines de milliers de personnes descendent dans la rue pour dĂ©fendre la Loi 101. En 1989 un tireur fou misogyne tue quatorze jeunes femmes Ă  l'Ecole Polytechnique de MontrĂ©al. Les barricades d’Oka En 1990, les Mohawks Agniers d'Oka affrontent les Blancs, la police provinciale et l'armĂ©e canadienne ; cette crise est rĂ©vĂ©latrice des frustrations ressenties par les Autochtones et de l’hostilitĂ© dont fait preuve une partie de la population blanche Ă  leur encontre. Elle a Ă©clatĂ©e Ă  propos de l'agrandissement d'un terrain de golf sur un cimetiĂšre ancestral des Indiens. Elle a Ă©tĂ© marquĂ©e par l'Ă©rection de barricades, des actes de violence armĂ©e, la mort d'un policier et aussi une manifestation de Blancs qui ont brĂ»lĂ© un Mohawk en effigie aux cris de le QuĂ©bec aux QuĂ©bĂ©cois ». C’est le chef du Parti quĂ©bĂ©cois, Jacques Parizeau nĂ© en 1930, alors dans l’opposition, qui a poussĂ© le premier ministre libĂ©ral, Robert Bourassa, Ă  rĂ©clamer l’intervention de l’armĂ©e canadienne. En 1994, le Parti QuĂ©bĂ©cois revient au pouvoir, pour le reperdre en 2003. Depuis la rĂ©volution tranquille, les chocs pĂ©troliers en 1973-1974 et en 1979, la mondialisation et un accord de libre-Ă©change, l'Alena, conclu entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique, en 1992, ont modifiĂ© la donne Ă©conomique et sociale. Les ressources budgĂ©taires ont diminuĂ©; la concurrence a fait pression sur les salaires ; la prĂ©caritĂ© des travailleurs s'est accrue. Le gouvernement provincial a perdu une grande partie de sa capacitĂ© d'intervention dans le domaine Ă©conomique et le Parti quĂ©bĂ©cois, de grĂ© ou de force, s'est converti au libĂ©ralisme. Si le Canada a participĂ© Ă  la premiĂšre guerre d’Irak, en 1991, le QuĂ©bec s’est montrĂ© plus rĂ©servĂ© que le reste du Canada. En 2003, le gouvernement du Canada refuse de participer Ă  l’invasion de l’Irak sans un mandat des Nations Unies. Mais, lĂ  encore, l’opposition du QuĂ©bec Ă  la guerre se montre plus dĂ©terminĂ©e. A MontrĂ©al une manifestation monstre rĂ©unit plus de 150000 personnes faisant de ce dĂ©filĂ© le plus important du monde, compte tenu de la population de la province. Les rĂ©fĂ©rendums Pendant qu'il dirigeait le QuĂ©bec, conformĂ©ment Ă  ses promesses, le Parti quĂ©bĂ©cois a soumis aux Ă©lecteurs deux rĂ©fĂ©rendums d'inspiration sĂ©paratiste. Les deux ont Ă©tĂ© rejetĂ©s. Le premier, soutenu par RenĂ© LĂ©vesque, en 1980, proposait une nouvelle entente QuĂ©bec-Canada, d'Ă©gal Ă  Ă©gal, qualifiĂ©e de souverainetĂ©-association ; elle a Ă©tĂ© repoussĂ©e par prĂšs de 60% des votants, mais aprĂšs que Pierre Elliott Trudeau se soit engagĂ© Ă  rĂ©former la Constitution. Le second, en 1995, initiĂ© par le premier ministre Jacques Parizeau, chef du Parti quĂ©bĂ©cois, a Ă©tĂ© soutenu par Lucien Bouchard nĂ© en 1938, chef de l'opposition Ă  la Chambre des Communes d'Ottawa Bloc quĂ©bĂ©cois et par Mario Dumont nĂ© en 1970, chef de l'Union dĂ©mocratique du QuĂ©bec. Il proposait la souverainetĂ© du QuĂ©bec assortie d'un nouveau partenariat Ă©conomique et politique avec le Canada. Il a Ă©tĂ© repoussĂ© de justesse par moins de 51% des Ă©lecteurs. En commentant ce dernier rĂ©sultat, Parizeau Ă  imputĂ© au vote ethnique son Ă©chec de justesse. Cette formulation a soulevĂ© la rĂ©probation des rĂ©dactions, en raison de sa connotation raciste. Cependant, rien n'Ă©tait moins vrai. En effet, les QuĂ©bĂ©cois de souche se sont prononcĂ©s trĂšs majoritairement en faveur du projet, d'abord pour sortir de l'impasse oĂč l'impossibilitĂ© de rĂ©former la Constitution fĂ©dĂ©rale les enferme mais aussi pour cesser enfin de rendre les instances fĂ©dĂ©rales toujours responsables de leurs malheurs. C'est bien le vote anglophone qui a déçu, une fois de plus, l'attente des descendants des colons français, qu'il soit le fait des hĂ©ritiers des Loyalistes ou celui des immigrants plus rĂ©cents. On peut donc comprendre la rancƓur des partisans du Oui et leurs rĂ©ticences Ă  l'encontre d'une immigration qui menace manifestement leur identitĂ©. De plus, selon certains observateurs, les rĂ©sultats du rĂ©fĂ©rendum seraient entachĂ©s d'irrĂ©gularitĂ©s, en raison d'un financement illĂ©gal des partisans du Non. Mais le mĂȘme reproche pourrait ĂȘtre adressĂ© au premier rĂ©fĂ©rendum dont la propagande des adversaires du projet a Ă©tĂ© largement financĂ©e par le pouvoir fĂ©dĂ©ral. Quoi qu'il en soit, aprĂšs ce second Ă©chec, Mario Dumont a demandĂ© qu'il n'y ait pas d'autre consultation avant dix ans. Ajoutons que, en 1992, les QuĂ©bĂ©cois, comme d'ailleurs les autres Canadiens, ont aussi rejetĂ© un projet de rĂ©forme de la Constitution canadienne. L'avenir du QuĂ©bec reste donc en suspens et ce n'est bon ni pour le Canada, ni pour la Belle Province, toujours en proie Ă  des vellĂ©itĂ©s rentrĂ©es d'Ă©mancipation. Les divergences d’interprĂ©tation des textes A la suite des rĂ©sultats extrĂȘmement serrĂ©s du dernier rĂ©fĂ©rendum, une loi canadienne conditionne la sĂ©cession d'une province Ă  la clartĂ© dans la formulation de la question rĂ©fĂ©rendaire et Ă  l'expression significative d'une majoritĂ© des votants. Ce texte laisse planer un refus de discussion du gouvernement fĂ©dĂ©ral dans le cas d'une question estimĂ©e biaisĂ©e ou dans celui d'une majoritĂ© jugĂ©e insuffisante. Ces dispositions n'Ă©tant pas du goĂ»t du QuĂ©bec, une loi quĂ©bĂ©coise a Ă©galement vu le jour ; elle met l'accent sur le droit Ă  l'autodĂ©termination, reconnu Ă  tous les peuples en droit international public, elle Ă©nonce le principe qu'une majoritĂ© simple suffi pour exprimer clairement la volontĂ© du peuple et revendique l'intĂ©gritĂ© territoriale de la province. En 1996, les QuĂ©bĂ©cois du Parti libĂ©ral du Canada ont proposĂ© de remplacer le concept de sociĂ©tĂ© distincte par celui de Foyer principal de la langue et de la culture française en AmĂ©rique. Cette proposition, considĂ©rĂ©e comme une manƓuvre, a soulevĂ© une tempĂȘte de protestations au QuĂ©bec oĂč des Anglophones appelaient au boycott des magasins qui n'affichaient pas en anglais. La nomination d'un lieutenant-gĂ©nĂ©ral du QuĂ©bec, qui avait traitĂ© les souverainistes de fascistes, a jetĂ© de l'huile sur le feu et le haut fonctionnaire trop bavard a dĂ» dĂ©missionner, aprĂšs la rĂ©vĂ©lation de son passĂ© antisĂ©mite ! En 1997, le gouvernement fĂ©dĂ©ral s'est opposĂ© Ă  rouvrir le dĂ©bat constitutionnel tant que le QuĂ©bec serait gouvernĂ© par les souverainistes, en dĂ©pit des dispositions de la Constitution de 1982 qui imposait un dĂ©bat Ă  cette date. Des discussions ont tout de mĂȘme Ă©tĂ© amorcĂ©es afin d'adopter une version française de ladite Constitution. Au niveau du Canada, on assiste Ă  une provincialisation des partis Parti rĂ©formiste dans les provinces de l'Ouest, Parti libĂ©ral en Ontario, Bloc quĂ©bĂ©cois au QuĂ©bec, Parti conservateur dans les Maritimes qui met en lumiĂšre la fragilitĂ© de l'unitĂ© canadienne. Le premier ministre du Canada, Joseph-Jacques-Jean ChrĂ©tien nĂ© en 1934, a fait planer la menace d'une partition du QuĂ©bec dans le cas d'un vote favorable Ă  l'indĂ©pendance. En 1998, la Cour suprĂȘme du Canada a dĂ©cidĂ©, qu'en cas de rĂ©ponse positive Ă  un rĂ©fĂ©rendum d'indĂ©pendance, le gouvernement fĂ©dĂ©ral est tenu de nĂ©gocier cette issue avec le gouvernement provincial. FĂ©dĂ©ralistes et souverainistes interprĂštent diffĂ©remment cet arrĂȘt pourtant clair. La constitutionnalitĂ© d'une Ă©ventuelle sĂ©cession constitue un terrain potentiel d'affrontements entre partisans et adversaires du fĂ©dĂ©ralisme. En 1999, l'Union sociale, signĂ©e entre le gouvernement fĂ©dĂ©ral et les provinces, sauf le QuĂ©bec, a privĂ© ce dernier d'une partie de ses prĂ©rogatives dans le domaine social. En outre, un projet de loi fĂ©dĂ©ral prĂ©voit, qu'en cas d'accession Ă  la souverainetĂ© d'une province, ses frontiĂšres devraient ĂȘtre renĂ©gociĂ©es. Au dĂ©but du 21Ăšme siĂšcle, le Parti quĂ©bĂ©cois semble en recul au profit du Parti libĂ©ral et de l'Action dĂ©mocratique. L’indĂ©pendance option rĂ©aliste ou chimĂšre ? Une question mĂ©rite d'ĂȘtre posĂ©e, c'est celle de savoir si un QuĂ©bec indĂ©pendant constituerait une entitĂ© viable dans le monde d'aujourd'hui. En toute objectivitĂ©, il est difficile de rĂ©pondre nĂ©gativement. Le QuĂ©bec est trois fois grand comme la France ; sa population s'Ă©lĂšve Ă  7,8 millions d'habitants 25% de la population du Canada alors que celle de la NorvĂšge est Ă  peine supĂ©rieure Ă  4,6 millions ; ses ressources en eau douce, en Ă©nergie Ă©lectrique, en bois et en minerais sont immenses. Les QuĂ©bĂ©cois vivraient-ils mieux dans un pays indĂ©pendant ? C’est une autre question Ă  laquelle chacun rĂ©pond davantage avec son cƓur qu’avec sa raison. Le Canada, ce pays dĂ©mesurĂ© semble fragile et quelque peu artificiel sa population ne dĂ©passe pas 31 millions d’habitants ; cette population, formĂ©e au cours du temps d'apport divers, ne paraĂźt pas dotĂ©e d'une conscience nationale Ă  toute Ă©preuve ; sauf exceptions, elle se concentre sur une bande relativement Ă©troite mais trĂšs longue, en bordure de la frontiĂšre des Etats-Unis, de sorte que les Ă©changes s'effectuent moins dans le sens est-ouest, Ă  l'intĂ©rieur du pays, que dans le sens nord-sud, chaque province commerçant d'abord avec l'Etat voisin des Etats-Unis ; QuĂ©bec est Ă  peine plus Ă©loignĂ© de Paris que de Vancouver ! Depuis la rĂ©volution tranquille, les mentalitĂ©s ont Ă©voluĂ© et il faut prendre cela en considĂ©ration. Le monde des affaires Ă©tait autrefois aux mains des Anglo-saxons ; c'est de moins en moins vrai. Les Francophones Ă©taient cultivateurs, petits commerçants, employĂ©s de bureau, ouvriers ou, pour les plus instruits, membres du clergĂ© et des professions libĂ©rales mĂ©decins, avocats.... Les choses ont changĂ© ; des Ă©tudiants francophones se sont orientĂ©s vers les disciplines scientifiques et administratives. De grandes entreprises quĂ©bĂ©coises ont percĂ© jusqu'Ă  devenir des multinationales, comme Bombardier. Les Ontariens et autres Anglophones peuvent difficilement considĂ©rer encore les QuĂ©bĂ©cois comme des ĂȘtres infĂ©rieurs. ParallĂšlement les QuĂ©bĂ©cois sont devenus plus sĂ»rs d'eux. L'existence de la francophonie leur donne des raisons de croire en la pĂ©rennitĂ© d'une langue qu'ils ont su dĂ©fendre et enrichir Ă  leur maniĂšre avec beaucoup d'opiniĂątretĂ©. Cette situation nouvelle n'offre-t-elle pas des possibilitĂ©s de rapprochement entre les deux peuples fondateurs du Canada ? L'avenir seul dĂ©tient la rĂ©ponse. La difficile intĂ©gration de la jeunesse En dehors du diffĂ©rend qui continue d'opposer fĂ©dĂ©ralistes et souverainistes, le QuĂ©bec se trouve aujourd'hui confrontĂ©, comme la France, aux problĂšmes rĂ©sultant d'une intĂ©gration difficile de sa jeunesse. C'est ainsi, qu'en 2008, Ă  la suite de la mort d'un jeune habitant d'un quartier sensible du nord de MontrĂ©al, sous les balles de la police, des Ă©meutes ont Ă©clatĂ©. Depuis l'Ă©viction des motards, liĂ©s au trafic de drogue, des bandes rivales, qui ont pris leur place, tiennent le haut du pavĂ© et s'en prennent aux forces de l'ordre. Enfin, on ne saurait clore l'histoire du QuĂ©bec sans rappeler l'existence des populations qui vivaient sur cette terre avant l'arrivĂ©e des Blancs. Certains Autochtones se sont mĂ©tissĂ©s, d'autres se sont intĂ©grĂ©s, tant bien que mal, Ă  une sociĂ©tĂ© qui ne leur convient guĂšre, d'autres vivent plus ou moins de la charitĂ© publique, dans des rĂ©serves. Les querelles qui divisent les EuropĂ©ens ne les concernent que de loin. Est-ce Ă  dire qu'ils sont dĂ©finitivement rĂ©signĂ©s Ă  leur sort ? La crise d'Oka prouve le contraire. De temps Ă  autre des incidents surviennent. Tout rĂ©cemment, en fĂ©vrier 2010, le conseil de bande de la rĂ©serve de Kahnawake a dĂ©cidĂ© d'expulser toutes les personnes qui ne sont pas originaires de la tribu, mĂȘme celles qui y ont un conjoint, et il a interdit aux Ă©trangers de s'installer dans les limites de la rĂ©serve. Kahnawake ou Caughnawaga est un village mohawk agnier. Une sainte chrĂ©tienne, Catherine Tekakwitha le Lys des Agniers, qui aurait accompli des guĂ©risons miraculeuses, est originaire de cette rĂ©serve, situĂ©e au bord du Saint-Laurent, prĂšs de MontrĂ©al. A propos de l'auteur PoĂšte, PassionnĂ© d'histoire et grand voyageur, Jean Dif a rĂ©digĂ© des ouvrages historiques et des rĂ©cits de voyage. Bibliographie - Histoire de l'AmĂ©rique française de Gilles Havard. Champs Histoire, 2008. - L'histoire de QuĂ©bec Capitale de la Nouvelle-France 1608-1760 de Raymonde Litalien. Belles lettres 2008. - Histoire Populaire du Quebec T 01 des Origines a 1791 deJacques LacoursiĂšre. 2005. Pour aller plus loin - Ressources du ministĂšre de la culture sur l'histoire de la Nouvelle France.
Lebastion dc la l'entrĂ©e .du fo.rt. El est aujourd'hui couvert de ,maison's ; cependant sa forme ancienne e'st dĂ©kmin'Ă©e par les rues Berthelot et la me de Belle-Vue. Le .bastion du Tigard, A ,la joncti,on ides fossĂ©s de la ville avec ceux idu chĂąteau., a presque .co3m(p16tement disparu sous D’aprĂšs Patay au cours des siĂšcles » /AbbĂ© Michel Gand. BH_BR/11941_A-B. BibliothĂšque des Archives dĂ©partementales du Loiret, Ă  OrlĂ©ans. LE BLASON DE PATAYD’hermine Ă  l’écusson en abĂźme de gueule chargĂ© d’une Ă©pĂ©e haute d’argent, la garde d’or, accostĂ©e Ă  dextre d’un lĂ©opard et Ă  senestre d’un cerf passant du mĂȘme, le tout de l’écusson surmontĂ© d’un lambel d’ extĂ©rieurs. – L’écu timbrĂ© de la couronne murale Ă  trois tours crĂ©nelĂ©es d’or, maçonnĂ©e et ouverte de sable est soutenu par deux gerbes de blĂ© croisĂ©es en pointe en sautoir et liĂ©es d’ de la composition. – La ville a repris les armes de Guillaume de Patay qui portait d’hermine Ă  l’écusson e abĂźme de gueules Ă©cusson figurant Ă  Versailles, salle des croisades, 7e croisade, 1270.Le lĂ©opard et le cerf qui chargent cet Ă©cusson Ă©voquent la victoire de Jeanne d’Arc Ă  Patay. L’Anglais symbolisĂ© par le lĂ©opard aurait Ă©tĂ© surpris derriĂšre un bois par la fuite d’un cerf mis en Ă©veil par l’avant garde est celle figurant dans les armes de jeanne d’Arc et le lambel est celui surmontant les lis de France dans les armes de l’OrlĂ©anais. LES TEMPS ANCIENSï»ż 1 PATAY AVANT L’HISTOIREII y a plus de dix mille ans, bien avant l’arrivĂ©e des Gaulois, la haute vallĂ©e de la Conie Ă©tait dĂ©jĂ  peuplĂ©e. Des pierres taillĂ©es de l’époque du palĂ©olithique supĂ©rieur et des pierres polies du nĂ©olithique, ont Ă©tĂ© retrouvĂ©es sur les terres de La Chapelle, Guillonville et de Rouvray. A Patay mĂȘme, la grosse pierre » nous rappelle qu’il y avait lĂ  un dolmen, un autre se trouve Ă  Allonnes. ÉrigĂ©s entre 2500 et 1500 avant notre Ăšre, les dolmens se composaient d’une table de pierre horizontale posĂ©e sur des supports. Il fallait soulever et mettre en place des blocs dont certains dĂ©passent 50 tonnes, ce qui suppose un certain niveau de connaissances techniques. On ne peut s’empĂȘcher de faire la comparaison avec les monuments d’Égypte. Les fouilles ont montrĂ© qu’ils servaient de tombeaux collectifs ou de monuments funĂ©raires pour les personnages de haut rang. À Perollet, mot qui dĂ©signe un ancien dolmen, en latin petra lata », lors de la construction de la ligne ferroviĂšre Patay-ChĂąteaudun, sous l’un de ces dolmens on a retrouvĂ© deux haches polies et un magnifique couteau en silex qui constituaient les armes du mort. Les seuls dolmens restant sont ceux de PĂ©ronville appelĂ©s Pierre de Saint Marc » curieusement construits en plein lit de riviĂšre, et celui de Cheminiers La Pierre FĂ©nat », entre Saint Sigismond et Épieds en LES NOMS DE LIEUDe l’époque des Celtes, l’histoire a retenu simplement Allonnes, nom d’une divinitĂ© des fontaines et Rouvray, nom d’une variĂ©tĂ© de chĂȘne, objet chez les Gaulois d’un culte particulier. Les domaines de Moret Rouvray et Moret-Conie Villeneuve prouvent que, dĂšs cette Ă©poque, la rĂ©gion de Patay Ă©tait dĂ©jĂ  cultivĂ©e. À l’époque gallo-romaine, les campagnes de Beauce connurent une certaine prospĂ©ritĂ©. De nombreux petits propriĂ©taires Ă©taient indĂ©pendants. À cĂŽtĂ© d’eux, des colons louaient des terres qu’ils cultivaient librement moyennement redevances. Les grands domaines Ă©taient gĂ©rĂ©s par de riches propriĂ©taires qui employaient colons et esclaves. L’étude des noms de lieu nous permet de situer quelques-unes de ces propriĂ©tĂ©s. PATAY provient d’un nom de famille d’origine romaine gentilice. Les Gaulois pour former des adjectifs Ă  partir des noms, y ajoutĂšrent le suffixe acus » , ce qui aurait donnĂ© Papiacus » Ă  l’époque mĂ©rovingienne. On trouve Papitacus » en 1002. La terminaison acus » fut par la suite transformĂ©e en Y ». On trouve Patheio » en 1171 puis Pateio » en 1226 et Patai » en 1272. Cette transformation est trĂšs frĂ©quente dans le dĂ©partement – CHEVILLY vient de Caviliacus » du gentilice Cavilius » ;– Silvius » a donnĂ© Silviacus » puis SOUGY ;– Romulus » s’est transformĂ© en Romuiacus » puis ROUMILLY ;– Turnus », nom d’homme, a donnĂ© Turnisiacus » puis TOURNOISIS ;– AMPOIGNY et BRILLY. commune de Coinces, ont la mĂȘme origine ;– La ville de LIGNEROLLES du bas latin Linaria » dĂ©signe un endroit oĂč l’on cultive le lin ;– Ce domaine appartenait en 990 Ă  l’abbaye de Sainte Croix d’OrlĂ©ans Linerolas ».3 LES VOIES ROMAINESAucune voie importante ne traversait le bourg de Patay. A Saint PĂ©ravy la Colombe, se croisaient les chemins de ChĂąteaudun Ă  OrlĂ©ans et de Blois Ă  Paris. Saint PĂ©ravy la Colombe, en latin Sanctus Petrus ad vicum columnae Saint Pierre ai village de la colonne est citĂ© par GrĂ©goire de Tours qui Ă©crivait au VlĂšme siĂšcle, puis dans une charte de 651. Une colonne, en latin columna, a donnĂ© colombe par la suite. Cette borne indiquait, Ă  l’époque romaine, la limite entre le pays chartrain et l’OrlĂ©anais. Le chemin de Blois, appelĂ© chemin des bƓufs », autrefois fort large et trĂšs frĂ©quentĂ© permettait d’amener le bĂ©tail vivant Ă  Paris en Ă©vitant OrlĂ©ans et en Ă©pargnant six lieues. Il joue un rĂŽle important pendant la guerre de Cent ans. Il passait au sud de Lignerolles, est encore visible Ă  certains endroits et sert de limites entre Rouvray et Coinces et entre Sougy el L’ARRIVÉE DES FRANCS À l’époque du bas-empire, la fiscalitĂ© Ă©tait devenue telle que les petits propriĂ©taires ne pouvaient plus subsister, ils Ă©taient obligĂ©s de se mettre sous la protection d’un patronus » romain. Profitant de la misĂšre et des incertitudes de l’époque, certains grands propriĂ©taires confisquĂšrent les terres des paysans pauvres et se firent construire de somptueuses villas ».Les Francs, en occupant la Gaule, gardĂšrent longtemps leurs mƓurs barbares. La violence Ă©tait partout, les documents d’époque nous offrent le spectacle sans cesse renouvelĂ© de crimes inqualifiables. Le pieux Saint Sigismond, roi des Burgondes, craignant que son fils SigĂ©ric ne veuille prendre son pouvoir, le fit Ă©trangler. Vaincu et fait prisonnier par Clodomir, roi d’OrlĂ©ans, Sigismond fut jetĂ© dans un puits avec sa femme et ses enfants en 523. Selon leurs coutumes, les Francs se partagĂšrent les terres, mais la vie rurale ne fut pas modifiĂ©e et l’esclavage y fut aussi brutal que dans le monde romain. Chaque propriĂ©taire, on l’appellera bientĂŽt seigneur » gĂ©rait ses biens avec une nombreuse main d’Ɠuvre rĂ©partie comme Ă  l’époque romaine en hommes libres, colons et serfs. Les paysans vivaient alors dans des chaumiĂšres de torchis qui n’ont pas toujours une fenĂȘtre. On y trouve une huche, parfois une table, des souches en guise de siĂšges, une paillasse qui remplace le lit. Le vĂȘtement et la nourriture sont Ă  l’unisson de cette vie misĂ©rable. MalgrĂ© les conciles et les recommandations des Ă©vĂȘques, la conversion des Francs ne changea pas la situation. Chaque seigneur voulut avoir son Ă©glise, il nomma des prĂȘtres parmi ses serviteurs et exigea que tous assistent aux offices. En mĂȘme temps, toute une population d’artisans et de commerçants se groupa autour du clocher ; ces hĂŽtes » payaient des redevances au seigneur, mais jouissaient d’une relative libertĂ©. L’évangĂ©lisation ne se fit pas sans rĂ©sistances. Les cultes paĂŻens ne pouvant plus se cĂ©lĂ©brer publiquement, ce fut dans des carriĂšres ou des souterrains qu’ils eurent lieu. Sous l’église de Coinces, il existe un de ces souterrains formĂ© de salles rondes de petites dimensions, qui a Ă©tĂ© Ă©tudiĂ© en dĂ©tail. Ces salles servaient de lieux de culte et de rĂ©union pour la famille du dĂ©funt. Par la suite, l’imagination populaire aidant, on s’est mis Ă  affirmer qu’ils reliaient les chĂąteaux entre eux ou servaient de cachette lors des LES PREMIERS DOCUMENTSSous l’influence de l’Évangile, quelques seigneurs, pour le salut de leur Ăąme, firent des dons aux abbayes et chapitres. En 857, le chevalier Foulque donna au prieurĂ© de Bonneval, qui venait d’ĂȘtre fondĂ©, l’église de Patay, mais se garda le titre seigneurial. Le chapitre Saint Pierre le Puellier d’OrlĂ©ans possĂ©dait en 1002 des terres Ă  Patay {Papitacus et Ă  Rouvray ; celui de Saint Avit quelques dĂźmes et cens Ă  Rouvray. C’est surtout le chapitre cathĂ©drale d’OrlĂ©ans qui hĂ©rita de biens dans la rĂ©gion, spĂ©cialement Ă  Sougy, Coinces, Terminiers et Rouvray. Une charte de Hugues Capet, datĂ©e de 990, confirme les biens du chapitre cathĂ©drale Sainte Croix d’OrlĂ©ans, elle cite en particulier la restitution de biens usurpĂ©s par le roi PĂ©pin Ă  autre document de 1171 cite Adam, prieur de Patay {Patheio comme tĂ©moin d’une transaction. Le prieur, comme beaucoup d’autres dans la rĂ©gion, n’eut jamais plus de 3 ou 4 religieux bĂ©nĂ©dictins de Bonneval. FrĂ©quemment les documents font Ă©tat d’un seul prĂȘtre rĂ©sident, portant le titre de prieur. Nos villages furent la proie des envahisseurs normands en 898, en 911 et surtout en 961. En cette derniĂšre annĂ©e, racontent les chroniqueurs, le ravage fut si terrible que la campagne fut entiĂšrement dĂ©sertĂ©e et les terres abandonnĂ©es ; ce qui causa dans tout le pays une extrĂȘme famine. Comme l’armĂ©e venue du Nord n’était presque composĂ©e que de paĂŻens, les Ă©glises ne furent pas Ă©pargnĂ©es et ces ravages durĂšrent 2 ou 3 ans ». AprĂšs ces pillages, les habitants de Patay et des paroisses voisines, qui avaient Ă©chappĂ©, purent revenir et reconstruire maisons et Ă©glises. On peut, sans trop se tromper, dater de cette Ă©poque la fondation de la paroisse de la Chapelle Onzerain. A la suite des invasions, le retour des reliques de Saint Martin de Tours fut l’occasion de grandes festivitĂ©s ; on distribua des fragments de la cĂ©lĂšbre chape » du saint, d’oĂč le nom Chapelle ». Onzerain vient d’un prĂ©nom fĂ©minin rappelant la fĂȘte des Rameaux. Villeneuve sur Conie, dĂ©signant un nouveau village, devint probablement paroisse Ă  la mĂȘme Ă©poque ; l’église primitive, sous le vocable de Saint Nicolas, se trouvait en retrait entre les fermes de Beauvoir et Vaudrenet. Au dĂ©but du XlĂšme siĂšcle, Patay, Villeneuve, la Chapelle Ă©taient du ComtĂ© du Dunois au diocĂšse de Chartres et dĂ©pendaient, pour le spirituel, de l’abbaye de Bonneval qui nommait les curĂ©s de ces paroisses. La Croix CassĂ©e servait de limite entre l’OrlĂ©anais et le Dunois. Pour protĂ©ger les populations rurales et garantir les biens qu’ils possĂ©daient, les chapitres furent obligĂ©s de faire appel Ă  des chevaliers. Ceux-ci abusĂšrent souvent de leurs pouvoirs. En 1153, le chapitre de Sainte Croix rappelle Ă  Aubert, maire de Faverolles, Terminiers, Sougy, Villardu, qu’il ne peut rien exiger des hĂŽtes du chapitre que ce qui a Ă©tĂ© convenu. La dĂ©couverte d’un nouveau collier d’attelage permit une meilleure utilisation de la force motrice du cheval ; en mĂȘme temps, l’évangĂ©lisation des populations rurales et surtout le mouvement des croisades, amenĂšrent une Ă©volution des mƓurs. L’ancien esclavage devenu servage disparut peu Ă  peu. En 1210, le chevalier Aubert obtient l’affranchissement de toute sa famille en Ă©change de sa maison de Rouvray. En Janvier 1260, les 265 serfs du chapitre de Sainte Croix d’OrlĂ©ans en Beauce, Ă©taient affranchis Ă  Rouvray, Villardu, Brilly, Terminiers, Gaubert et autres lieux moyennant une redevance proportionnĂ©e Ă  leur richesse. La justice Ă©tait, dĂšs cette Ă©poque, rendue par des hommes de loi nommĂ©s par le seigneur du lieu. Le chapitre de Sainte Croix se rĂ©servait ce privilĂšge. Nul ne pouvait, dans les paroisses de Rouvray, Sougy, Terminiers, intenter un procĂšs ou poursuivre un dĂ©linquant sans faire intervenir les officiers de justice et, en consĂ©quence, le tribunal du chapitre. Un curĂ© de Sougy, Ă©tant censurĂ© par l’évĂȘque, celui-ci dut se dĂ©sister de cette immixtion dans les affaires capitulaires en 1430. PATAY AU MOYEN-ÂGE1 LA FAMILLE DE PATAYLe premier document citant la famille de Patay est datĂ© de 1103, Hugues de Pathay fait une donation Ă  l’abbaye Saint Pierre de Chartres oĂč son fils vient de faire profession religieuse. Un autre document de 1191 cite Geoffroy de Pathay, frĂšre d’Emmeline. Parmi les archives du monastĂšre de Bonneval, on trouve en 1231 une transaction avec Hugues d’Ouzouer, Ă©poux d’Émmeline de Pathay. L’acte cite Geoffroy de Pathay son fils. Ce document nous prouve l’existence, dĂšs le XllĂšme sičcle, d’une enceinte fortifiĂ©e autour de l’église, du prieurĂ© et de la maison seigneuriale, mais, il est prĂ©sentement impossible, faute de renseignements, de savoir comment se prĂ©sentait Patay. L’écu de Hugues d’Ouzouer Ă©tait de gueules » rouge sans ornement, celui de sa femme, d’hermine ; il mit son Ă©cu au cƓur de celui de son Ă©pouse, c’est le premier blason de Patay. Lors de la huitiĂšme croisade, en 1270, au cours de laquelle le roi Saint Louis mourut Ă  Tunis, la chronique de Joinville cite parmi les chevaliers Monsieur Guillaume de Patay, lui et son frĂšre, quatre cents livres, ils mangeront Ă  la table du Roi ». Ce frĂšre, Gilles de Patay, avait dĂ©jĂ  participĂ© Ă  la croisade conduite par Saint Louis 1249-1253, qui avait abouti Ă  la captivitĂ© du roi et la perte de Damiette. Faute de documents, il n’est pas possible d’établir une gĂ©nĂ©alogie exacte de la famille de Patay. Le futur Ă©vĂȘque d’OrlĂ©ans, Gilles de Patay 1280-1288 ne pouvait ĂȘtre en mĂȘme temps prĂȘtre et chevalier. De mĂȘme, on doit rattacher Jean de PĂątĂ©, Ă©vĂȘque de Chartres 1328-1332 Ă  la famille de Plessis PĂątĂ© Ă  Malesherbes. Lors des premiĂšres croisades, les chevaliers avaient vendu tous leurs biens pour s’équiper et assurer leur voyage. Avant leur dĂ©part, presque tous avaient mĂȘme affranchi leurs serfs moyennant une redevance. À leur retour, ils se retrouvĂšrent dans l’indigence ou mĂȘme la misĂšre. Moins enthousiastes, les chevaliers des derniĂšres croisades demandĂšrent Ă  ĂȘtre Ă©quipĂ©s par le trĂ©sor royal et mĂȘme, pour certains, ce fut le cas du seigneur de Patay, Ă  ĂȘtre nourri Ă  la table du Roi. Guillaume II de Pathay. Chevalier seigneur de Patay, fut chargĂ© en 1304 par le roi Philippe le Bel, de la garde de Guy de Namur, fils de Guy de Dampierre, comte de Flandres. N’étant pas Ă  l’aise Ă  l’intĂ©rieur des murs de Patay, Guillaume II se faisait construire un chĂąteau Ă  Lignerolles oĂč il avait l’intention de demeurer. Guillaume III de Pathay est citĂ© en 1331 et 1345 comme seigneur de Patay et LA VIE RURALELa condition paysanne sous le rĂ©gime seigneurial Ă©tait encore loin d’ĂȘtre parfaite, mais il faut bien vivre et seul le seigneur, Ă  l’abri de son chĂąteau fort, reprĂ©sente un pouvoir efficace. Le paysan homme libre vilain est gĂ©nĂ©ralement propriĂ©taire de sa terre, il se contente seulement de redevances envers le seigneur. Le cens, droit d’usage de la terre est payable soit en argent, soit en nature. Autre redevance remplaçant le cens le champart reprĂ©sentant le 12Ăšme ou le 15Ăšme de la corvĂ©es correspondent gĂ©nĂ©ralement Ă  quelques jours de travail par an dans notre seigneur a Ă©galement le monopole du moulin, du four et du pressoir, le paysan Ă©tant contraint de s’en servir moyennant de menues seigneur exerce Ă©galement le droit de justice par l’intermĂ©diaire d’hommes de loi, ce qui lui procure quelques se rĂ©serve surtout le droit de chasse qui entraine la ruine des cultures lorsque les bĂȘtes sauvages ravagent les champs ou lors de la poursuite du taille, Ă  l’origine impĂŽt sur les revenus payĂ© par les roturiers au seigneur du lieu, fut rapidement payĂ©e au trĂ©sor le paysan paye la dĂźme Ă  l’autoritĂ© ecclĂ©siastique ; elle reprĂ©sente environ le 12Ăšme ou le 15Ăšme de certaines du paysan se compose de pain de seigle, lĂ©gumes, Ɠufs, fromages, porc ou poisson salĂ©. Il boit du s’est nettement amĂ©liorĂ© le paysan ainsi possĂšde une maison avec des murs en torchis ou en pierre, un toit de tuiles, fenĂȘtre et cheminĂ©e. Il a un lit et des draps; l’apparition de la chemise favorise l’hygiĂšne dĂšs le XlllĂšme l’époque de Saint Louis, les seigneurs fĂ©odaux, Ă©puisĂ©s par la croisade et les luttes intestines, se trouvent concurrencĂ©s par une bourgeoisie naissante et par l’influence grandissante de la simples commerçants, artisans ou mĂȘme cultivateurs aisĂ©s rachĂštent des terres au seigneur local et deviennent propriĂ©taires de fiefs, c’est le cas principalement Ă  LA GUERRE DE CENT ANSEn 1345, Guillaume IV de Pathav hĂ©ritait de son pĂšre, il habitait alors Patay, le fief de Lignerolles revenait Ă  son cousin, lui aussi Guillaume de Pathay. AprĂšs la dĂ©faite de CrĂ©cy, 1346, qui commença la guerre de cent ans, la Beauce fut parcourue par des bandes armĂ©es qui ravagĂšrent le pays. La premiĂšre invasion de la Beauce eut lieu en 1359. En 1360, Pierre de Pathav. Chevalier, maĂźtre d’hĂŽtel du roi Jean, fut donnĂ© en otage au roi d’Angleterre avec plusieurs autres chevaliers. Je suppose que ce Pierre de Pathay Ă©tait fils de Geoffroy, frĂšre de Guillaume 1364, Guillaume IV de Pathav Ă©tait invitĂ© Ă  participer Ă  la dĂ©fense du diocĂšse et de la ville d’OrlĂ©ans. Son fils, Philippe de Pathay. est citĂ© dans deux documents de 1396 et 1406 comme seigneur de Patay. Notre rĂ©gion connut sous le rĂšgne de Charles V une pĂ©riode assez calme, mais en 1411, nouveaux ravages par des troupes mal contrĂŽlĂ©es. Les paysans, pour avoir la vie sauve, Ă©taient obligĂ©s de se rĂ©fugier dans des lieux fortifiĂ©s, les bandes armĂ©es se contentant de piller, d’incendier, de violer ou de massacrer les paysans la dĂ©faite d’Azincourt, 1415, la situation devint encore plus complexe. En 1420, Catherine, fille de Charles VI, Ă©pousait Henri V, roi d’Angleterre, Ă  la mort de son pĂšre, selon la loi anglaise, elle devenait reine de France et d’Angleterre. Le duc de Bourgogne n’avait pas attendu cette date pour reconnaĂźtre Henri V d’Angleterre comme roi de France. De nombreux seigneurs suivirent son exemple en Ă©cartant par la mĂȘme le dauphin Charles qui, selon la loi des Francs, devait hĂ©riter de son pĂšre Charles 1417, les anglais avaient installĂ© une garnison de 600 hommes Ă  Chartres d’oĂč ils faisaient de frĂ©quentes incursions dans tous les villages de la rĂ©gion. En 1427, voulant faire le siĂšge d’OrlĂ©ans, l’armĂ©e anglaise s’emparait de toutes les villes et des villages fortifiĂ©s de la rĂ©gion y mettant garnison Toury, Janville, Montpipeau, Meung sur Loire. Patay pratiquement indĂ©fendable, ouvrit ses portes Ă  la premiĂšre LA BATAILLE DE PATAY18 Juin 1429. C’était un samedi. L’armĂ©e française composĂ©e de 7 Ă  hommes Ă©tait assez disparate, on y parlait toutes les langues et tous les dialectes de l’Europe occidentale. Des OrlĂ©anais et des Chartrains cĂŽtoyaient des Irlandais, des Espagnols, des Lombards et des Allemands. Les capitaines avaient rĂ©ussi Ă  obtenir, non sans difficultĂ©s, une cohĂ©sion et une discipline admirables. Surtout celle qu’on appelait la Pucelle avait su donner Ă  tous la confiance et l’enthousiasme qui procurent la fut pris le 12 Juin, le pont de Meung sur Loire fut emportĂ© le 15, Beaugency, assiĂ©gĂ© le 17, ouvrait ses portes le 18 Ă  la premiĂšre heure au duc d’Alençon et Ă  Jeanne d’ anglaise, commandĂ©e par le fameux John Talbot, forte d’environ hommes, s’était regroupĂ©e Ă  Meung sur Loire et se prĂ©parait Ă  attaquer le pont. Lorsqu’elle apprit la perte de Beaugency, vers huit heures du matin, elle dĂ©cidait de se retirer lentement sur Janville oĂč elle disposait d’une importante place forte, espĂ©rant s’appuyer sur les garnisons de Montpipeau et Saint Sigismond. Empruntant l’ancienne voie de Blois Ă  Paris, les Anglais marchaient dans un ordre parfait l’avant-garde, puis l’artillerie, les convois, ensuite le corps principal et enfin l’arriĂšre-garde composĂ©e uniquement de gens d’armes d’origine anglaise. Cette armĂ©e Ă©tait sur le territoire de Coinces, non loin de Patay, lorsque les coureurs signalĂšrent des duc d’Alençon averti des mouvements de l’ennemi hĂ©sitait Ă  le poursuivre ; il n’avait pas oubliĂ© la funeste rencontre de la journĂ©e des Harengs le 12 FĂ©vrier. Mais Jeanne d’Arc avait insistĂ© En nom Dieu, il faut les combattre, s’ils Ă©taient pendus aux nues, nous les aurons ».Les Ă©claireurs de l’armĂ©e française Ă©taient commandĂ©s par le valeureux La Hire. Le corps de bataille qui suivait d’assez prĂšs Ă©tait conduit par le duc d’Alençon et la Talbot apprit qu’il Ă©tait poursuivi, il rĂ©solut de ne pas refuser le combat. AprĂšs avoir franchi le bas fond formĂ© par le lit dessĂ©chĂ© de la RetrĂšve, il se porta sur le territoire de la paroisse de Patay, s’appuyant sur le bois de Lignerolles, en empruntant un chemin resserrĂ© entre des haies et des buissons. C’est lĂ  que Talbot s’arrĂȘta avec 500 archers d’élite. Il Ă©tait environ 2 heures de l’aprĂšs-midi, par une chaleur accablante, un cerf effrayĂ© sortit subitement d’un taillis et se dirigea droit sur les archers anglais qui se mirent Ă  pousser des cris de surprise. Ces clameurs firent dĂ©couvrir l’ennemi Ă  l’avant-garde française qui, entraĂźnĂ©e par le bouillant La Hire, arriva Ă  grand galop sur les archers anglais avant qu’ils n’aient eu le temps de prendre leurs positions. Falstaff qui Ă©tait avec le corps principal de l’armĂ©e anglaise courut vers l’avant-garde pour la ramener dans la bataille ; mais, s’imaginant que tout Ă©tait perdu, les anglais se dispersĂšrent et s’enfuirent. Pendant ce temps, le gros de l’armĂ©e française massacrait ou faisait prisonniers de nombreux ennemis. Talbot lui-mĂȘme tomba aux mains de Poton de fuyards furent poursuivis jusque sous les murs de Janville ; lĂ , les habitants refusĂšrent d’ouvrir les portes de telle sorte que Falstaff et 7 ou 800 cavaliers arrivĂšrent Ă  Étampes vers minuit. Les soldats français, fatiguĂ©s aprĂšs une journĂ©e bien chaude, couchĂšrent sur place. Le lendemain, un dimanche, aprĂšs avoir dĂźnĂ© Ă  Patay, ils entrĂšrent triomphalement Ă  OrlĂ©ans avec leurs UN DIFFICILE RETOUR AU CALMEAprĂšs ce brillant fait d’armes, la guerre n’était pas finie, les bandes anglaises sillonnaient toujours la Beauce, Patay Ă©tant peu fortifiĂ© n’était pas Ă  l’abri d’un retour offensif de l’ennemi. Survint une pĂ©riode de famine. Les paysans, voyant leurs moissons ruinĂ©es, leurs grains enlevĂ©s par les gens de guerre, leurs granges brĂ»lĂ©es, n’avaient plus de courage et dĂ©sertaient la campagne, qui faute de laboureurs resta en friches. Ce n’est qu’en 1432, aprĂšs la libĂ©ration de Chartres, que la sĂ»retĂ© put revenir dans cette partie de la Beauce. En quelle annĂ©e l’église de Patay fut-elle dĂ©vastĂ©e ? II est impossible de le dire les dates de 1420 et 1425 paraissent les plus probables. Les personnages qui soutiennent les arcs de la voĂ»te de la nef ont Ă©tĂ© sculptĂ©s vers 1450, ce qui suppose une restauration Ă  cette Ă©poque. Il est intĂ©ressant de remarquer que ces sculptures se retrouvent, Ă  peine modifiĂ©es dans les Ă©glises de ChĂąteaurenard, TriguĂšres et dans la salle des thĂšses Ă  OrlĂ©ans. Elles reprĂ©sentent des professeurs de l’universitĂ©, faisant les gestes de ceux qui enseignent ; mais, elles furent considĂ©rĂ©es comme figurant des prophĂštes, Jean Baptiste ou des saints. Les mĂ©faits des bandes armĂ©es avaient permis de dĂ©couvrir que les populations locales avaient besoin d’ĂȘtre mieux protĂ©gĂ©es contre les brigands de toutes mettre Ă  l’abri les habitants, il fut dĂ©cidĂ© de construire de nouveaux remparts dont les boulevards dessinent les contours Hector de Patay Ă©tant seigneur du lieu. La formation par Charles Vil des compagnies d’ordonnances en 1445 obligea les bandes de brigands Ă  se disperser et Ă  disparaĂźtre. LES TEMPS CLASSIQUES1 LES GUERRES DE RELIGION AprĂšs une centaine d’annĂ©es assez calmes, Patay, Gidy, HuĂȘtre virent arriver vers 1535 des prĂ©dicateurs d’une religion qu’ils disaient rĂ©formĂ©e. D’importantes communautĂ©s se formĂšrent autour d’eux. Lorsqu’on 1547, le clergĂ© commença Ă  rĂ©agir, le protestantisme Ă©tait dĂ©jĂ  fortement implantĂ© dans la rĂ©gion. Les documents nous manquent pour connaĂźtre le choix des seigneurs de Patay et suivre les Ă©vĂ©nements ; les registres paroissiaux ne commencent qu’en 1570. L’annĂ©e 1562 fut certainement la plus tragique de cette Ă©poque les protestants maĂźtres d’OrlĂ©ans pillĂšrent toutes les Ă©glises de la campagne, y brisĂšrent les images, incendiĂšrent celle de Coinces et beaucoup d’autres. Ils prirent les prĂȘtres, les attachant Ă  la queue des chevaux et les traĂźnant ainsi, puis ils leur crevaient les yeux et enfin les liaient Ă  un arbre oĂč ils les arquebusaient. Seule la paroisse de Villeneuve-sur-Conie, qui avait adoptĂ© le protestantisme fut la bataille de Dreux 19 DĂ©cembre 1562, alors que le prince de CondĂ© essayait avec la reine Catherine de MĂ©dicis d’obtenir une paix honorable pour tous les partis, l’amiral de Coligny se refusait Ă  tout pourparlers. Il rĂ©unissait Ă  Patay, le 31 Janvier 1563, son armĂ©e dans le but d’aller en Normandie chercher les secours en hommes et en argent que la reine d’Angleterre tenait prĂȘts au Havre. EffrayĂ©s, de nombreux habitants de Patay se rĂ©fugiĂšrent dans l’église et le clocher, les protestants y ayant mis le feu, ils pĂ©rirent brĂ»lĂ©s vifs. Y eut-il d’autres massacres ou pillages Ă  Patay, il est impossible, faute de documents connus, de le LE MONDE RURALLa paix revenue grĂące Ă  Henri IV, l’autoritĂ© royale affermie, une pĂ©riode de prospĂ©ritĂ© s’ouvrait pour les ruinĂ©e, la noblesse terrienne vendait ses biens et allait se rĂ©fugier soit Ă  la Cour, soit Ă  l’armĂ©e. Qu’était devenue la famille des anciens seigneurs de Patay ? A Philippe de Patay citĂ© en 1396, succĂ©da son fils Hector 1er, puis Hector II. Celui-ci, deux fois mariĂ©, n’eut pas d’enfant, c’est son frĂšre Jean 1er de Patay. Seigneur de Claireau Sully la Chapelle qui hĂ©rita du titre de seigneur de Patay. Ce titre Ă©tait partagĂ© avec le duc de Longueville, comte de Dunois. Cette derniĂšre famille Ă©tait issue du bĂątard d’OrlĂ©ans, le cĂ©lĂšbre compagnon de Jeanne d’Arc. Le fief de Lignerolles appartenait Ă  une autre branche de la famille de IV et Sully s’intĂ©ressĂšrent au monde rural, on connaĂźt la formule cĂ©lĂšbre pĂąturage et labourage
. ». Les paysans ayant vu leurs impĂŽts, charges et droits diminuer de moitiĂ©, en profitĂšrent pour acheter des terres. Les moins fortunĂ©s n’ayant qu’une petite culture devenaient en mĂȘme temps artisans ou petits commerçants. A cĂŽtĂ© d’eux se forma une classe encore plus pauvre, celle des ouvriers agricoles. Dans le bourg de Patay, les marchĂ©s du mardi et du vendredi Ă©taient assez animĂ©s ; on y vendait Ɠufs, beurre, volailles, mais surtout des grains. Les principales mesures de capacitĂ© de Patay Ă©taient le muid, le sestier environ 140 litres, la mine 70 litres environ, le boisseau environ 12 litres et la pinte un peu moins de 2 litres. La mine mesure de surface Ă©tait Ă©quivalente Ă  la surface ensemencĂ©e avec une mine de blĂ©. Se tenait Ă©galement un marchĂ© aux bestiaux, chevaux, vaches, moutons, place de l’Abreuvoir, actuellement place Jeanne d’Arc. Quatre foires avaient lieu dans l’annĂ©e le mardi gras, le 27 Juin, le 25 Juillet Saint Jacques et le 30 Novembre Saint AndrĂ©, si l’on y ajoute les deux louĂ©es de la Saint Jean et de la Toussaint, on devine l’animation du pays pour le grand profit des cabaretiers, aubergistes, dĂ©bits de boissons et autres. La police Ă©tait assurĂ©e par le prĂ©vĂŽt de police, dĂ©lĂ©guĂ© du bailli du Dunois ; il y avait Ă©galement des placiers et des receveurs de taxes, pour l’utilisation de la halle et le mesurage des grains. Ces taxes Ă©taient perçues, en gĂ©nĂ©ral, au profit du comte de LA VIE PAROISSIALEAutrefois, on ne sĂ©parait pas la vie paroissiale de la vie sociale. L’église Ă©tant le seul lieu oĂč l’on pouvait rassembler la communautĂ© des habitants, c’est lĂ  que se prenaient les grandes l’issue de la messe solennelle du dimanche se rĂ©unissaient autour du banc d’Ɠuvre les principaux notables et de nombreux habitants le curĂ©, son vicaire, le prieur, les deux fabriciens de la paroisse, le prĂ©vĂŽt de police, l’huissier royal, les deux notaires, les commerçants et artisans et la plupart des chefs de les deux ans, en dĂ©cembre, les gagiers, appelĂ©s aussi fabriciens, rendaient compte de la gestion financiĂšre de la paroisse, puis on Ă©lisait de nouveaux fabriciens qui remplissaient gratuitement leur fonction. Les recettes Ă©taient les quĂȘtes, la vente des places Ă  l’église, les donations et legs divers. Les dĂ©penses consistaient en l’entretien des objets du culte, de l’église, du presbytĂšre et des deux cimetiĂšres. Le plus ancien cimetiĂšre se trouvait autour de l’église, l’autre Ă©tait lĂ  oĂč se trouvent actuellement la mairie et la poste. Parmi les employĂ©s d’église, seul le bedeau, en mĂȘme temps sonneur, recevait une rĂ©tribution de 24 livres par tous les autres, fabriciens ou chantres, on offrait, chaque annĂ©e, un bon repas Ă  la Saint Marc et les jours des rogations, des paquets de bougies Ă  certaines fĂȘtes ainsi que des gerbes de blĂ©, fruit d’une collecte dans l’église que se discutait la rĂ©partition des tailles entre les familles aisĂ©es et oĂč l’on Ă©lisait le receveur on disait fermier des impĂŽts de l’annĂ©e. Celui-ci devait demander Ă  chacun ta somme prĂ©vue en argent ou en espĂšces selon un rĂŽle Ă©tabli les rĂ©clamations se faisaient lors de la discussion devant la Ă©galement Ă  l’issue de la messe qu’étaient dĂ©battues toutes les dĂ©cisions Ă  prendre concernant l’entretien des rues et chemins par le moyen des corvĂ©es ou de UNE CURIEUSE LÉGENDESelon une lĂ©gende, le 14 Mai 1610, Ă  l’heure oĂč Ravaillac assassinait Henri IV, une jeune bergĂšre nommĂ©e Françoise Gauguyn, fille d’un boucher de Patay, gardait les moutons aux environs du village. Le soir en ramenant ses troupeaux Ă  la maison, elle demanda Ă  son pĂšre ce que c’était que le roi. Son pĂšre lui rĂ©pondit que c’était l’homme qui gouvernait la France et qui commandait aux français. La jeune fille alors s’écria » Mon Dieu! j’ai entendu tantĂŽt une voix qui m’a dit qu’il avait Ă©tĂ© tuĂ© ». Cette lĂ©gende publiĂ©e en 1759 est invraisemblable, Françoise Gauguyn, nĂ©e le 11 aoĂ»t 1581, avait alors 28 ans. Il est possible que son neveu, Pierre Dordelot, serrurier Ă  Patay, pour obtenir son hĂ©ritage, ait Ă©tĂ© Ă  l’origine de cette lĂ©gende, voulant la faire passer pour une sorciĂšre. Par la suite, Françoise Gauguyn se rendit Ă  Paris oĂč saint Vincent de Paul l’aida Ă  choisir sa vocation. Elle prit le voile sous le nom de mĂšre Françoise de la Croix. En 1617, elle Ă©tait chez les sƓurs de Louviers, mais n’y resta pas pour raison de santĂ©. GrĂące Ă  la protection de la princesse Marie de Gonzague de ClĂšves, elle fonda en 1628, Ă  Paris, place royale, la congrĂ©gation des SƓurs augustines de la CharitĂ© Notre Dame. Elle mourut Ă  Paris le 14 octobre LA MAISON DE RETRAITE Le 28 Mai 1630, les habitants de Patay envoyaient une supplique au roi Louis XIII pour lui demander l’autorisation d’établir Ă  Patay la congrĂ©gation religieuse des SƓurs augustines de la CharitĂ© Notre Dame. Louis XIII, en rĂ©ponse Ă  la supplique des manants et habitants de Patay », par lettres patentes datĂ©es de fĂ©vrier 1631, autorisait cet Ă©tablissement de religieuses hospitaliĂšres. L’évĂȘque de Chartres avait donnĂ© son approbation le 28 mai 1630. Les deux seigneurs temporels de Patay le duc de Longueville et le seigneur de ClĂ©reau donnĂšrent Ă©galement leur accord les 16 Mars et 24 avril 1631. Pour s’installer rue Trianon, les religieuses bĂ©nĂ©ficiĂšrent de l’hĂ©ritage de Françoise Gauguyn, puis Suzanne Chapellier, veuve de Jean Savary, bourgeois de Paris, devenue religieuse, donna livres le 24 aoĂ»t d’OrlĂ©ans fit don de la ferme de la VallĂ©e le 29 aoĂ»t 1638, d’autres dons suivirent. Louis XIV, en mai 1674, confirmait l’existence de cet Ă©tablissement, il exemptait les religieuses de tous droits d’amortissement, de fief et autres pour les fermes de la VallĂ©e, de Gaubert, de terres Ă  Allonnes et au clos Aubry ; l’ensemble reprĂ©sentant 650 arpents de terre environ 320 hectares pour que les religieuses puissent en jouir pleinement, paisiblement et perpĂ©tuellement, cessant et faisant cesser tous troubles et empĂȘchement ». On devine derriĂšre cette phrase les tracasseries financiĂšres ou administratives dont les religieuses Ă©taient victimes. L’acte est signĂ© Louis et Colbert. La communautĂ© se composait de 4 religieuses, elles devaient accueillir gratuitement et soigner 12 femmes ou filles pauvres, malades, de la paroisse et des paroisses voisines, leur fournir nourriture et soins jusqu’à parfaite guĂ©rison. Les hommes n’étaient admis dans la communautĂ© que le temps nĂ©cessaire pour recevoir les soins exigĂ©s par leur AU TEMPS DE LOUIS XIVLe centralisme royal et les guerres de Louis XIV modifiĂšrent profondĂ©ment la vie rurale et sociale. Cette pĂ©riode fut marquĂ©e par un accroissement sensible des impĂŽts. En quelques annĂ©es, la taille fut multipliĂ©e par dix, puis apparut le vingtiĂšme, impĂŽt sur le revenu ; ce qui ne supprimait ni le cens ni le champart payĂ© au propriĂ©taire, ni la gabelle, ni la dĂźme. Un autre flĂ©au dĂ» aux guerres fut la prĂ©sence des militaires. En 1690, les habitants de Patay nommaient un commissaire chargĂ© du logement des gens de guerre lors de leur passage. Également, le duc d’OrlĂ©ans fut obligĂ© de donner des consignes trĂšs sĂ©vĂšres pour punir ceux qui s’introduisaient dans les fermes. En 1668, Patay comptait 700 communiants environ habitants, Villeneuve-sur-Conie avait 110 communiants, la Chapelle 120, PĂ©ronville 260, Villamblain 400 et Tournoisis 170. Henri de Patay, seigneur de Claireau, oĂč il rĂ©sidait, Ă©tait descendant de la vieille famille des seigneurs de Patay. Il eut deux filles Louise qui Ă©pousa en 1668 un d’Ales de Corbet et Marie-Jeanne qui se maria le 6 Janvier 1676 avec Charles de Musset de la Bonaventure. Les deux gendres se firent appeler seigneurs de Patay sans y rĂ©sider titre honorifique qui financiĂšrement Ă©tait de peu d’intĂ©rĂȘt. Le vrai seigneur de Patay Ă©tait le comte de Dunois. Celui-ci avait droit de justice qu’il exerçait par le bailli de Dunois rĂ©sidant Ă  ChĂąteaudun et un prĂ©vĂŽt demeurant Ă  Patay. Le comte de Dunois disposait Ă©galement des taxes et redevances perçues sur les foires, marchĂ©s et transactions locales. Le seigneur de Lignerolles, Antoine de MontdorĂ©, qui n’était pas noble, partageait en 1691 avec Pierre Thureau, cura de Villeneuve-sur-Conie, les dĂźmes de cette paroisse. Lors de la formation du diocĂšse de Blois, en 1697, les paroisses de Villeneuve, la Chapelle, Villamblain, Tournoisis y furent rattachĂ©es ; Patay restant au diocĂšse de Chartres. Il y avait Ă  cette Ă©poque, rue Trianon, une Ă©cole de filles dirigĂ©e par une religieuse et une Ă©cole de garçons, avec un INDUSTRIE ET COMMERCEL’élevage du mouton a procurĂ© depuis toujours un certain profit aux paysans. Une petite industrie locale s’était constituĂ©e, mais, eut peu d’importance jusqu’au XVIĂšme siĂšcle. Le mouton tondu, la laine Ă©tait lavĂ©e, cardĂ©e, peignĂ©e et filĂ©e ; travaux qui pouvaient se faire Ă  domicile et procuraient aux cultivateurs quelques supplĂ©ments de ressources. Le filage, activitĂ© essentiellement fĂ©minine, ne dĂ©passait pas 10 Ă  20 grammes Ă  l’heure. L’apparition du rouet Ă  pĂ©dale, au XVĂšme siĂšcle, permit de doubler les rendements. À Patay, au temps de Louis XIV, 8 Ă  10 fabricants achetaient la laine, la donnaient Ă  travailler Ă  domicile. Le fil produit, le tissage se faisait dans des ateliers, le tissu Ă©tait ensuite blanchi et lavĂ©. On pouvait alors procĂ©der Ă  la fabrication des couvertures, on y ajoutait un apprĂȘt pour les rendre plus attrayantes pour le client. Une assemblĂ©e des habitants fixait, en 1692, les droits de marque sur les chapeaux fabriquĂ©s Ă  Patay 10 sols pour un chapeau de castor, 5 sols pour un chapeau de poil, et 2 sols 6 deniers pour un chapeau de laine Caudebec ou autres au-dessous ». Les couverturiers et autres fabricants payaient Ă©galement un droit de marque. Patay Ă©tant Ă  l’écart des grandes routes ne pouvait que difficilement Ă©panouir son commerce. Vers 1740, l’intendance de la province, utilisant le moyen des corvĂ©es, fit construire un chemin empierrĂ© entre Patay et Saint PĂ©ravy pour faciliter le transport des grains. Les fabricants de couvertures en profitĂšrent pour acheter Ă  OrlĂ©ans les produits nĂ©cessaires et y vendre les marchandises fabriquĂ©es. On comptait 22 fabriques de couvertures vers 1788, elles donnaient du travail Ă  tous les habitants valides, il ne restait qu’une quinzaine de vieillards nĂ©cessiteux ou d’invalides secourus par la paroisse. Autre activitĂ©, la meunerie il existe, quartier de la Butte, un lieudit les trois moulins, en 1825, on comptait encore 5 moulins en activitĂ© Ă  Patay. Avec la nouvelle route, les trois foires de l’annĂ©e, celle du mardi gras ayant disparu, prirent plus d’importance. Outre les activitĂ©s traditionnelles, on vit arriver des marchands de quincaillerie, bimbeloterie, forains de toutes sortes et mĂȘme des bijoutiers. Faute de documents, il est impossible prĂ©sentement de connaĂźtre la construction des murailles de Patay et leur Ă©volution au cours des siĂšcles. Lorsqu’on 1755, le duc de Chevreuse, comte du Dunois, donna l’autorisation de dĂ©manteler, les murailles Ă©taient de construction rĂ©cente. Leurs dimensions invraisemblables vu la population laissent supposer qu’elles servaient uniquement Ă  faciliter la perception des droits d’octroi et Ă  protĂ©ger des loups. Les pierres servirent Ă  rĂ©tablir les rues qui Ă©taient si crevĂ©es qu’elles Ă©taient devenues impraticables ».8 LES DERNIERS SEIGNEURS DE PATAYEn 1768, naissait dans le VendĂŽmois Victor Musset. La mĂȘme annĂ©e, son pĂšre vendait, ainsi que Pierre d’Ales, vicomte de Corbet, leur titre de seigneur de Patay Ă  François du Clusel. Celui-ci Ă©tait chevalier, conseiller du Roi, maĂźtre de requĂȘtes, marquis de Montpipeau Huisseau, intendant de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Tours. Victor Musset, littĂ©rateur, se fit appeler Musset-Patay pour se distinguer de ses deux fils Paul et Alfred*, eux aussi Ă©crivains. Seul ce dernier devint cĂ©lĂšbre. Le principal seigneur de Patay Ă©tait Louis Joseph d’Albert, duc de Luynes et Chevreuse, comte de Dunois. Étant haut justicier de la paroisse et recevant les droits perçus sur les foires et les marchĂ©s, Ă  la veille de la rĂ©volution, il fit construire sur une place une halle en bois pour abriter les marchands. LA PÉRIODE RÉVOLUTIONNAIRE1 LES CAHIERS DE DOLÉANCESLe dimanche 13 juillet 1788, vers midi, un orage d’une particuliĂšre violence s’abattit sur une grande partie de la deux heures, les rĂ©coltes furent hachĂ©es si menues que le grain, tombĂ© en terre, fut enfoui dans une litiĂšre de fragments de paille. De nombreux fermiers Ă©taient ruinĂ©s et la famine Ă©tait Ă  prĂ©voir. Les cultivateurs de Patay, Rouvray et Villeneuve qui purent sauver leur rĂ©colte, trouvĂšrent le chemin impraticable entre Patay et Saint PĂ©ravy pour ravitailler OrlĂ©ans. C’est sur d’autres marchĂ©s qu’ils vendirent-leur blĂ©. La commission intermĂ©diaire de l’assemblĂ©e provinciale prit conscience de l’abandon depuis 1782 de cette seule liaison entre Patay et OrlĂ©ans. Le chemin fut rĂ©parĂ© et entretenu sur les fonds du dĂ©partement jusqu’en 1792 puis abandonnĂ© de nouveau. L’annĂ©e 1789 dĂ©buta mal le 1er janvier, le thermomĂštre descendit Ă  -18°, la neige Ă©tait abondante. On avait Ă©tĂ© obligĂ© de fermer toutes les manufactures, les ouvriers Ă©taient au chĂŽmage et le prix du pain augmentait considĂ©rablement. La population de Patay Ă©tait alors de habitants 198 familles, celle de Rouvray 152 habitants 33 familles, Villeneuve avait 172 habitants 46 familles et la Chapelle 225 habitants 50 familles. Le 20 fĂ©vrier fut envoyĂ©e Ă  chaque paroisse une circulaire convoquant les citoyens de 25 ans accomplis inscrits au rĂŽle des impositions. Le 6 mars, dans l’église Ă  l’issue de la messe, les citoyens actifs se retrouvĂšrent pour approuver un cahier de dolĂ©ances et procĂ©der Ă  l’élection de quatre dĂ©putĂ©s. Le cahier de Patay, qui n’a pas Ă©tĂ© retrouvĂ©, comporte plus de 23 signatures d’artisans et de commerçants. Il n’y eut que deux Ă©lus Michel Sevin, aubergiste et Charles Gajon, notaire. Les cahiers se plaignent des impĂŽts, des procĂšs trop dispendieux, des droits et privilĂšges seigneuriaux jugĂ©s injustes, du vagabondage en Beauce la mendicitĂ© Ă©tait un vrai flĂ©au pour les campagnes. Les habitants de Rouvray demandent que leur paroisse soit maintenue ils ont fait de grosses dĂ©penses pour rĂ©parer l’église et le presbytĂšre. En Beauce, pays de grande culture, on trouvait des fermes de 100 hectares ; les petits cultivateurs Ă©taient nombreux mais ne pouvaient ni s’agrandir ni Ă©tablir tous leurs enfants. Le rendement en blĂ© Ă©tait en moyenne de 12 quintaux Ă  l’hectare. Il y avait chevaux, bovins, quelques porcs, surtout des moutons. L’industrie lainiĂšre Ă©tait importante Ă  Patay oĂč l’on comptait 22 fabricants LES ÉMEUTES DE 1789La crainte de manque de pain et son prix trĂšs Ă©levĂ© occasionnĂšrent des Ă©meutes dans de nombreuses villes en cette annĂ©e 1789. À Patay le 23 avril, les habitants arrĂȘtaient des voitures de grains destinĂ©es Ă  OrlĂ©ans. Les populations des campagnes mettant opposition Ă  tout dĂ©placement qui leur paraissait suspect. Autre Ă©meute le vendredi 1er mai, que l’on attribua Ă  des sĂ©ditieux venus d’OrlĂ©ans, la prĂ©sence de la marĂ©chaussĂ©e empĂȘcha qu’il y eut des victimes. Nouvelle Ă©meute le vendredi 7 aoĂ»t cette fois le lieutenant de la marĂ©chaussĂ©e intervint et fit interner Ă  OrlĂ©ans 5 Ă©meutiers. Le 2 septembre par jugement prĂ©vĂŽtal, 3 d’entre eux furent condamnĂ©s au carcan et aux galĂšres Ă  perpĂ©tuitĂ© ; les deux autres au carcan et Ă  9 ans de galĂšre. Le roi commua les galĂšres en 1 an et 3 mois de prison. Les condamnĂ©s furent exposĂ©s le 16 novembre 1789 ; le 7 octobre 1790, ils Ă©taient toujours en UNE NOUVELLE ORGANISATION SOCIALELes documents manquent pour connaĂźtre la nouvelle organisation de la commune de Patay. On ne sait comment se dĂ©roulĂšrent les premiĂšres Ă©lections, ni le nom du maison commune mairie fut installĂ©e rue Trianon, Ă  l’emplacement de l’école des filles actuellement, le passage latĂ©ral de la maison de retraite. La nuit du 4 aoĂ»t vit l’abolition des privilĂšges mais aussi la suppression de nombreux impĂŽts, les grands perdants furent les municipalitĂ©s qui eurent Ă  leur charge l’entretien de la voirie, des Ă©coles, des Ă©glises et des cimetiĂšres ; elles virent, en mĂȘme temps disparaĂźtre leurs ressources octrois et taxes diverses. À Patay, le conseil gĂ©nĂ©ral de la commune dĂ©cida, en 1790, d’établir un droit de mesurage de 18 deniers par sac de blĂ© vendu sur le marchĂ©, en remplacement de l’octroi. Les intĂ©ressĂ©s protestĂšrent, affirmant que ce droit Ă©tait supprimĂ© par la loi du 15 mars 1790, mais le dĂ©partement approuva la dĂ©cision des Ă©lus de vit une rĂ©organisation totale de la nation. Patay ainsi que Villeneuve et la Chapelle furent rattachĂ©s au dĂ©partement du Loiret, rĂ©pondant ainsi Ă  un dĂ©sir exprimĂ© dans le cahier de dolĂ©ances. Dans le district d’OrlĂ©ans, Patay fut choisi comme chef-lieu de canton. On y procĂ©da Ă  l’élection d’un juge de paix qui, faute de local, rendit la justice dans la maison commune. Y eut-il une garde nationale Ă  Patay ? Faute de documents, on ne peut l’affirmer. La jeunesse chanta le ça ira » sur le marchĂ© dĂšs juin 1790. Pour appliquer le dĂ©cret du 15 septembre 1790 de l’AssemblĂ©e nationale, les membres de l’assemblĂ©e municipale demandĂšrent aux 4 religieuses si elles dĂ©siraient sortir de leur couvent, ce qu’elles n’insista pas, mais on nomma une commission administrative, sous la prĂ©sidence du maire, pour gĂ©rer l’établissement qui devint hospice civil. Naturellement, les fermiers refusĂšrent de payer le champart, qui fut supprimĂ© peu aprĂšs. L’administration de l’hospice se trouva sans ressources, obligĂ©e de faire appel Ă  la municipalitĂ© pour nourrir religieuses et malades. Par la suite, l’hospice ayant pu prĂ©senter ses titres de propriĂ©tĂ©, le champart fut transformĂ© en loyer payable LE CLERGÉ FACE A LA PERSÉCUTIONL’AssemblĂ©e Nationale avait votĂ©, le 12 juillet 1790, une constitution civile du clergĂ© », puis elle demanda Ă  tous les prĂȘtres en paroisse de prĂȘter serment. En janvier 1791, le curĂ© de Patay, Joseph Daubroche, curĂ© depuis 1749, prĂȘta semble-t-il ce serment avec serment Ă©tant jugĂ© invalide, il fut par la suite internĂ© Ă  OrlĂ©ans dans la prison de la Croix oĂč il mourut le 27 ventĂŽse an III 17 mars 1795 le jour oĂč il devait ĂȘtre libĂ©rĂ©, Ăąge de 75 ans. Son vicaire, Hyacinthe Constant, prĂȘtre du diocĂšse de Mende, venait d’arriver, il se prĂ©senta comme aumĂŽnier des religieuses et, Ă  ce titre, n’eut pas Ă  prĂȘter serment. Face Ă  la persĂ©cution, il eut la chance de pouvoir se cacher Ă  OrlĂ©ans, dans une famille amie. Il devint ensuite secrĂ©taire de l’évĂȘchĂ© et mourut chanoine en 1835. Le curĂ© de Rouvray Sainte Croix, Denis Chappellier, prĂȘta serment. Il fut Ă©lu le 18 novembre 1792 officier d’état 27 novembre 1792, il Ă©pousait, Ă  Rouvray, Marie Moreau dont il eut une fille le 28 mai 1793. Il disparut ensuite. Le curĂ© de la Chapelle Onzerain, Marin Turgeot, curĂ© depuis 1785, refusa le serment, il s’embarqua Ă  Dieppe en septembre 1792 pour l’Angleterre. Il fut remplacĂ© par Pierre Malivoire, religieux, qui prĂȘta serment. Lors de la fermeture des Ă©glises on le retrouve Ă  OrlĂ©ans, puis il revint Ă  Patay lors de la rĂ©ouverture des Ă©glises. Il mourut curĂ© de Mainvitiiers en 1815. Le curĂ© de Saint PĂ©ravy, François Sevestre, refusa le serment, i! fut internĂ© Ă  OrlĂ©ans le 29 mars 1793, dĂ©portĂ© Ă  Bordeaux puis Ă  Blaye fort PĂątĂ©. RapatriĂ© comme malade, il fut internĂ© Ă  OrlĂ©ans, prison de la Croix. Il mourut Ă  OrlĂ©ans en 1807. Le curĂ© de Villeneuve, Dollon, prĂȘta serment, il se retira en 1793, lors de la fermeture des Ă©glises. Le curĂ© de Terminiers, Vrain Pilate, refusa le serment, il Ă©migra en Suisse en septembre 1792, puis en Pologne. Il mourut Ă  OrlĂ©ans en SOUS LA TERREURLes archives communales manquent malheureusement pour suivre la suite des Ă©vĂ©nements. En 1792, le dĂ©partement procĂ©da Ă  la vente des biens d’église. De nombreux cultivateurs de Beauce purent racheter les terres qu’ils exploitaient. Les communes firent Ă©galement des achats payables en assignats, mais aucun document ne nous est parvenu. Les assignats Ă©taient devenus d’un usage courant, la monnaie mĂ©tallique disparut par suite des bruits de guerre et de la rĂ©colte mĂ©diocre de 1791. Mais le manque de petites coupures en assignats engendra de grandes difficultĂ©s pour le paiement des salaires et le commerce de dĂ©tail. La commune de Patay Ă©mit, en 1792, des billets patriotiques » pour remplacer la monnaie pour une somme de livres. À la suite de la dĂ©claration de guerre, le 20 avril 1792, quelques jeunes volontaires partirent pour l’armĂ©e. LĂ  aussi, les renseignements manquent. En septembre se constitua Ă  Patay une sociĂ©tĂ© populaire qui avait l’intention de surveiller les autoritĂ©s ».Le prix du blĂ© et du pain, Ă  la suite de rĂ©coltes mĂ©diocres, avait triplĂ© en deux ans, les salaires Ă©taient restĂ©s les mĂȘmes, les ouvriers ne pouvaient plus nourrir leur famille. Le dimanche 3 avril 1793, un rassemblement de journaliers alla incendier plusieurs fermes Ă  Villeneuve et Ă  Coinces les fermiers s’obstinant Ă  refuser de vendre leur blĂ© Ă  un prix raisonnable. SpontanĂ©ment, les fabricants couverturiers augmentĂšrent cardeurs et fileuses, pas autant qu’ils le dĂ©siraient. Les autoritĂ©s Ă©tant rĂ©ticentes, les ouvriers des autres professions ne purent obtenir satisfaction toute manifestation Ă©tant sĂ©vĂšrement rĂ©primĂ©e. Le conventionnel Laplanche, en mission Ă  OrlĂ©ans, nomma un agent Ă  Patay Ă  qui l’on reprocha de s’ĂȘtre comportĂ© en vĂ©ritable tyran. Les religieuses de la maison de retraite Ă©tant suspectes Ă  tous les bons citoyens» furent remplacĂ©es ; elles purent se retirer dans des maisons amies. En frimaire an II dĂ©cembre 1793, l’église de Patay fut pillĂ©e puis fermĂ©e au culte. Le dimanche fut remplacĂ© par le dĂ©cadi et le club organisa dans la ci-devant Ă©glise» devenue temple de la Raison, les fĂȘtes dĂ©cadaires. En mĂȘme temps, on, fit partir pour l’armĂ©e tous les jeunes gens non mariĂ©s de 18 Ă  25 ans. Le 28 fructidor an II 14 septembre 1794 Brival reprĂ©sentant du peuple en mission, nomma membre du comitĂ© de surveillance rĂ©volutionnaire, un rĂ©publicain modĂ©rĂ©, Michel Sevin, aubergiste Ă  Patay. 6 LES RÉQUISITIONSAvec la guerre, ce furent les rĂ©quisitions. Les fabricants couverturiers se plaignirent, le 25 novembre 1793, que l’on ne tenait pas compte de la qualitĂ© des couvertures mais seulement des dimensions et qu’ils travaillaient Ă  perte. Les couvertures revenaient, Ă  OrlĂ©ans Ă  20 livres et Ă  Patay Ă  23 livres, alors que le maximum payĂ© par l’administration de l’habillement des troupes Ă©tait de 18 livres. Le 17 Frimaire an III 7 dĂ©cembre 1794 pour permettre aux couverturiers de Patay, qui avaient cessĂ© toute fabrication, en raison de la perte Ă©norme enregistrĂ©e, de reprendre leur activitĂ©, on accorda pour les couvertures livrĂ©es et non payĂ©es la somme de 23 livres. Les fabricants purent ainsi concĂ©der des augmentations de salaire devenues indispensables. Les fabricants de couvertures de Patay expliquaient, en pluviĂŽse an III Janvier 1795 Les ouvriers, au prix de 15 sous par jour fixĂ©s par le maximum, Ă©tant dans l’impossibilitĂ© de vivre, Ă  cause de l’excessive chĂšretĂ© des denrĂ©es, ont Ă©tĂ© augmentĂ©s de prĂšs du double. Les fabricants, encore qu’ils perdissent beaucoup, n’ont pu humainement se refuser Ă  cette augmentation ». Le blĂ© fut un autre objet de rĂ©quisitions. Des commissaires venus de Paris, de l’armĂ©e et d’OrlĂ©ans, se rĂ©pandirent dans toutes les communes de la rĂ©gion oĂč ils firent des rĂ©quisitions de grains. Devant cette avalanche, les cultivateurs se montrĂšrent rĂ©ticents. Les municipalitĂ©s se contentĂšrent, gĂ©nĂ©ralement, de dĂ©livrer des ordres par Ă©crit, les cultivateurs affirmant qu’ils ne savaient pas lire. Le 4 Novembre 1793, le dĂ©partement requit la municipalitĂ© de Coinces de livrer 448 mines de blĂ© et de faire, Ă  cet effet, des visites domiciliaires. Pierre SoĂ»las, ancien maire, s’est trouvĂ© avoir 24 ou 25 mines battues, il n’avait que deux personnes Ă  nourrir. Il accepta de livrer 10 mines. Mais il refusa de les livrer quand la voiture vint les prendre et le lendemain, s’obstina disant que nous n’avions pas le droit d’exiger du blĂ© de fui et des autres particuliers ». Il se forma un rassemblement comme pour nous faire front, nous disant que quand ils verraient les commissaires de la force armĂ©e, ils leur parleraient ». Autres rĂ©quisitions, le 22 pluviĂŽse an II 11 fĂ©vrier 1794 sur Rouvray elle 15 ventĂŽse an II 3 mars 1794 sur Patay qui a encore assez de blĂ© pour trois ou quatre mois. Les municipalitĂ©s ne firent aucune rĂ©quisition. Le 21 prairial an II 9 juin 1794 l’administration du district d’OrlĂ©ans donna ordre de faire arrĂȘter les maires du canton de Patay. Ils ne furent libĂ©rĂ©s qu’aprĂšs livraison des rĂ©quisitions. AprĂšs Thermidor, en octobre 1794 brumaire an III, le district menaça d’incarcĂ©ration l’agent national de Coinces qui, depuis 21 jours, avait des batteurs Ă  sa disposition sans pourtant rien SOUS LE CONSULAT ET L’EMPIRESous le Consulat et l’Empire, la municipalitĂ© fut surtout prĂ©occupĂ©e par l’entretien des rues et du chemin de Patay Ă  Saint PĂ©ravy, devenu impraticable, seule liaison avec OrlĂ©ans rien n’avait Ă©tĂ© fait depuis 1792. C’est par des centimes additionnels, payĂ©s en journĂ©es de charroi ou en argent, que l’on put, aprĂšs de longues nĂ©gociations obtenir des rĂ©parations. Les Ă©coles avaient Ă©tĂ© fermĂ©es aux heures sombres de la RĂ©volution. Depuis l’instituteur, peu compĂ©tent, Ă©tait payĂ© par une rĂ©tribution des Ă©lĂšves. Il serait Ă  souhaiter que l’on ait des instituteurs Ă©clairĂ©s, payĂ©s par la contribution mobiliĂšre et tractations, la commune de Patay rachetait au citoyen Deluyne, ci-devant seigneur, la halle nĂ©cessaire au marchĂ©. Pour les trois foires, celle du 3 mai Ă©tant pratiquement abandonnĂ©e, la meilleure date serait le 18 ventĂŽse 8 mars. Les deux autres restant inchangĂ©es, le 25 Juillet et 30 Novembre. Le 10 Janvier 1803, Jean Baptiste Landais Ă©tait nommĂ© curĂ© de Patay. L’église avait Ă©tĂ© pillĂ©e et saccagĂ©e, il fallut refaire la toiture, amĂ©nager l’intĂ©rieur et racheter les objets les plus nĂ©cessaires pour le culte. En 1806, François Sutin Ă©tait nommĂ© Ă  Patay, il y mourut en 1813. Lui succĂ©dait Charles TrollĂ© ; la vie de ce dernier est un vĂ©ritable roman d’aventures. CurĂ© de Bai-ville, il est dĂ©portĂ© Ă  Cayenne sous le Directoire, nommĂ© curĂ© de Patay, il est expulsĂ© en 1825, il mourut curĂ© dans l’Yonne en 1827. En 1806, les deux municipalitĂ©s de Patay et de Rouvray se rĂ©unissaient. L’église, le presbytĂšre et le cimetiĂšre de Rouvray Ă©tant inutilisĂ©s depuis plus de six ans, elles en demandent l’aliĂ©nation. L’église Saint Jean Baptiste de Rouvray fut dĂ©molie en 1814. Pendant les guerres de l’Empire, Patay eut Ă  fournir un contingent de soldats, 12 d’entre eux moururent en Espagne ou dans la Grande armĂ©e. Le 10 dĂ©cembre 1815, le maire Ă©crit les Ă©vĂ©nements fĂącheux que nous avons Ă©prouvĂ©s nous ont forcĂ©s de suspendre la cession du conseil municipal » . Il a fallu faire face aux approvisionnements des troupes qui ont passĂ© et sĂ©journĂ© dans notre commune, Ă  leur logement, aux rĂ©quisitions, et de plus, maintenir la tranquillitĂ© publique ». Patay connut ainsi l’occupation ennemie en 1815. LES TEMPS MODERNES1 PATAY AU XIXĂšme SIÈCLEEn 1816, la guerre Ă©tant terminĂ©e, il y avait Ă  Patay 25 fabricants couverturiers, la difficultĂ© pour eux de concurrencer OrlĂ©ans les avait amenĂ©s Ă  diminuer leur production et Ă  licencier quelques ouvriers. Le retour des militaires, revenus en gĂ©nĂ©ral sans pension, les laissaient sans ressources. À tous ces sans emploi, la commune proposa de travailler Ă  l’entretien des rues et des places sous forme d’atelier de charitĂ©. La maison de retraite avait, avant la rĂ©volution, des religieuses sƓurs de la CharitĂ© Notre Dame. Par suite de la disparition de cette congrĂ©gation, la municipalitĂ© fit appel, en 1823, aux Filles de la Croix, dites sƓurs de Saint AndrĂ©, congrĂ©gation fondĂ©e en 1807 par Saint AndrĂ© Fournet et Sainte Élisabeth Bichier des Anges. Trois religieuses de cet ordre vinrent Ă  Patay, la derniĂšre religieuse quitta la maison de retraite en octobre 1989. Il n’y avait pas Ă  cette Ă©poque d’école communale Ă  Patay. Une classe de filles, gratuite, Ă©tait installĂ©e dans l’hospice, une autre en ville chez une religieuse. Les deux classes de garçons Ă©taient chez les instituteurs, la commune payait 200 francs par an pour les enfants indigents. Une poste fut installĂ©e Ă  Patay, le courrier transitant par Artenay. En janvier 1823, la RetrĂȘve, riviĂšre venant de Gidy, Ă©tait en crue, Ă©vĂ©nement qui ne se produisait guĂšre que tous les quinze 1825, il Ă©tait question de dĂ©placer le cimetiĂšre de la rue Coquillette, trop petit pour Patay et Rouvray. En 1832, une Ă©pidĂ©mie de cholĂ©ra morbus fit, entre aoĂ»t et novembre des victimes dans presque toutes les maisons de Patay et Rouvray. Il Ă©tait urgent d’ouvrir un autre cimetiĂšre hors de la ville. Nouvelle Ă©pidĂ©mie en 1848-1849. L’ancien cimetiĂšre fut dĂ©finitivement fermĂ© et les restes transfĂ©rĂ©s dans le nouveau le 11 novembre 1850. Les fabriques de couvertures n’étant plus rentables Ă  Patay, le nombre de couverturiers diminua rapidement. A l’inverse, il y avait toujours six moulins Ă  vent sur la commune. En 1848, une minoterie rĂ©cemment installĂ©e se dotait d’une machine Ă  vapeur de 10 chevaux, alimentĂ©e au charbon. En 1848, Patay connut, comme toutes les autres villes, un moment d’effervescence avec l’établissement d’une nouvelle garde nationale, puis la vie redevint calme jusqu’en 1870. La communautĂ© protestante n’était pas nombreuse Ă  Patay, 45 fidĂšles, mais, avec les communes voisines, Bricy 81 fidĂšles, Coinces 40, l’ensemble reprĂ©sentait 263 personnes. En 1826, la dĂ©cision fut prise de construire un temple Ă  Patay, rue Coquillette ; les dates de 1859 et 1898 sont inscrites sur cet Ă©difice. Les quatre cloches de l’église furent bĂ©nites en 1868, la plus grosse frappĂ©e par un obus prussien, fut refondue en 1871, elle pĂšse 777 kilos. Les autres pĂšsent 551 kilos, 398 kilos et 222 kilos. Elles donnent le fa, le sol, le la et le PATAY DU 1er au 4 DÉCEMBRE 1870La bataille autour de Patay AprĂšs la victoire de Coulmiers, le 9 novembre, le gĂ©nĂ©ral Chanzy avait Ă©tabli son quartier gĂ©nĂ©ral Ă  Saint-PĂ©ravy-la-Colombe. Le matin du 1er dĂ©cembre, une journĂ©e claire et froide, le gĂ©nĂ©ral, son Ă©tat-major, le train des Ă©quipages inondaient chemins, jardins et champs autour de Patay. De tous cĂŽtĂ©s, le regard n’apercevait qu’un immense dĂ©ploiement de troupes françaises. Le combat commença presque aussitĂŽt. A Guillonville, le feu prit aux maisons. Puis, l’effort du combat tourna sur le chĂąteau et le parc de Villepion qui fut occupĂ© en fin de journĂ©e. Pendant ce temps, d’autres combattants occupaient le village de Faverolles et la ferme de Nonneville. A Patay mĂȘme, les blessĂ©s affluaient. L’école des filles, transformĂ©e en ambulance, Ă©tait encombrĂ©e. Faute de place, les malheureux qui avaient encore l’usage de leurs jambes devaient monter au grenier oĂč, sous l’ardoise, la paille dĂ©fendait mal du froid piquant de la nuit. Le lendemain, 2 dĂ©cembre, vers 9 heures, le combat reprenait. Dans les rues de Patay, on croisait les zouaves pontificaux, les soldats du pape qui, avant le combat, voulurent entendre la messe. Un peu plus tard, des courriers arrivaient prĂšs du gĂ©nĂ©ral Chanzy, toujours Ă  Patay le chĂąteau de Goury avait Ă©tĂ© abandonnĂ©, Villepion Ă©tait menacĂ©. Le combat se concentrait alors sur Loigny. Le courage des zouaves pontificaux et du colonel de Charette est trop connu pour qu’il soit nĂ©cessaire d’insister. Les zouaves ne furent pas les seuls hĂ©ros de cette journĂ©e. En ce 2 dĂ©cembre, Ă  Patay mĂȘme, les dĂ©tonations continuelles du canon, le crĂ©pitement presque incessant des mitrailleuses et de la fusillade faisaient sur tous une profonde impression d’épouvantĂ©, mĂȘlĂ© Ă  tout cela, le bruit des voitures ambulances, de charrettes conduites par des paysans en fuite, le roulement sonore des batteries. Les blessĂ©s nombreux dĂšs le matin arrivaient sans cesse granges, bergeries, Ă©curies, remises Ă©taient remplies. L’église, au lieu des hymnes sacrĂ©s, retentissait de cris de douleur. Au cours de la nuit du 2 au 3 dĂ©cembre, les gĂ©nĂ©raux des diverses unitĂ©s vinrent rendre compte de leur situation respective les hommes Ă©taient Ă  bout de force, certains n’avaient pas mangĂ© depuis la veille, d’autres n’avaient plus de chaussures. AprĂšs avoir signalĂ© la situation au gĂ©nĂ©ral d’Aurelles, Chanzy, craignant d’ĂȘtre pris Ă  revers par l’ennemi, donna l’ordre de la des Prussiens DĂšs le matin du 3 dĂ©cembre, ce fut dans Patay la plus indicible confusion une foule humaine qui n’est plus une armĂ©e, qui n’a plus d’ordres ni de chefs. Un pĂȘle-mĂȘle d’hommes de toutes armes et de tous costumes. Des blessĂ©s qu’on charge sur des voitures pour les transporter au loin, tandis que d’autres arrivant un instant aprĂšs sont mis Ă  leur place. Ajoutez au tableau le bruit sourd du canon qui tonne toute la journĂ©e. Vers le midi, les habitants comprenant enfin la situation furent pris d’une panique soudaine. On s’agite, on court comme affolĂ© de terreur. Le 4 dĂ©cembre Ă©tait un dimanche, on devait ce jour-lĂ  cĂ©lĂ©brer la fĂȘte de l’ImmaculĂ©e Conception. Soudain un cri, les Prussiens », au mĂȘme moment, une dĂ©tonation, un obus explose sur la place. Le gĂ©nĂ©ral de brigade de TucĂ©, dont la cavalerie est sur la route de Lignerolles, arrive et envoie des vedettes dans le clocher, les mobiles de Loir et Cher prennent position derriĂšre les murs des jardins. Des nuages de fumĂ©e noire et infecte envahissent la ville, le feu avait pris aux premiers coups de canon et s’était dĂ©veloppĂ© sous l’action d’un vent violent et sec. Vers onze heures, la fusillade cessa subitement, l’ennemi s’étant Ă©loignĂ© devant la rĂ©sistance des mobiles. Mais les mobiles ayant reçu l’ordre de se replier, la ville devenait sans dĂ©fense. Vers deux heures, l’ennemi postĂ© prĂšs de Moret recommença Ă  tirer sur la ville, de nouveaux incendies s’allumĂšrent. Le vicaire, Monsieur l’abbĂ© Garnier, du haut d’un mamelon devant le cimetiĂšre agite avec un bĂąton un drapeau d’ambulance. Le feu cesse aussitĂŽt, le signal a Ă©tĂ© compris. Quelques instants aprĂšs, les ennemis, piĂ©tons et cavaliers entraient comme une trombe par toutes les issues. Le torrent dĂ©vastateur envahit tout, semant sur son passage la terreur, le pillage et la ruine. Les envahisseurs sont les maĂźtres absolus, la nuit venue, dans la joie, ils dĂ©vorent en un repas la subsistance de familles entiĂšres. Pendant ce temps, des maisons continuaient Ă  brĂ»ler sans que personne ne s’en soucie. Le mardi matin, les envahisseurs quittaient la ville pour ĂȘtre remplacĂ©s par d’autres jusqu’à la fin de l’occupation. Le 4 dĂ©cembre 1871, fut bĂ©nie, dans le cimetiĂšre de Patay, une croix monumentale Ă©levĂ©e sur la fosse qui recouvre les corps de 73 français, dont 55 connus. Leurs noms sont inscrits sur le monument. Bon nombre des anciens mobiles de Loir et Cher assistĂšrent Ă  cette cĂ©rĂ©monie prĂ©sidĂ©e par les maires de Patay et ENTRE DEUX GUERRESLe Patay actuel nous est bien connu et les anciens peuvent nous expliquer comment vivaient les habitants au dĂ©but du siĂšcle. En Avril 1873, la ligne de chemin de fer OrlĂ©ans-Chartres Ă©tait ouverte aux voyageurs avec trois puis quatre trains dans chaque sens elle fonctionna jusqu’en comme ligne Ă©cole pour les militaires du 5Ăšme gĂ©nie de Versailles, le service fut intĂ©gralement assurĂ© par eux de 1887 Ă  1939. L’église fut restaurĂ©e et modifiĂ©e en 1873 l’autel principal date de cette annĂ©e-lĂ . En 1882, fut construit le bĂątiment principal de la maison de retraite. Furent Ă©galement construites sur l’emplacement de l’ancien cimetiĂšre, la poste, la salle de sport et la mairie. L’enseignement ne fut pas nĂ©gligĂ© ; la municipalitĂ© fit de sĂ©rieux efforts pour construire et amĂ©nager des locaux scolaires. L’école libre de filles de la place Jeanne d’Arc fut construite en 1888. Si la sĂ©paration amena quelques difficultĂ©s en 1906-1910, la rĂ©conciliation entre la commune et la paroisse fut rĂ©alisĂ©e en 1913 par l’inauguration de la statue de Jeanne d’Arc qui donna lieu Ă  de grandes festivitĂ©s. Une usine Ă©lectrique, gĂ©rĂ©e par une sociĂ©tĂ© privĂ©e, commença Ă  fonctionner en 1912 permettant l’éclairage des maisons. Ce fut ensuite la terrible guerre de 1914-1918 qui provoqua la mort de 47 soldats de Patay et de 30 de Rouvray. On ne peut qu’évoquer l’apparition de l’automobile et de nombreuses machines agricoles, ce qui amena la modernisation progressive du pays et l’évolution sociale qui se PATAY EN 1944 Étant proche du camp de Bricy, Patay ne fut pas Ă©pargnĂ© en cette annĂ©e 1944. AprĂšs chaque bombardement, les allemands rĂ©quisitionnaient des ouvriers, que le garde-champĂȘtre devait trouver pour dĂ©blayer le camp. Le 22 mai, 10 aviateurs amĂ©ricains trouvaient la mort dans les communes voisines, ils furent inhumĂ©s dans le cimetiĂšre de 6 Juillet, des avions amĂ©ricains bombardaient les embranchements de la gare plusieurs maisons Ă©taient dĂ©molies mais il n’y eut pas de victimes. 6 ou 8 familles Ă©taient sinistrĂ©es. La mairie rĂ©quisitionna aussitĂŽt 6 immeubles non occupĂ©s. Le 15 aoĂ»t, un mardi, fĂȘte de l’Assomption, de nombreux habitants de Patay avaient assistĂ© Ă  la messe solennelle de 11 heures, prĂ©sidĂ©e par l’abbĂ© Blandin, curĂ© l’aprĂšs-midi, les vĂȘpres Ă©taient suivies d’une procession. Pendant ce temps et depuis plusieurs jours, on chargeait en gare un train de munitions, prĂ©alablement installĂ©es dans les bois de la Mare Ă  20 heures, un soldat autrichien prĂ©vint quelques personnes que le train allait sauter. L’alerte Ă©tait donnĂ©e et tous les habitants quittaient la ville sous une pluie battante, beaucoup se dirigeaient vers Villeneuve-sur-Conie, ou se cachaient dans leur cave. À 22 heures 10 exactement, une lueur gigantesque embrasait le ciel aussitĂŽt suivie d’un bruit formidable, c’était le premier wagon qui sautait. Une quinzaine d’autres explosions plus ou moins violentes devaient suivre en l’espace de trois quarts d’heure. Sans la pluie torrentielle qui tombait depuis 19 heures, avec le vent qui soufflait, il y aurait eu des incendies dans la plupart des quartiers et mĂȘme dans les fermes des environs, chaque explosion projetant, dans toutes les directions, des matĂ©riaux embrasĂ©s. Le feu qui avait pris en plusieurs points de la ville fut rapidement maĂźtrisĂ© par les pompiers et de courageux volontaires, sauf chez monsieur Roger, marchand de bois et charbon prĂšs de la gare. Le lendemain matin, on se rendit compte du dĂ©sastre. Une quarantaine de maisons Ă©taient inhabitables et la plupart des autres endommagĂ©es toitures percĂ©es, cloisons soufflĂ©es, vitres brisĂ©es, la consternation Ă©tait gĂ©nĂ©rale. Heureusement, il n’y avait pas de victime. Vers onze heures, un cri retentit VoilĂ  les AmĂ©ricains, ils arrivent par la route de Villeneuve ! » ImmĂ©diatement c’était la ruĂ©e. Quelques chars de la troisiĂšme armĂ©e GĂ©nĂ©ral Patton faisaient halte Ă  l’entrĂ©e de la ville. Le matin du 17, il fallut dĂ©chanter, un groupe de 150 Ă  200 Allemands armĂ©s de canons antichars arrivait en camions. À 20 heures, pour le couvre-feu, chacun s’enfermait chez soi. Peu aprĂšs, les camions allemands disparaissaient car l’armĂ©e amĂ©ricaine approchait de Patay. Le matin du 18 aoĂ»t, drapeaux et banderoles apparaissaient aux fenĂȘtres pour accueillir les libĂ©rateurs. Restait Ă  soulager ceux qui avaient tout perdu, Ă  reconstruire ou Ă  rĂ©parer. DĂšs le 18, les Ă©quipes de la dĂ©fense passive et des hommes de bonne volontĂ© Ă©taient requis pour dĂ©blayer les rues. Les Ă©coles Ă©tant trĂšs endommagĂ©es, surtout celle des filles, il fallut effectuer d’importants travaux avant la rentrĂ©e des classes. Dans l’église, les deux vitraux reprĂ©sentant Jeanne d’Arc, bĂ©nis en 1930, restĂšrent intacts ; tous les autres, brisĂ©s par l’explosion, furent refondus.
CinĂ©ma: LE DOUDOU - P.Mechelen J.HervĂ©: BIENVENUE AU GONDWANA - Mamane: ARRETE DE PLEURER PENELOPE - J. ARNAUD / C. PUGET: CLOCLO - Florent-Emilio SIRI: UNE SEMAINE SUR DEUX - Ivan CALBERAC: UN CHATEAU EN ESPAGNE - Isabelle DOVAL: ESPACE DÉTENTE - Bruno SOLO et Yvan LE BOLLOC''H: UN AN - Laurent BOULANGER:
Description Infos pratiques Y aller Votre avis Description sur Théùtre Le Bout - Spectacles jeune public Le Théùtre Le Bout, Ă  Paris, connu pour sa programmation enfant trĂšs rĂ©ussie et l'interaction avec le jeune public, propose plusieurs spectacles pour enfants. ActualitĂ©s Théùtre Le Bout - Spectacles jeune public ‱ La princesse au petit pois dans la tĂȘte, dĂšs 3 ans L'histoire L’Ogre prĂ©pare un grand mĂ©choui. Il a l’intention de capturer un maximum d’enfants. La princesse n’est pas trĂšs maligne, mais elle est secondĂ©e par le jeune dentiste du Royaume, prĂȘt Ă  se transformer en vĂ©ritable chevalier pour gagner son amour. Parents et enfants sont hilares devant cette aventure interactive oĂč peur, sentiments, chansons et fous rires sont Ă  l’honneur. ‱ La princesse Rose et le retour de l'Ogre, la suite de la Princesse au petit pois, dĂšs 3 ans Un ogre revient se venger d'un princesse qui l'avait malmenĂ© autrefois. ‱ Au secours ! Le Prince Aubert a disparu, dĂšs 4 ans L'histoire le Prince a perdu la mĂ©moire et agit sous les ordres d'une trĂšs vilaine sorciĂšre. Quant Ă  son pĂšre, ce n'est pas mieux, il est ensorcelĂ© ! Pour sauver le Royaume de ce grand danger, la Princesse Pervenche a besoin des enfants. AidĂ©e des spectateurs, elle va chercher les indices qui vont permettre de sauver le royaume... Cette comĂ©die qui fait participer les enfants les amusera beaucoup, Ă  partir de 4 ans. ‱ Pierre et la Princesse ensorcelĂ©e, dĂšs 4 ans L'histoire La princesse Violette rĂšgne sur le royaume de NĂ©a et veille Ă  dispenser joie et bonheur. Jalouse, la vieille Mordurudru lui jette un sortilĂšge la Princesse Violette deviendra incapable d’aimer un ĂȘtre humain. Devenue mĂ©chante, faisant rĂ©gner le malheur, la princesse cherche un antidote. Le jeune Pierre, amoureux d’elle en secret, est-il le fou du village que l’on prĂ©tend ? Avec l’aide de ses amis les enfants, pourra-t-il aider la Princesse envoĂ»tĂ©e ? DĂšs 3 ans. ‱ Toutankhamon et le ScarabĂ©e d'Or L'histoire Le grand Vizir veut devenir maĂźtre d’Egypte. Il doit voler le ScarabĂ©e d’Or du Pharaon. Par le chantage, il force le prince Toutankhamon Ă  dĂ©rober pour lui ce fameux trĂ©sor
 La jeune princesse Ankhensenamon rĂ©ussira-t-elle Ă  contrer le plan machiavĂ©lique du mĂ©chant Vizir ? Les enfants font partie intĂ©grante de l’histoire et aident les deux jeunes amoureux Ă  contrecarrer les projets funestes du Grand PrĂȘtre. De trĂšs belles chansons rythment cette envoĂ»tante aventure Ă  travers l’histoire. DĂšs 5 ans. Infos Pratiques Afficher le numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone Email contact Web Tarifs Adulte 12 € Enfant 10 € AccĂšs mĂ©tro Pigalle, bus 67 ou 72 Bon Ă  savoir RĂ©servation par tĂ©lĂ©phone ou dans les billetteries classiques Fnac, Virgin, kiosques, Grands magasins et billetteries internet - Paiements acceptĂ©s sur place chĂšques ou espĂšces. DerniĂšre mise Ă  jour 25/04/2022 Signaler une erreur Localisation Théùtre Le Bout - Spectacles jeune public Adresse 6 rue frochot 75009, Paris, Paris, Ile de France Cliquez ici pour voir l'itinĂ©raire sur GoogleMap Donnez votre avis sur Théùtre Le Bout - Spectacles jeune public Autres idĂ©es Spectacles - Ile de France Mouchette et les papillons - A la Folie Théùtre A la Folie Théùtre prĂ©sente "Mouchette et les papillons", un spectacle pour les enfants, de 2 Ă  7 ans. Le jour oĂč Mouchette croise un Papillon pour la premiĂšre fois, elle n'a plus qu'une seule idĂ©e en tĂȘte En devenir un ! Le chevalier du royaume des rĂȘves - A la Folie Théùtre A la Folie Théùtre, Ă  Paris, prĂ©sente "Le chevalier du royaume des rĂȘves", un spectacle pour les enfants de 5 Ă  10 ans. Chaque soir, Merlin attend avec impatience de s’endormir. Car il a un don
 Celui de ne jamais faire de cauchemars et de voyager dans ses rĂȘves. Merlin est un enfant diffĂ©rent et on se moque parfois de lui... LEPRINCE AUBERT A DISPARU (Enfants) - du dimanche 23 septembre 2018 au mercredi 24 juin 2020 - Théùtre le Bout, Paris, 75009 - Toute l'info sur l'evenement "On avait l'envie d'avoir envie c'Ă©tait impensable de faire deux Ă©ditions blanches Ă  la suite", a exposĂ© vendredi Ă  l'AFP le directeur du festival du Printemps de Bourges, Boris Vedel. C'est le premier festival d'importance en France depuis la crise sanitaire, qui se tiendra du 22 au 27 juin, en Ă©tĂ©. "Le Printemps sera diffĂ©rent mais ce sera le Printemps. Les artistes ont tous acceptĂ© de jouer avec des jauges Ă  65% et, d'aprĂšs les Ă©lĂ©ments en place, on doit pouvoir boucler notre budget", a poursuivi Boris festivaliers en distanciĂ©Le Printemps, qui avait attirĂ© personnes pour sa derniĂšre vĂ©ritable Ă©dition en 2019 il n'y avait eu qu'une scĂšne symbolique dĂ©calĂ©e en septembre 2020 avec des artistes Ă©mergents, ne devrait au mieux accueillir que " festivaliers cette fois selon son salles seront en configuration assise et distanciĂ©e. Le festival a fait une croix sur sa plus grande enceinte, le W places, en raison du contexte sanitaire. La plus grande des salles sera le Palais d'Auron, qui ne recevra que personnes. Le port du masque sera obligatoire sur l'ensemble du site du festival, en intĂ©rieur comme en extĂ©rieur. Le couvre-feu sera Ă  cette pĂ©riode Ă  Ă©clectiquePlus de 70 artistes se produiront, entre figures Ă©mergentes - puisque le Printemps est aussi une couveuse de talents - et valeurs confirmĂ©es comme GaĂ«l Faye, Jean-Louis Aubert, Pomme, Suzane, Philippe Katerine, SĂ©bastien Tellier ou encore relĂšve, comme la gĂ©nĂ©ration montante du rap, incarnĂ©e par Lala &ce prononcer "Ace" comme au tennis, ou les jeunes pousses mises en avant aux derniĂšres Victoires de la Musique - Yseult, HervĂ© ou encore NoĂ© Preszow prononcer "PrĂ©chof" - sont aussi de la partie. Sans oublier des crĂ©ations, comme un hommage Ă  Prince disparu il y a cinq ans par Jeanne des rares festivals maintenusPar ailleurs, au lendemain du Printemps, le 28 juin Ă  Bourges, se tiendra le second volet des Etats gĂ©nĂ©raux des festivals avec Roselyne Bachelot, initialement prĂ©vu le 22 juin, a indiquĂ© vendredi le ministĂšre de la Printemps est l'un des rares festivals majeurs dans les musiques actuelles Ă  se tenir cet Ă©tĂ©, tout comme les Vieilles Charrues 8-18 juillet et les Francofolies 10-14 juillet. Face aux contraintes sanitaires avancĂ©es au fil des mois, de nombreux gros festivals ont dĂ©jĂ  annulĂ©, tels Solidays, EurockĂ©ennes, Hellfest, Garorock, Main Square, Art Rock, Lollapalooza ou encore Musilac. THÉÂTREParis dĂšs 16,50€ 10,95 €. Du 15/01/22 au 27/03/22. Un conte musical magique et interactif qui ravira petits et grands. Mimosa le pirate a un terrible problĂšme : il est gentil. Lorsqu’il trouve le plus grand trĂ©sor des sept mers du sud, il pense qu’enfin il sera acceptĂ© parmi les siens. EN SAVOIR PLUS.
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